En arrivant chez moi, je m'attends forcément à une remarque au sujet de ma sortie du dimanche après-midi. D'ailleurs, je ne m'y trompe pas. A peine ai-je le temps de franchir le seuil de la maison et de filer jusqu'à ma chambre que je me fais sermonner. Mais le sermon ne vient pas de ma mère comme je m'y attendais. Au contraire, quand je l'ai croisée dans le couloir, elle ne m'a pas décroché un mot, préférant feindre l'ignorance la plus totale. A ma grande surprise, l'offensive vient en réalité de ma soeur.
Alors que je suis en train de me débarrasser de mon jean et de ma veste pour revêtir une tenue plus décontractée, elle fait irruption dans la pièce et me dit sèchement :
_ Il faut que tu arrêtes avec Théo.
_ Pourquoi tu me parles de lui ? je la questionne immédiatement d'un air soupçonneux.
Elle ignore ma question et me répète :
_ Il faut vraiment que tu arrêtes avec lui.
Je ne sais pas pourquoi mais elle a visiblement décidé de revenir à la charge au sujet de ma relation avec Théo. Elle m'avait bien fait comprendre en venant au soutien de ma mère l'autre soir qu'elle ne voyait pas d'un bon oeil le fait que je fréquente Théo mais je ne pensais pas qu'elle irait jusqu'à me faire la leçon. Si elle croit que je vais la laisser dicter ma vie, elle rêve. Je me suis suffisamment bridée comme ça. J'entends bien faire valoir mon libre arbitre maintenant. Ne lui en déplaise et n'en déplaise à ma mère.
Il me semble qu'une petite mise au point s'impose. Je n'y vais pas avec le dos de la cuillère.
_Lâche-moi la grappe et mêle-toi de tes affaires ! j'assène d'abord.
_ Je m'inquiète pour toi c'est tout ! réplique-t-elle dans la foulée.
_ Ne dis pas n'importe quoi. On sait toutes les deux que tu ne t'inquiètes pas pour moi. Tu es jalouse parce que Théo préfère passer du temps avec moi plutôt qu'avec toi.
Julie lève les yeux au ciel au moment de me répondre.
_ Moi jalouse de toi à cause de Théo ? Et puis quoi encore ? Je me fous complètement de ce mec !
_ Moi je crois que non, tu ne t'en fous pas.
_ Je ne suis pas jalouse, répète-t-elle avec un ton mal assuré qui me fait penser qu'elle me ment.
Elle se lance alors dans un véritable plaidoyer destiné à me persuader que Théo est un être néfaste dont je dois me tenir éloignée à tout prix.
_ Je suis vraiment inquiète. Théo n'est pas un garçon pour toi. Je t'assure, c'est un coureur de jupon, ça se voit comme le nez au milieu de la figure. Je ne sais pas ce qu'il t'a dit au juste. Peut-être qu'il te fait miroiter le grand amour mais tout ça ce n'est que du vent. Tu lui plais sûrement, je ne le conteste pas. Sinon il ne chercherait pas à passer autant de temps avec toi. Mais il n'est pas question d'amour. Vic', tu dois comprendre que les garçons de notre âge n'aiment pas. Ils désirent, c'est tout. Ils s'amusent. Théo est comme les autres, il s'amuse. Il n'a pas de sentiments pour toi, mets-toi ça dans le crâne ! Et le problème c'est que toi tu as des sentiments pour lui, ça aussi c'est évident. Dans ces conditions, tu vas morfler c'est sûr. Quand il va se lasser de ta compagnie, il va te laisser tomber et tu vas ramasser. Tu es ma sœur, je ne veux pas que tu souffres à cause d'un mec qui n'en vaut pas la peine. Je ne veux pas qu'il te brise le coeur, c'est pour ça que je te dis qu'il faut que tu arrêtes de le voir.
Il faut avouer que c'est un beau discours. Un discours émouvant qui ressemble à s'y méprendre à celui que m'a déjà fait ma mère. A première vue, on pourrait croire que Julie est sincère, qu'elle s'en fait réellement à l'idée que sa pauvre sœur soit tombée sous le charme d'un mauvais garçon. Mais je ne suis pas dupe. Elle se moque pas mal de moi. Tout ce qui l'intéresse, c'est de me décourager de sortir avec Théo parce que son ego ne supporterait pas de me voir main dans la main avec le mec qui l'a repoussée.
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Juste une fille bien
RomantizmVictoire habite avec ses parents et sa soeur sur les rives du lac d'Annecy. Plutôt solitaire, elle n'a pas vraiment d'amis au lycée. Quant aux garçons, ils ne la remarquent pas ce qui lui convient très bien car dans sa situation pas question de s'at...