Chapitre 34 : Conversation indécente

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Beaucoup de dîner sont organisées, ici, au Manoir, et je suis lasse de paraître pour la jeune fille modèle. Je ne vous cache guère que parfois, j'aimerais m'éclipser le temps d'une soirée ou d'une nuit et de faire quelque chose de... de fou. Disparaître et ne plus être l'héritière des Peverell ! Etre juste... moi. Charlotte. Une fille de dix-sept ans. Pensez-vous que cela puisse être possible ? J'en doute... combien de temps faudra-t-il à ma tante pour me retrouver ? Combien de temps me faudra-t-il pour culpabiliser ? Une poignée de secondes... tout au plus !

En faite, je m'ennuie. Je m'ennuie, et vous me manquez. Quand vous reverrez-je ? Je dépéris de vous savoir loin de moi... C.P. »

Je relis une dernière fois ma lettre, puis je la plie en huit avant de la glisser difficilement dans la boite à échange. Mes doigts récupère la clé, coincée dans mon décolleté, puis je la plonge dans la serrure pour faire disparaitre mon message. Mes yeux restent rivés sur la boite à échange. Et quelques minutes plus tard, un nouveau tac résonne entre mes mains.

Cette fois-ci, mon sourire est plus grand mais mes doigts sont toujours tremblants quand je récupère le parchemin.

« Vous êtes au centre de ma vie, Charlotte. N'imaginez rien... vivez-le. Vous êtes celle à qui je pense le soir avant de m'endormir et la première personne que j'ai en tête à mon réveil. Vous êtes au cœur de mon existence, ne doutez pas. Héritière ou non... quand je vous regarde, c'est Charlotte que je vois. Pas Miss Peverell. Alors respirez un bon coup et dites tout cela à votre tante... que pourrait-il bien se passer ? Rien de grave, j'en suis certain. Bien au contraire. Nous ne serions plus obligés de nous cacher... Mais ne faites rien d'irréfléchis. Je ne veux pas vous savoir au dehors du Manoir.

J'ai ouïe dire que les soirées Mondaines organisées par votre tante sont... intéressantes. Vous a-t-elle trouvé chaussure à votre pied ? H.P. »

Ma mâchoire se décroche le temps de quelques secondes lorsque mon cerveau décrypte le sous-entendu de sa dernière phrase. Rapidement, je rédige une nouvelle réponse.

« J'ai surtout eu l'impression de visiter un rayonnage de chaussures de locations. Ballerine, mocassins, bottines... tout un tas de souliers à ma disposition, mais je vous rassure, aucune ne me sied guère. Je suis tombé amoureuse d'un modèle unique. Une paire de botte en cuire, rigide mais très élégante, aux talons vertigineux... j'ai l'impression qu'a force de marcher avec, je risque quelques blessures, mais elles ont un excellent maintient. Et leur couleur... un rouge éclatant... Elles sont magnifiques, quoiqu'un peu trop classique... Peut-être devrais-je les retravailler pour les assouplir... Qu'en pensez-vous ? C.P.»

Je ris à ma propre plaisanterie, et cette fois-ci, je ne me relis pas. J'enfonce directement le bout de parchemin dans la boite à échange. La réponse arrive plus rapidement que je ne l'espère.

« Où avez-vous trouvé un pareil modèle ? Effectivement elles m'ont l'air unique... Je vous imaginais plus avec des escarpins vernis, qu'une paire de botte rigide, bien qu'elles soient élégantes. H.P. »

Je lève les yeux au ciel.

« Les escarpins sont passés de mode... Les bottes, elles, resteront indémodables. J'en suis persuadée... Mais pour le moment, elles ont disparu de mon champ de vision... Les auriez-vous vue ? C.P. »

Un « Tac » plus tard, j'explose de rire dans ma chambre avant de me ressaisir, le rouge aux joues.

« Fût un temps, elles se trouvaient dans votre placard derrière la porte... sans doute coincé entre vos culottes en dentelles, et vos bustier en soie. Idéalement pas le genre d'endroit pour ranger une paire de bottes...à moins que le dressing des femmes regorge de mystères. H.P. »

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