Mon plateau en main, je localisais la première place libre et isolée la plus proche de moi et me dépêchais de la prendre. Heureusement, à cette heure-ci, c'était une chose aisée. Et pour cause, je n'avais pas tardé à me rendre compte de tous les avantages que j'avais à prendre mon repas à la dernière minute, tout juste avant que le self ne ferme. Certes j'avais moins de choix quant à la nourriture c'était indéniable, il ne restait que les choses dont personne ne voulait. Comme par exemple, la salade de tomate noyée dans la vinaigrette qui était posée sur mon plateau ou encore le morceau de poulet carbonisé présent dans mon assiette. Toutefois, cela me permettait aussi d'échapper au bruit cacophonique qui régnait dans le réfectoire et, surtout et avant tout, à la cohorte d'étudiants qui s'y donnait rendez-vous dès l'ouverture. Il fallait avouer que supporter l'aura des autres surnaturels n'était pas aussi facile que je le pensais avant mon arrivée ici. En classe, nous étions maximums 30 donc ça pouvait aller, mais à la cantine c'était différent. Il ne me suffisait de penser qu'à mon repas de vendredi soir dernier. Je n'avais même pas réussi à rester plus de 10 minutes assise dans le réfectoire avant de m'enfuir en tout hâte de peur d'exploser face à la force des auras qui m'agressaient me provoquant bouffés de chaleur et nausées. Et ça, c'était sans parler de ma propre magie qui ne voulait qu'une chose : sortir pour me protéger de ses auras agressives. Par ailleurs, comme la majorité des tueurs de mon âge avaient déjà terminé de manger, cela me permettait de continuer à cacher temporairement aux autres races surnaturelles que je m'étais fait exclure du groupe de ma pseudo race. Depuis le dernier cours de De Belloy c'était à peine si ces derniers osaient me regarder et pour l'instant, ça m'allait très bien comme ça. Au moins, j'avais momentanément la paix.
Je me laissais lourdement tombé sur ma chaise et réprimais une grimace. Dire que je pensais avoir déjà affronté le pire vendredi. Quelle blague oui ! Malgré le temps qui était passé depuis mon arrivée, j'avais toujours d'horribles courbatures. Et les 15 tours de pistes de ce matin n'avaient aidé en rien à mon état de douleur et de fatigue. Pourquoi avais-je autant l'impression que la douleur ne faisait que s'accumuler dans mon corps ces derniers jours ? La réponse était simple, visiblement cette dernière ne semblait pas presser à disparaitre. Par la Déesse comment allais-je faire ? Même le simple fait de poser mes fesses sur une chaise me faisait mal. Et c'était ce que j'avais dû faire toute la journée sachant que les chaises ici, que ça soit celles dans les salles de cours ou même de la cantine, étaient loin d'être très confortables de base. Je revins à mon assiette dans le but de me changer les idées, en vain. Rien de ce qui s'y trouvait n'avait l'air vraiment appétissant si ce n'était la pomme que j'avais réussie à débusquer sous la pile de bananes noires proposé. J'attrapais ma fourchette et me mis à grignoter ici et là dans mon plateau sans grande conviction. De manière générale, la cantine n'était pas si mal pourtant, mais ce soir j'étais persuadée que le cuisinier en chef devait juste être de très mauvaise humeur. Visiblement quelqu'un avait dû le contrarier. Et pas qu'un peu au vu du goût des haricots verts. J'entendis un bruit et aperçu Casey s'asseoir à quelques sièges à côté de moi. Du coin de l'œil, je la fixai un long moment. Je ne savais pas vraiment comment me comporter avec elle depuis notre soirée « entre filles » comme elle l'avait elle-même appelé. C'était que d'un côté elle ne semblait pas vraiment vouloir que je lui parle devant les autres étudiants et pourtant, paradoxalement, elle m'envoyait des messages en cours et venait me rejoindre, tout en gardant ses distances, pour manger. Casey commença à picorer à son tour dans son assiette comme si de rien n'était. J'étais en train de peser le pour et le contre à me rapprocher d'elle quand un frisson me traversa.
