Chapitre 14 : Le courrier de l'espoir

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Allongée dans mon lit, les minutes défilant sur la petite horloge de notre dortoir, je suis forcée de constater que je ne peux guère détourner les yeux de mon poignet, redevenu clair, loin des marques roses que j'arborais plus tôt dans l'après-midi. Pourtant, lorsque je ferme les yeux, je sens encore la fermeté des doigts de Aro sur ma peau. Ce simple geste éveille mon instinct mais je tente de le faire taire. Il doit y avoir une explication, peut-être un malentendu... Je ne vois pas dans quelle mesure cela aurait pu se passer autrement.

Me suis-je montrée grossière ? Aurais-je manqué d'attention envers lui ?

Je fronce les sourcils, essayant de me rappeler ce qui aurait pu causer ce geste si... étrange.

Il est vrai que je n'ai, à aucun moment, donné suite à de quelconques avances de sa part, et je lui ai même, à plusieurs reprises, rappelé que je ne tenais pas spécialement à voir nos deux familles s'unir. Alors, se pourrait-il qu'il m'ait prise en grippe ?

– Charlotte, que se passe-t-il ? murmure Belinda, en se frottant les yeux, l'air encore endormi.

– Rien, murmuré-je, surprise de voir mon amie réveillée à une heure aussi avancée.

– En es-tu certaine ?

– Je... je réfléchissais au dernier cours de Métamorphose, mens-je.

– Oh... et... pourrais-tu y réfléchir sans lumière ? Si cela ne te dérange pas, bien évidemment.

Sa voix est timide, mal assurée, et je constate que ses yeux noisette sont rivés sur ses draps, ce qui m'affecte à mon tour. De par ses origines moldues, Belinda s'adresse toujours à moi comme si j'étais une sorte de princesse anglaise, et je dois dire que, souvent, je me sens démunie face à sa mine si adoratrice, à la limite du fanatisme lorsqu'elle entend mon nom résonner dans les pièces du château. Pourtant, ça ne nous empêche guère de partager une sincère amitié, qui pourrait être encore plus intense, comme avec Minerva, si Belinda oubliait cette différence entre nos deux familles.

– Rendors-toi, j'éteins, murmuré-je en me retournant pour éteindre les bougies sur ma table de chevet.

Lorsque je me recroqueville sur le côté, je ne peux m'empêcher de jeter un dernier coup d'œil à mon poignet. Je dois me faire un roman sur ce qui s'est passé. Il y a forcément une explication. Forcément...

***

Le lendemain, la date du 1er novembre 1938 annonce la fin des brises d'automne et des couleurs enchanteresses de la Forêt interdite, laissant ainsi la place aux premières pluies, et aux premières tristesses hivernales. Bien que Poudlard n'ait pas encore revêtu son blanc manteau de décembre.

Et moi, je réalise que cela fait soixante jours que je n'ai pas eu de nouvelle de Henry. Mon cœur pleure en silence, et mon esprit s'est fait une raison depuis quelques jours déjà... Je ne devais pas être si exceptionnelle à ses yeux... C'est la seule justification plausible capable d'expliquer ce silence assourdissant.

Silence assourdissant qui semble me coller aux semelles jusqu'à mon arrivée dans la Grande Salle pour prendre mon petit déjeuner, et profiter de cette journée de liberté pour m'enfermer à la bibliothèque et rendre le devoir d'étude des runes en temps et en heures, si je ne veux pas me voir atterrir sur la liste des rattrapages pour les vacances de Noël.

Minerva et Una arrivent peu après moi. Elles discutent de la sortie de pré-au-lard ce samedi-ci, et Victorine ne peut s'empêcher de relater ma petite conversation avec Aro... Je la fusille du regard, mais elle n'en prend pas conscience. Mais à part Una qui se met à rire de manière grossière sous l'œil médusé de son frère aîné, seule Minerva comprend mon trouble. Elle sait qu'entre Aro et moi il y a, peut-être, une question d'avenir... alors elle ne dit rien. Bien loin de Una qui dresse une liste assez exhaustive des défauts de Aro avant qu'elle ne la fasse taire d'un regard. De son célèbre regard noir et sec par-dessus ses lunettes rectangulaires.

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