Chapitre 28

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 Fenyx, quant à lui, n'a pris qu'un café qu'il sirote lentement en observant le garçon. Celui-ci se souvient alors de ce qu'il voulait dire tout à l'heure.

- C'était toi, hein...

Le jeune homme pose son café et le regarde sans comprendre.

- Moi quoi ?

- Toi qui as donné de l'argent au SDF dans le tunnel...

Fenyx semble encore un moment perplexe puis comprend tout à coup.

- Ah ça ! s'exclame-t-il. Oui en effet, mais je ne savais pas que tu étais là.

- Il faisait sombre... moi non plus je ne t'avais pas reconnu...

Gabriel termine ses œufs brouillés et se met à siroter son chocolat chaud, songeur. Personne n'a jamais fait attention à ce SDF à part Gabriel qui lui donne de temps en temps un bout de pain. Et cet homme débarque et lui donne sans réfléchir une grosse somme d'argent...

- Qui es-tu ? demande soudain le jeune adolescent.

Fenyx termine son café, repose la tasse vide et essuie les coins de sa bouche avec sa serviette. Il place ensuite nonchalamment son menton sur ses mains jointes et ses lèvres s'étirent en une moue indéchiffrable, mais il reste silencieux. Enfin, il murmure :

- Tu le sauras tôt ou tard...

Gabriel est curieux, mais n'insiste pas. Il a lui-même horreur des questions. Soudain, Fenyx lui fait signe discrètement de se rapprocher. Très intrigué par l'air malicieux sur la figure du jeune homme, Gabriel se penche par-dessus la table et tend l'oreille.

- On va s'enfuir, murmure alors Fenyx.

- Hein ? Sans payer ?

Le jeune homme lui dit de se taire et de reprendre une posture normale. Gabriel est inquiet, son nouvel ami a-t-il perdu la tête ? L'adolescent n'a même pas le temps de réfléchir que Fenyx repousse soudainement sa chaise et se dirige à toute allure vers la sortie du restaurant. Gabriel court à sa suite, après une hésitation, sous les regards effrayés et outrés des autres clients et les cris des serveurs.

Les garçons ne s'arrêtent pas de courir et ne se retournent pas. Ils foncent dans les rues, traversent des ruelles et s'arrêtent enfin, à bout de souffle, derrière une grande benne à ordure entre deux immeubles.

Gabriel s'affale à terre, épuisé, riant et haletant en même temps. Fenyx reste debout, plus athlétique que l'adolescent, il est à peine fatigué.

- Mais qu'est-ce qu'on a fait ? s'exclame Gabriel une fois qu'il a repris son souffle.

- On s'adonne au vice bien-sûr !

L'adolescent ne comprend rien à ce type. Il est apparemment très riche puisqu'il se permet d'offrir une grosse somme d'argent à un SDF et de se payer une montgolfière.

« C'est sûrement un dealer de drogue... songe le garçon. »

Et pourtant, il préfère partir d'un restaurant comme un voleur !

- Pourquoi ? demande Gabriel.

- Tu ne t'es pas amusé ?

Décontenancé par la question, le garçon réfléchit un moment.

- Si, beaucoup !

Fenyx sourit.

- Moi aussi. J'ai surtout apprécié voir la tronche de ces gros bourgeois friqués en panique.

Gabriel éclate de rire, se lève péniblement du sol dur et prend appui sur la benne.

- Tu fais souvent ce genre de choses ? s'enquiert-il.

- C'est la première fois, répond Fenyx. Et j'avoue que ça fait un bien fou.

L'adolescent s'étire et se redresse complètement.

- Comment ça se fait que personne ne nous ait poursuivis ?

- Dans cette ville, les délinquances sont out, personne n'est préparé à arrêter des voleurs, pas même la police.

- On est en train de bousiller leur système alors ?

- C'est l'idée, Gabriel.

L'adolescent le dévisage, de plus en plus intrigué. Qu'est-ce qu'il mijote donc celui-là ? Est-ce que ça a quelque chose à voir avec son discours dans le bar ?

- Qu'est-ce qu'on fait maintenant ? demande Gabriel.

Fenyx se frotte une barbe inexistante. Un sourire sournois se dessine sur son visage.

Le jeune adolescent, qui commence à le connaître, ne peut s'empêcher de penser :

« Voilà qui n'inspire rien de bon... ».

FenyxOù les histoires vivent. Découvrez maintenant