Je tournais la tête de l'autre côté de la pièce juste à temps pour voir ma mère entrer dans le réfectoire. Elle marchait d'un air décidé entre les tables, ses pas résonnant étrangement sinistrement dans le silence qui avait précédé son arrivée. Il fallait avouer qu'avec ses cheveux bruns foncés, ses yeux verts vif et ses traits tirés, ma mère n'avait jamais eu l'air d'un cœur tendre. Elle en était même loin, même si bon, comme tout le monde, elle avait aussi ses bons côtés aussi difficiles à cerner soient-ils. Alors qu'elle avançait vers moi, je remarquais le regard de tous les autres élèves posés sur elle. Ils la détestaient tous et ce, qu'ils soient sorcières ou autres. Ils la connaissaient à peine, pourtant ils avaient déjà tous ce regard froid et calculateur que maman provoquait chez tous les chasseurs de primes qui nous traquaient. Par la Déesse mais qu'avait-elle donc fait jeune pour s'attirer les foudres de toutes les races surnaturelles ? Et parmi tous ces regards de haine, il avait le mien. Le regard d'une fille à sa mère. C'était vraiment étrange de faire comme si je ne la connaissais pas, comme si nous étions des étrangères l'une pour l'autre. Alors qu'au contraire, elle était la seule chose que j'avais sur terre. Elle était la seule personne au monde qui savait que j'existais. Pendant un bref instant nos yeux se croisèrent et imperceptiblement elle me fit un geste de la tête. Par réflexe je me redressais d'un coup. Les choses sérieuses allées enfin commencer.
Je mis ma pomme dans ma poche, finis en une bouché mon plat principal et allais débarrasser mon plateau sans réfléchir une seconde de plus. J'agis vite et sans aucune hésitation. Je savais ce que ma mère attendait de moi et pour que ça soit le plus naturel possible je ne devais pas me poser trop de questions. C'était que je savais bien comment ça marchait ce genre de petite comédie. Arrivais à sa hauteur, je lui rentrais dedans avec une énergie qui me surpris moi-même. J'avais peut-être été un peu trop spontané là. La douleur ne tarda pas à se répandre dans mon épaule encore endoloris de mon dernier combat avec Angeline, mais peu importait. Je n'en pouvais plus d'attendre. En dehors du fait que Saint-Maxime soit une bonne école ou non, je n'y avais tout simplement pas ma place. Evidemment, je l'avais su dès que maman m'en avait parlé. Néanmoins, les derniers événements n'avaient fait que me le confirmer. Plus tôt je mettais les voiles, mieux ça serait. Je reculais de quelques pas et regardais ma mère droit dans les yeux en murmurant des paroles d'excuses.
- Je n'ai pas entendu. Qu'as-tu dit ? me demanda ma mère en élevant la voix.
Elena Wildes n'était pas du genre à sourire. De fait, elle jouait très facilement la femme énervée et moi, celle de la victime apeurée.
- Je suis désolée, dis-je suffisamment fort pour que les spectateurs autour de nous puissent entendre.
A mesure que maman s'était avancé dans la pièce, les étudiants présents étaient petit à petit retournés à leur occupation reprenant notamment leur discussion, mais maintenant le silence était encore plus assourdissant qu'au départ. Ils avaient de nouveau le regard rivé vers maman et surtout vers moi.
- Désolé de quoi ? reprit ma mère.
- De vous être rentré dedans.
Ma mère avança d'un pas en croisant les bras. Je connaissais cette posture parfaitement. C'était celle qui disait « dépêche-toi de dégager avant que je t'impose un entrainement de magie toute la nuit ». Finalement, je me demandais si ma mère faisait vraiment semblant à cet instant-là. Je lui étais peut-être effectivement rentré dedans avec un peu trop d'entrain.
- J'espère bien, dit-elle en prenant soin de bien articuler chaque syllabe.
Je baissais les yeux puis repris mon chemin comme c'était convenu dans le message quand elle m'appela de nouveau. Je me retournais.
- Je peux savoir où tu vas ? reprit-elle.
- Je retourne dans ma chambre.
- Je ne crois pas non. J'ai plein de travail ce soir et comme mon épaule me fait mal maintenant je vais avoir plus que besoin d'un sous-fifre et ce pour pas mal de temps. Tu vois où je veux en venir ?
- Oui madame, répondis-je pressé que cette scène se finisse.
Hey ! J'ai besoin de votre avis. Artémis est très lié à sa mère et lui porte beaucoup d'affection. Par conséquence j'essaye de le montrer de par mes descriptions mais aussi par les mots que j'utilise. Or parfois je trouve que ça infantilise considérablement Artémis. Vous avez le même ressentis ou pas ? Une idée de comment je pourrai résoudre ce "problème" ? Merci d'avance <3 Et bonne lecture !
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Surnaturelle, tome 1: SAVOIR
ParanormalAussi loin que je m'en rappelle, ma mère n'a jamais cessé d'être recherchée par notre communauté, me contraignant ainsi à fuir inlassablement avec elle d'un bout à l'autre de la planète. Car croyez-moi, on ne se débarrasse pas si facilement des sorc...