Chapitre 32 (Théo)

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Le dîner chez les parents de Victoire s'est très bien passé. Je m'attendais à me faire malmener par sa mère mais il n'en a rien été. Elle s'est montrée tout à fait aimable avec moi. J'ai même eu droit à des compliments de sa part sur ma prestation lors du concert du lycée, c'est dire ! De son côté, Julie n'a pas fait de remarques désobligeantes même si son humeur maussade ne faisait aucun doute sur le fait que ma présence l'incommodait. Quant à son père, je l'ai trouvé très sympathique à tel point que j'ai eu le sentiment qu'il me traitait comme un ami. En fait, la soirée aurait été parfaite s'il n'y avait pas eu cet étrange moment d'embarras.

La soirée touchait à sa fin. Victoire m'a raccompagné jusqu'au portail devant chez elle. Nous partagions une dernière étreinte quand soudain elle s'est arrachée à mes bras. Je m'en suis trouvé bouleversé et je me suis empressé de lui demander si tout allait bien. Elle m'a assuré que oui, elle a feint qu'il n'y avait pas de malaise entre nous. Mais son attitude fuyante, son regard préoccupé et son visage livide m'ont fait comprendre qu'elle me mentait. J'en aurais mis ma main à couper, quelque chose clochait. Quoi, je ne sais pas mais quelque chose. Ce soir-là je suis parti inquiet, le cœur lourd d'un mauvais pressentiment.

Le lendemain du dîner, j'ai éprouvé le besoin de voir Victoire pour que nous puissions parler de la manière étrange dont s'est terminée la soirée chez ses parents. Je lui ai proposé que nous nous retrouvions dans l'après-midi en ville mais elle a décliné l'invitation. Elle m'a expliqué qu'elle passait le week-end en famille et qu'elle n'était pas disponible. Si je me suis étonné qu'elle ne m'ait pas parlé plus tôt de ses projets du week-end, je n'ai pas mis en doute sa parole. J'ai pris mon mal en patience pendant deux jours et c'est avec un empressement particulier de la retrouver que je me suis levé le lundi venu.

Je me suis rendu au carrefour de notre rencontre et je l'y ai attendue pour que nous fassions le chemin du lycée ensemble. J'ai attendu longtemps, guettant sans cesse son arrivée au coin de la rue. En vain. Elle n'est jamais apparue. J'ai passé la journée à tenter de la contacter. SMS, appels, messages vocaux. Toutes mes tentatives de la joindre sont restées lettre morte. Le soir, je suis allé à l'entraînement où je me suis attiré les foudres de mes entraîneurs qui ont trouvé ma prestation catastrophique. Ils m'ont accusé d'avoir la tête ailleurs. Ils avaient raison. J'avais la tête ailleurs. Mes pensées allaient à Victoire plutôt qu'à la boxe. En fait, je ne pouvais pas faire autrement que de penser à Victoire.

Quand la séance s'est terminée, j'ai couru aux vestiaires et me suis rué sur mon téléphone. J'ai poussé un profond soupir de soulagement en constatant que Victoire m'avait enfin répondu. Un simple SMS dans lequel elle s'excusait de son silence et m'expliquait avoir pris un coup de froid qui l'obligeait à rester au lit. Je m'en suis voulu de l'avoir harcelée de messages toute la journée et d'avoir perturbé son rétablissement. Je me suis promis de ne pas la déranger jusqu'à son retour en classe. Un retour en classe qui n'était pas pour tout de suite.

Les jours passaient et Victoire était toujours absente du lycée. Elle avait beau m'envoyer régulièrement des messages pour me dire que tout allait bien, je ne pouvais m'empêcher de m'inquiéter pour elle. Je songeais qu'il fallait que ce soit vraiment un très mauvais coup de froid pour qu'il la maintienne alitée plus d'une semaine. C'était étrange, de nouveau j'avais l'impression que quelque chose clochait. Mais je ne savais toujours pas quoi.

Victoire est finalement réapparue le lundi suivant. Elle m'a rejoint au carrefour, s'est jetée dans mes bras, et m'a embrassé longuement.

_ Tu m'as manqué, m'a-t-elle soufflée à l'oreille.

_ Toi aussi tu m'as manqué. Je m'en suis fait pour toi, tu sais ?

_ Je sais. C'est très mignon de ta part mais tu t'en es fait pour rien. Tu vois, je vais très bien.

Juste une fille bien Où les histoires vivent. Découvrez maintenant