Chapitre 21 (Victoire)

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Je salue sobrement Théo et me dépêche de rejoindre ma mère dans la voiture. Au moment de prendre place à ses côtés sur le siège passager, mon appréhension franchit un cap supplémentaire. Je jette un oeil sur son visage et je lui trouve un air renfrogné qui ne me dit rien qui vaille. Ma mère est d'une humeur orageuse. Je vais avoir droit à un sermon, ça ne fait aucun doute. Dans l'espoir de l'apaiser quelque peu, je bredouille :

_ Je suis désolée de t'avoir fait attendre. Je pensais que tu n'étais pas encore arrivée.

Ma mère ignore mes excuses. Tandis que nous prenons la route, elle me demande plutôt :

_ Qui est ce garçon ?

Je suppose qu'elle veut connaître son nom alors je le lui dis. Mais sa curiosité est loin d'être satisfaite, elle veut en savoir plus. De la même manière que le ferait un flic qui interroge un suspect, elle me questionne encore :

_ Et ce Théo Cari, il représente quoi pour toi ?

Ce qu'il représente pour moi ? Je suis bien embêtée de savoir comment qualifier ma relation avec Théo. Je ne peux quand même pas dire à ma mère que j'éprouve pour lui de l'attirance et qu'il m'arrive même, je suis bien forcée de l'admettre, de le désirer. Ma mère risquerait de tomber en syncope et on pourrait avoir un accident. Je vais plutôt lui raconter que nous sommes de simples amis, ce qui n'a rien d'un mensonge car techniquement c'est ce que nous sommes, du moins pour l'instant. Non pas que plus tard nous serons plus que ça, qu'on ne me fasse pas dire ce que je n'ai pas dit, mais simplement que je n'exclus pas que notre relation évolue et que l'on devienne quelque chose d'autre que de simples amis. Des amis, oui je vais lui dire que nous sommes des amis, ça c'est très bien.

C'est ce que je fais, je le dis à ma mère. D'abord, elle ne réagit pas. Et puis au bout de plusieurs secondes d'un silence insoutenable, elle me lance aussi sèchement qu'elle le peut :

_ Je ne veux plus jamais te voir fréquenter ce Théo Cari. Jamais, tu m'entends ?

Je l'entends malheureusement. Une nouvelle interdiction qui s'ajoute à une liste déjà bien trop longue. Ma mère retombe dans ses travers, elle me surprotège encore et toujours. Je n'en peux plus qu'elle agisse ainsi, je ne supporte plus qu'elle régisse ainsi ma vie. Notre dispute de l'autre jour n'aura donc servi à rien. Elle ne s'est pas du tout remise en question. Elle n'a rien compris ou plutôt elle n'a rien écouté de ce que je lui ai dit. Il est hors de question que j'arrête de voir Théo au seul prétexte qu'elle s'y oppose. Je le lui signife.

_ Je n'arrêterai pas de le fréquenter.

_ Pas la peine de discuter. Tu feras ce que je te demande, un point c'est tout.

_ Non, je ne laisserai pas tes foutues angoisses me priver du seul ami que j'ai au lycée.

_ Il n'est pas question d'angoisses.

_ Bien sûr que si. Tu as peur qu'il y ait plus que de l'amitié entre nous.

_ Parce que c'est le cas ? relève-t-elle à brûle-pourpoint.

J'éprouve un vif agacement de l'entendre me redemander ça.

_ Je t'ai dit que nous étions de simples amis. Mais si tu insistes autant c'est bien que j'ai raison. Ça confirme ce que je pensais. Tu as peur que l'on soit plus que ça, tu as peur qu'il fourre sa langue dans ma bouche et qu'il me file une infection. Hein maman que c'est ça qui t'angoisse ? je m'écrie d'une manière provocante. 

_ Tu dis n'importe quoi ! Tu délires complètement !

_ Et en plus c'est moi qui délire ! je m'écrie en levant des yeux exaspérés au ciel (ou plus exactement au toit de la voiture dans le cas précis).

Juste une fille bien Où les histoires vivent. Découvrez maintenant