Chapitre 17 (Victoire)

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Incapable de fermer l'oeil, je passe la nuit à repenser à Théo, au moment où il m'a dit que je l'intéressais, à celui où il a sous-entendu que nous allions être plus que des amis, à sa déclaration qui a fait naître en moi des espoirs que je n'avais encore jamais osé avoir. Et s'il était vraiment amoureux de moi ? Cela expliquerait qu'il veuille à ce point passer du temps avec moi et qu'il me couvre de compliments. C'est bien ce que font les garçons quand ils veulent sortir avec une fille, ils lui font des compliments et sautent sur chaque occasion de la voir. Mais Théo l'a dit lui-même, il n'est pas comme les autres garçons ce qui rend ces comparaisons pour le moins hasardeuses. Et puis l'idée qu'il puisse m'aimer paraît tellement improbable... C'est vrai quoi, Théo est beau, grand, fort, apparemment pas trop bête (il lit Alfred de Musset ce qui est une marque d'intelligence selon moi), sportif de haut niveau, débordant de confiance en lui, charismatique, plutôt drôle bien qu'un peu lourd quand même. Il ne manquerait plus qu'il soit aussi musicien et il serait l'homme parfait. Enfin bref, ça pour dire que Théo a tout pour plaire, et d'ailleurs il plaît. Il a déjà fait fondre ma soeur et les filles du club de gym. Autant dire que s'il veut se trouver une copine il a l'embarras du choix. Et je ne vois pas pourquoi il me choisirait moi, la fille au mauvais caractère, la fille dont tout le monde se fiche, la solitaire, la bizarre, l'insociable, la déprimée, j'en passe et des meilleurs. Lui et moi, ça n'a aucun sens. Pourtant je me surprends à y croire, pas beaucoup mais au moins un tout petit peu. Au fond de moi, j'ai envie d'y croire parce-que, même si ça me coûte de le reconnaître, la vérité c'est que Théo me plaît. J'ai dit qu'il me plaît, pas que je suis amoureuse de lui ! Ce sont deux choses très différentes !

Soulagée que cette nuit d'insomnie se termine enfin,  je bondis hors de mon lit sitôt que le réveil sonne. Je me dirige directement vers la salle de bain. Face au miroir, je peste en voyant les cernes sous mes yeux fatigués et mon teint blafard causés par le manque de sommeil. D'ordinaire, le fait d'avoir une tête de déterrée ne m'aurait pas gêné outre mesure, peut-être même y aurais-je vu un atout pour effrayer me camarades et ainsi les inciter à garder leurs distances avec moi. Mais aujourd'hui n'est pas un jour comme les autres. Aujourd'hui je ne veux pas avoir une tête de déterrée. Alors je m'empare de la trousse à maquillage de ma mère. Pendant un moment, je me débats avec le gloss, le fard et je ne sais quel autre produit. En vain, le résultat est tout bonnement catastrophique. Entre le gloss qui bave et le fard dont j'ai abusé, je ressemble au Joker ! Décidément, la cosmétique est une chose qui me dépasse. Je décide de renoncer au recours à des produits beauté et consacre de longues minutes à lutter pour redonner à mon visage une allure naturelle et surtout humaine.

De retour dans ma chambre, je farfouille dans mon armoire pour trouver quoi me mettre pour aller au lycée. D'ordinaire, je prends le premier truc qui me passe sous la main, me moquant complètement de savoir si mon haut va avec mon bas et si les couleurs de l'ensemble se marient bien ou non entre elles. Mais aujourd'hui n'est pas un jour comme les autres. Aujourd'hui je ne veux pas être habillée comme un sagouin. Longuement, j'enfile des vêtements puis les retire. Finalement, par manque de temps, je suis bien obligée de trancher sans vraiment être satisfaite. J'opte pour une chemise discrète et un jean.

Je me rends dans le séjour au moment où mes parents le quittent pour aller au travail. Ils ont tous les deux des rendez-vous de bonne heure ce matin. Ils me souhaitent une bonne journée et s'éclipsent. Je commence à déjeuner seule mais je suis très vite rejointe par ma soeur. Elle me salue et vient s'asseoir en face de moi. Ses premiers mots concernent maman, elle les prononce sans jamais lever la tête de son bol de céréales.

_ Elle est déjà partie ?

_ Oui, elle commençait plus tôt ce matin. 

_ Tant mieux, bon débarras, lâche-t-elle dans la foulée.

Juste une fille bien Où les histoires vivent. Découvrez maintenant