13 | Feindre l'ignorance

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Contre ma volonté – sans que je ne comprenne pourquoi – je réalise qu'être blottie dans sa chaleur me manque.

C'était quoi, ça ?

Il me dévisage avec un air que je ne sais interpréter, toutefois je n'ai heureusement pas le temps de m'attarder sur cette aussi improbable qu'inattendue question.

J'ai du travail !

Peut-être mais ce moment a vraiment eu lieu, Sarah, il faudra y faire face d'une manière ou d'une autre.

Peut-être que non.

Merde, tu étais bien là !

Je l'aurais été contre n'importe qui pourvu que ça m'ait permis d'aider cette mère à mettre son bébé au monde, laisse-moi bosser.

Avec Aurélia, nous nous observons, opinant au même instant. Alors je presse doucement l'épaule de notre jeune patiente, lui indiquant d'un geste que nous allons la remonter sur la table afin d'effectuer les soins qui seront nécessaires. Nous glissons chacune un bras sous ses aisselles pendant qu'elle tient son nouveau-né serré contre elle.

— À trois ! annoncé-je. Un. Deux. Trois !

Pendant qu'elle pousse un léger gémissement, nous la soulevons, l'installant le plus doucement et confortablement possible. Elle attrape ma main en commençant à me parler, sauf que bien entendu je ne comprends rien. Face à ma moue perplexe, elle sourit avec reconnaissance donc j'en fais autant et se faisant, nous comprenons l'essentiel de ce que nous voudrions exprimer.

Merci. Tu m'as aidée toi aussi, même si tu n'en sais rien. Grâce à vous, je sais que je suis capable de travailler.

***

Deux grosses heures plus tard, je franchis la porte de l'infirmerie en passant mon bras sur mon front dans une grimace douloureuse, éblouie par l'intensité du soleil. L'accouchement s'est bien terminé, la première mise au sein s'est admirablement déroulée, donc la jeune maman vient déjà de repartir, accompagnée par sa famille. Un instant je pense aux conditions de vie ici, mon estomac se tordant pour tous ces gens courageux. Un long soupir m'échappe tandis que je me rappelle le mécontentement de certains au Kensington Wing. Dans mon dos, Aurélia laisse entendre un souffle épuisé.

— Tu devrais aller dormir, lui proposé-je avec compréhension. Je vais me charger de nettoyer et remettre de l'ordre ici.

Elle m'adresse un regard reconnaissant.

— Merci, Sarah. Je ne peux refuser quelques heures de sommeil après cette longue nuit ! On se revoit très bientôt.

J'acquiesce lentement pendant qu'elle s'éloigne, s'étirant allègrement. Cette expression de mon visage partagée avec mon frère étant vraiment revenue, ce cœur s'étant incrusté malgré moi se serre à cette idée.

Cela veut-il dire que j'apprends à vivre sans toi, Jacob ? Non. Impossible. Comment supporter cette idée ?! Je préfère être triste pour toujours !

Brice surgit à mes côtés – m'arrachant à mes douloureuses pensées dans un sursaut – au moment où je m'apprête à rentrer pour faire le ménage.

— Tu veux rire, Sarah ?! s'exclame-t-il avec une sévérité que je découvre. Prends une pause, je vais ranger tout ça !

— Faisons-le ensemble, suggéré-je, secouant la tête afin de refuser son offre.

Il fronce les sourcils, visiblement insatisfait par cette réponse.

— Tu vas devoir apprendre à te ménager si tu veux tenir ici sur la durée en faisant du bon travail, tu sais.

Soyons d'accordOù les histoires vivent. Découvrez maintenant