Surnaturelle, tome 1: SAVOIR

Chap 4 : Comment se faire menacer dès son premier jour ?

Pour mon plus grand bonheur, je n'eus même pas à entrer dans la salle de classe. Hector ouvrit juste la porte et appela de sa voix bourrue une certaine Angeline qui apparut quelques secondes plus tard à ses côtés. Comme toutes les personnes que j'avais rencontrées jusqu'à là, elle me jugea longuement du regard pendant qu'Hector lui murmurait quelque chose à l'oreille, le dos tourné, m'empêchant de lire sur ses lèvres.

Je n'aimais pas trop les messes basses, surtout quand j'en étais l'objet et qu'elles se faisaient juste devant moi. Toutefois, je retins la remarque cynique qui me passa par la tête. Hector ne semblait pas beaucoup m'aimer de base, je n'allais pas en rajouter. Comme me l'avait répété maman la dernière fois qu'on s'était vu, je devais faire profil bas. Ici, pas question de faire léviter des objets par colère malheureusement. Enfin, sauf si j'étais prête à prendre le risque de me faire trucider après en moins de cinq secondes.

Alors que je percevais différentes émotions passer sur le visage de ladite Angeline, j'essayais de deviner ce que Hector Abano devait lui chuchoter. « Même pas sûre qu'elle soit vraiment une surnaturelle, elle ne connait rien à notre monde, fait attention tu risquerais de la perdre dans les escaliers tellement elle n'a aucune condition physique... ». C'était fou comme les tueurs pouvaient se montrer particulièrement sectaires parfois, beaucoup plus que les métamorphes ou même les loups-garous d'ailleurs. Ce qui en était d'autant plus incohérent puisqu'ils n'étaient pour leur part qu'à demi-surnaturel.

Et pour cause, pour qu'un tueur voit le jour, il fallait qu'un seul de ses parents soit surnaturel. Bien entendu, il y avait aussi le cas où les deux parents étaient eux même des tueurs de première génération, mais, à vrai dire, ce n'était pas très courant. Car plus le sang surnaturel était dilué, plus l'enfant ressemblait à un simple être humain. Ainsi, les tueurs ne pouvaient donc pas vraiment compter sur eux même pour garantir la prospérité de leur espèce et c'était exactement pour ça que les autres espèces « pures » se méfiaient d'eux et les mettaient à l'écart. Les sorcières, elle, étaient la seule exception à cette règle qui définissait les tueurs. Et pour cause, même en s'accouplant avec des humains, leurs progénitures étaient considérées comme des êtres surnaturels à part entière. Enfin, à partir du moment où c'étaient des filles élues par la Déesse qui naissaient. Quand une sorcière enfantée un garçon, ce dernier n'avait jamais de pouvoir. Il naissait être humain tout simplement. La Déesse ne partageait son pouvoir qu'avec les femmes.

Au bout d'un moment, Angeline acquiesça de la tête et tout de suite après Hector Abano se tourna de nouveau vers moi.

- Je suis un homme occupé, vois-tu, et j'ai d'autres choses à faire que de m'occuper d'une gamine de ton genre, s'exclama-t-il dans un rictus mauvais. Angeline va s'occuper de toi. Petit conseil, arrange-toi pour que je n'entende personne me parler de toi de sitôt. Je ne suis pas quelqu'un de très patient, ni de très compréhensif.

D'un pas lourd, il s'éloigna, me laissant ainsi en tête-à-tête avec ladite Angeline dans le couloir toujours désert.

Bien que je n'avais jamais caressé l'idée de me faire des amis à Saint Maxime, je sus immédiatement avec certitude, dès les premières secondes de notre face à face, que nous étions toutes deux beaucoup trop différentes pour ne pas être et rester, au fils des jours à venir, autre chose que de simples collègues de classe. Elle n'avait pourtant encore rien fait, elle ne m'avait rien dit. Néanmoins, je ne pouvais lutter contre le sentiment d'exaspération qui me gagnait déjà à la vue d'Angeline. Sa seule manière de me faire face, la tête haute et la taille plus cambré que nécessaire, m'exécrait. Tout comme le regard méprisant qu'elle me gratifiait. Tous les tueurs étaient-ils comme monsieur Abano et elle ? Allaient-ils tous me prendre de haut de manière aussi ouverte et évidente ?