Chapitre 65 : Par amour

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- Je vous demande pardon ? murmuré-je d'une voix blanche, complètement choquée.

Henry m'adresse alors le plus beau de ses sourires. Un sourire de grand séducteur. Le genre qui doit se faire pardonner une belle bêtise.

- Nous sommes fiancés, Charlotte. Depuis un moment déjà.

Je cligne des yeux. Une fois. Deux fois. Cinq fois. Dix-huit fois. Pendant une longue minute... ou deux... peut-être même trois. Le temps ne paraît avoir aucune emprise sur cet endroit, sur cette bulle qui nous entoure.

Fiancés ? Mais... comment est-ce possible ? Je ne comprends pas. J'ai les oreilles qui continuent à siffler et un nouveau vertige s'empare de moi. Ma langue est pâteuse, mes jambes sont lourdes et j'ai l'impression que tout mon sang est venu s'agglutiner dans ma tête.

- Qu'avez-vous... dit ? murmuré-je, les yeux toujours aussi écarquillés.

J'ai des frissons partout, mal à la nuque. Comme si j'allais tomber malade. Mon cœur, lui, s'emballe tellement dans ma poitrine que je crains, à un moment, qu'il ne s'en échappe.

Face à moi, assise à même les genoux, Henry est allongé sur le côté. Prenant appui sur son coude pour me faire face, ses mains jouent nerveusement avec quelques brindilles de foin. Sur son visage, feux sentiments bien distinct paraissent se faire la guerre : la panique et l'amusement. Ses yeux sont inquiets mais sur sa bouche, un petit sourire espiègle persiste.

- Je n'étais pas... censé vous le dire, me répond-t-il à la place, m'adressant un doux regard sous ses longs cils noirs. Pas comme ça, en tout cas. Et certainement pas... maintenant.

Je prends soudain une grande inspiration. Comme si, tout ce temps, j'avais été en apnée. C'est comme une enclume qui disparaît de mes poumons, et de ma tête, alors que je me sens toujours... ankylosée, incapable de bouger. Comme si on m'avait jeté un sort de pétrification. Il se moque de moi, là ? N'est-ce pas ?

- Vous... vous n'étiez pas censé me le dire..., repris-je, d'une voix que j'imaginais blanche mais qui, étrangement, sonnait comme étant bien acide .

Je prends une profonde inspiration tentant vainement de refouler toutes les émotions qui s'envolent dans mon esprit et dans mon corps. J'ai l'impression que tout ce que j'ai tenté de camoufler ces derniers mois remontent à la surface à une vitesse fulgurante.

- Vous n'étiez pas censé me le dire maintenant ? lâché-je, cassante. Et... puis-je demander à mon très cher fiancé, sans l'offenser bien évidemment, quand aurait-il jugé nécessaire de m'informer de ce... détail ?! De ce tout petit et ridicule détail ?!

J'ai envie de l'étriper ! Comment peut-il me dire cela ? J'ai attendu des mois qu'il se déclare et là... cet imbécile le fait en plein milieu de la nuit, l'air de rien, sans bague, sans rien, pas même une fleur, alors que nous sommes vautrées tous les deux dans du foin après avoir goûter à cet interdit qu'est la luxure ?! Finalement « interdit » qui ne l'est pas tant que ça, d'après ce que je comprends...

- Moi qui vous croyez..., repris-je, furieuse. Moi qui me fustigeais toute la sainte journée parce que je me sentais comme une pauvre petite pècheresse alors que vous...

Je suis tellement en colère et dépassé par la situation, que mes phrases ne veulent rien dire ! Oh oui je vais l'étriper !

À présent, je renâcle comme une vielle jument prête à refuser de sauter un obstacle. J'ai les yeux noirs et les poings crispés sur mon kimono en soie, que je garde étroitement serré contre ma poitrine.

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