Chapitre 15: Le mariage d'Elisabeth Rowle

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À peine arrivée au Manoir Rowle pour le mariage de ma cousine, en ce week-end pluvieux de novembre, j'entends déjà la voix ronde et basse de ma mère.

Je ferme les yeux, quelques secondes, et un sourire se dessine sur mes lèvres. Cela fait tellement longtemps que je ne l'ai pas vue. Plusieurs mois, qui me paraissent être des années.

Rapidement, j'enlève mon manteau, mon chapeau et mes gants en cuir, puis je les jette en bas des escaliers, atterrissant malencontreusement sur la tête d'un elfe de maison qui passait par là. Le pauvre... je m'excuse vaguement avant de me hâter vers le petit salon là où la voix de ma mère s'entremêle avec celle de ma tante et de ma cousine.

– Mère ? l'appelé-je en arrivant, me stoppant sur le pas de la porte, le cœur serré.

Là, assise sur le canapé en velours, ma mère me paraît bien plus lasse que je lorsque je l'ai quittée en juillet dernier pour une nouvelle saison à Ste Mangouste. Ses longs cheveux bruns sont coupés au niveau des épaules et leur éclat n'existe plus que dans mes souvenirs d'enfance. Sur son visage, les stigmates exagérés de l'âge apparaissent entre ses sourcils, autour de ses yeux et sur son nez. Comme si ses quarante ans avaient disparu pour ne laisser place qu'à un creusement épais de ses pommettes, jadis hautes et roses. Même sa bouche n'est plus qu'une ligne fine. Seuls ses yeux, aux couleurs de l'anis, restent identiques. Lumineux et arrondis, avec une once de méfiance au fond des pupilles. Le regard des Yaxley... Regard dont je n'ai pas hérité, pour mon plus grand soulagement.

– Charlotte, me dit-elle en se levant difficilement, me tendant la main pour me faire approcher.

Sa longue robe sombre semble être simplement posée sur ses frêles épaules, enserrant sa taille comme jamais je n'ai vu. Elle me paraît tellement maigre...

Timidement, je m'approche de ma mère et je sens ses mains ridées se poser sur mes épaules.

– Vous m'avez manqué, mon enfant, me dit-elle alors que je m'incline devant elle.

Ses yeux me scrutent l'espace de quelques secondes, me mettant mal à l'aise, avant qu'elle ne se tourne vers Elisabeth, pour reprendre leur conversation, là où elles l'avaient laissée.

Je penche la tête vers le sol, toujours aussi blessée de constater son indifférence face à moi, même si je sais qu'elle m'aime. C'est mon père qu'elle voit sans cesse au fond de mon regard, sur mon nez, ma bouche, lorsqu'elle me contemple. Et elle en souffre toujours plus... Je sais qu'à chaque fois que ma mère pose ses yeux sur moi, croisant alors le reflet de mon père, cela la fait dépérir à petit feu. Et même les longs mois de convalescence à Ste Mangouste n'arrivent pas à lui redonner goût à la vie. Je crois que les Médicomages appellent ça une altération de l'état psychique. Les Moldus, eux, appellent ça une dépression... Maniaco-dépression ? Ou troubles psychotiques ?

Je soupire vaguement, et croise le regard compréhensif de ma tante.

– Montez dans votre chambre, Charlotte, et prenez un petit peu de temps pour vous débarbouiller. Le dîner sera servi dans une heure, me murmure ma tante en me raccompagnant dans le couloir.

Je hoche la tête, encore sous le choc de voir ma mère aussi distante, et aussi maladive, et la main de ma tante contre mon dos me ramène à la réalité.

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