Chap 33 : Comment traquer une sorcière ?

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Je rejoignis la lisière de la forêt, le corps vidé de toutes émotions. J'avais beau me remémorer notre discussion, des dizaines et des dizaines de fois, je ne comprenais rien. Comment ma mère avait-elle pu autant changer en moins de deux mois ? Abandonner tous ces principes ? Se laisser influencer par cette mentalité fanfaronne qu'elle exécrait tant ? Tout ça n'avait aucun sens, j'en étais parfaitement consciente. Mais le fait que ma mère me mente n'en avait pas non plus d'avantages. A vrai dire, elle ne l'avait même jamais fait à ma connaissance. Quand une de mes questions la dérangeait généralement, elle se contentait soit de donner une réponse très évasive soit de ne pas me répondre du tout. Or là, j'avais eu une réponse... Je donnais un coup de pied dans un petit caillou perdu au milieu des feuilles mortes en repensant à Victoria. Si j'avais pris le risque de contacter ma mère, c'était d'un côté pour elle. De ce que j'avais compris cela faisait environ un mois et demi qu'elle se faisait lyncher par les sorcières de Saint-Maxime dont plus particulièrement Evanora et Candice. Et ce n'était pas prêt de s'arrêter avant qu'un accident finisse enfin par calmer ces idiotes. Le problème, c'était les conséquences que pouvait avoir ce dernier sur Victoria, les étudiants de Saint-Maxime et surtout sur les bourreaux même. Les cercles de peur tiraient quand même leur origine du grand génocide des sorcières aux 11ème siècle. Elles les avaient mis en place afin de se venger des attaques simultanées des loups-garous et des métamorphes. Ils suffisaient d'enfermer ces derniers dedans plus de 12h pour leur faire perdre la tête et les pousser à massacrer les leurs et à se suicider dans les 12h suivantes. Bref, au total 24h pour se débarrasser de meute entière. Ce n'était vraiment pas des sortilèges très tendres. Et si la communauté des sorcières n'interdisait pas l'utilisation de cet enchantement, elle ne l'approuvait pas non plus pour autant. Je me rappelais de ma propre expérience des cercles de peur et frissonnais. J'avais beau avoir déjà fait face à des sortilèges similaires à ce moment-là, les mois qui avaient suivi avaient malgré tout été très compliqué. Que ce soit physiquement ou moralement.

Sur le côté de mon champ de vision une ombre attira mon attention et je m'arrêtais pour l'étudier plus facilement. La démarche de ma mère vint me confirmer ce dont je me doutais déjà, quelque chose clochait dans son attitude. Elle ne semblait pas vraiment énervée, néanmoins je ne pouvais nier qu'elle semblait vraiment préoccupée. Mais par quoi pouvait-elle l'être hormis par ce que Victoria avait subi ? Après tout, c'était la seule chose que je lui avait dit, non ? Personnellement si ce n'était pas pour ça je ne comprenais vraiment pas pourquoi elle avait accepté ce boulot de directrice des Sorcières, vu que visiblement elle n'avait aucune arrière-pensée par rapport à Saint-Maxime. En effet, elle n'avait plus aucune empathie pour personne et elle détestait ses étudiantes. Je l'avais bien vite remarqué quand elle m'avait briffé sur l'école. D'après elle, les sorcières de l'établissement étaient « une offense à notre Déesse de par leur absence de croyance et de respect envers elle. Mais en plus, il fallait qu'elles soient connes et qu'elles se comportent comme des gamines dont la chose la plus importante dans leur vie étaient la date de leur prochain rdv pour refaire leurs ongles ». Quant à sa sous-directrice, Mary Barlow, c'était une vieille bique qui ne se souciait que des apparences et d'augmenter dans l'échelle sociale des sorcières. Pourquoi Déesse se forçait-elle donc à les supporter ? Ma mère s'enfonça dans le bâtiment des sorcières et je restais quelques secondes de plus cachés dans les fourrés à fixer la porte derrière laquelle elle avait disparu. Ma mère n'avait pas que des défauts, mais là j'avais du mal à voir autre chose que ça. Pour une fois que je lui demandais quelque chose en plus. Mais non, elle les détestait, les méprisait, mais elle refusait de leur dire quoi que ce soit. Alors qu'envers moi, c'était toute autre chose. Elle n'avait aucun problème à me dire ce qu'elle pensait et c'était rarement de manière tendre.

Une aura vint me caresser le bout des doigts et je me retournais par réflexe. C'était elle. J'en étais sûre. Celle de l'enchantement dans le gymnase. Je n'en avais pas parlé à maman car suite à ce qui s'était passé avec Victoria, il était selon moi très probable que j'ai juste interrompu le mauvais tour d'une autre sorcière inconsciente. Et puis comme visiblement ma mère n'avait rien à faire de ces choses-là... Sauf que voilà, moi ce n'était pas mon cas. En moins de deux secondes de réflexion, je me mis à courir vers la source de l'aura le plus vite possible. Mes entrainements du matin avaient beau m'avoir rendu plus endurante, il fallait l'avouer, courir en forêt c'était épuisant surtout quand il fallait faire attention aux racines et branchages de tout genre qui menaçaient de m'égratigner à chaque pas. Pourtant je continuais mon sprinte sans aucune hésitation. J'allais l'attraper et je te le promettais Déesse, elle allait le regretter. Je ne savais pas comment j'allais m'y prendre, mais dans le futur elle y réfléchirait à deux fois cette idiote de cocotte. A mesure que j'avançais dans la forêt, j'avais l'impression qu'elle devenait plus dense comme si elle se recroquevillait sur moi. Jamais je n'avais été aussi loin. Soudain je marchais sur un tapis de feuille et glissais. Heureusement, j'eus le réflexe de mettre les mains devant et se furent elles qui en pâtirent. Quand je les ramenais vers moi, je remarquais un léger filé de sang glisser de ma main droite. Mince, je m'étais plantée quelque chose. J'essuyais rapidement le sang du bout du doigt et levais la tête prête à poursuivre ma course. Sauf que problème, l'aura que je traquais venait de se volatiliser. Elle avait complétement disparu des alentours. Et autre problème, d'autres arrivées en masse, d'autres dont je me serais largement bien passé de par leurs natures lycanthropes. Super, dans quoi je venais de nouveau de me fourrer...

Surnaturelle, tome 1: SAVOIROù les histoires vivent. Découvrez maintenant