Surnaturelle, tome 1: SAVOIR

Chap 28 : Comment continuer ses recherches ?

Mes yeux avaient beau passer d'une ligne à l'autre, mon cerveau refusait de traduire ce qu'il voyait. Il était trop occupé à chasser les souvenirs qui m'avaient empêché de dormir la veille au soir et qui continuaient à hanter mon esprit sans relâche depuis. Je soupirais avant de lâcher une main de mon livre pour la porter à mon cou, à l'endroit exact où s'étendait ma carotide. La marque avait beau ne plus se voir, j'arrivais toujours malgré les années à déceler les petites irrégularités qu'elle avait laissé. Un nouveau petit picotement me traversa et je retins une grimace. Pourquoi de tous mes souvenirs, c'étaient ceux de cette nuit-là très exactement qui étaient remontés ? Les images défilèrent de nouveau dans mon esprit et je secouais la tête. Va-t'en, va-t'en, va-t'en. Cela faisait bien un an que je n'avais pas repensé à cet événement. Moi qui pensais avoir réussi à le laisser derrière moi, j'avais été bien naïve.

- Ça va ?

Je levais la tête en direction de Casey. Un ouvrage dans une main et un stylo dans l'autre, elle me regardait avec un brin d'inquiétude qui me surpris momentanément avant que je ne me rappelle que je devais être assez transparente. Même Angeline m'avait posé la question en privée quand elle m'avait suivi dans les toilettes ce midi. J'espérais juste que l'indice qui lui avait mis la puce à l'oreille, c'était seulement mes cernes de panda. Parce que sinon je ne voyais pas comment j'allais pouvoir jouer mon rôle de tueuse tout juste initiée de manière convenable pour les jours à venir. Et c'était sans parler des autres races surnaturelles qui risquaient de prendre mon état comme un feu vert pour venir eux aussi me chercher des noises.

- Tu sembles... différente de d'habitude, reprit-elle en pesant bien chacun de ses mots comme si elle voulait être sûre de ne pas me blesser.

Depuis plusieurs jours, je passais tous mes après-midis avec Casey à la bibliothèque. Ça me permettait de pouvoir gambader librement dans la section maléfices sans avoir de soucis hormis les regards noirs que me lançait Evanora et sa clique. En plus, l'avantage c'était que ça m'occupais pas mal après les cours, sachant que j'expédiais mes devoirs en deux temps trois mouvements à chaque fois. Or je savais très bien que c'était dans les moments où mes souvenirs remontaient que j'avais le plus besoin d'occupation.

- Je n'ai pas très bien dormi, finis-je par avouer.

- Tu veux en parler ?

La première réponse qui me vint à l'esprit, étonnamment, fut oui, mais je le ravalais amèrement. Et pour cause, je ne pouvais tout bonnement pas lui en parler sans mettre en danger ma couverture et sans la mettre surtout, elle, en danger. En y pensant je me rendis compte qu'en fait je n'avais même pas peur qu'elle sache qui j'étais et qu'elle le dise. Non ce qui me faisait peur c'était qu'on la considère comme une complice.

- C'est compliqué, finis-je par répondre.

- La vie est compliquée, répliqua-t-elle en levant les yeux au ciel. Mais on n'a pas le choix. Chacun doit faire avec ses problèmes, avec ses valises.

Ses valises... J'avais l'impression d'en avoir tellement. Comme une chaine de gros boulet attachés à ma jambe et qui m'empêchaient d'avancer sans devoir régulièrement regarder derrière moi. Je me mis à fixer des yeux Casey. Je me demandais quel genre de problèmes et de valises, elle, elle avait pour prendre un ton aussi résigné et lasse. Moi qui me disais que la vie d'adolescente surnaturelle banale devait être facile, je commençais à avoir de plus en plus de doute sur la véracité de ma croyance. Mes dernières semaines à Saint-Maxime me l'avait bien montré, même en étant une simple étudiante j'avais une tonne de petits problèmes.

- Viens je vais te montrer un truc. T'inquiètes ça ne sera pas long.

Casey se leva de sa chaise et me fit signe de la suivre dans le labyrinthe de rayons de la bibliothèque. Je lui emboitais le pas sans me poser la moindre question.