Chapitre 59 : Folle

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Quelques jours plus tard, alors que je mangeais seule car plus tard que d'habitude, je vis quelqu'un poser son plateau en face du mien. Surprise, je relevai la tête sur Garrick.

- Je croyais que tu ne m'adresserais plus la parole.

- Je t'ai juste dit qu'on était quitte, gamine. C'est pas la même chose.

Il fit signe à son groupe, qui était resté debout un peu plus loin. Ils semblèrent hésiter et se tournèrent vers leur chef, qui me fixait. Il finit par s'installer à côté de Garrick, et les autres s'installèrent autour de moi. Ca me faisait bizarre d'être entourée de vampires, je sentais presque leur froideur à travers leurs vêtements et les miens. Mon instinct de loup me forçait à me tendre, malgré moi.

- Tu n'es pas avec ta meute ? me demanda l'un d'eux, après plusieurs minutes de silence.

- Ce n'est pas ma meute, soupirai-je.

Je remarquai que leur repas était de la nourriture "normale" et d'un grand verre rempli de sang. Je forçai mes yeux à les détourner, et je remarquai que le chef avait surpris mon regard. Je déglutis.

- Alors, quoi de neuf ? m'interrogea Garrick, indifférent.

Je haussai les épaules. Je ne savais pas si je pouvais lui faire confiance ou non, ni si je pouvais vraiment me confier.

- Pas grand chose.

- Tu as l'air d'être en froid avec les chi... Avec ta meute.

Je ne relevai pas.

- Je ne sais même pas ce que je veux. Je ne sais même pas si j'ai envie de rentrer chez moi, avouai-je.

- C'est le même effet pour tout le monde, ironisa l'un des membres.

- Probablement. Mais je n'ai plus d'attache nulle part.

- Alors voyage. Il paraît que la France est un beau pays. 

- Bof, à part la Tour Eiffel et le Louvre, il y a pas grand chose qui vaille le coup.

- Tu as déjà voyagé ? demandai-je, un peu étonnée.

- Bien sûr. Avant ma transformation, j'étais chauffeur de taxi. J'ai grandi là-bas. C'est des coincés.

- Comme partout.

- Ouais, mais la France c'est le pire.

Ils commencèrent à débattre sur le pire pays, et je perdis rapidement le fil. Je surpris un échange de regard entre Garrick et son chef avant qu'ils ne baissent la tête. Je plongeai à mon tour dans mon assiette, et la discussion finit par s'éteindre.

- C'est comment, les frites ? demanda soudain l'un deux, le seul à ne pas avoir parlé jusque là.

Surprise, je me retins de rire en voyant le regard sérieux et timide du jeune homme.

- J'en avais mangé, avant, mais je ne m'en rappelle plus le goût.

- C'est... Gras. Salé.

- Oh.

Il hocha la tête une fois et tomba de nouveau dans son silence.

- Vous avez déjà bu du sang de loup-garou ?

Ma question sembla surprendre les membres. Sam m'avait dit qu'il n'y avait jamais goûté, mais j'aimerais avoir leur avis dessus.

- Tu es folle, gamine. Personne n'en a jamais bu.

- Pourquoi ?

- Enfin, tout le monde sait ! rétorqua l'un d'eux.

- Savoir quoi ?

J'étais perdue. Garrick les calma d'un geste.

- Pas étonnant que la gamine ne sache pas. Il y a deux versions sur le sang des chiens ; soit ça guérit toutes les blessures et ça rend le vampire plus fort... Soit au contraire, c'est un poison qui tue le vampire à petit feu. Personne n'a jamais essayé pour tester cette hypothèse, à part des fous, qu'on a jamais revu par ailleurs.

- Je l'ignorais...

- Tu es humaine. Enfin chi... Loup. Tu ne pouvais pas savoir.

Tu ne pouvais pas savoir... Il y avait tant de choses que je ne savais pas. Comme la vie de Sam ou de mon père auparavant. Comme l'histoire de la Résistance, ou celle de la meute. En réalité, je ne savais rien d'eux. Il était temps. Je devais en savoir plus sur eux, pour peut-être avoir un espoir de m'en sortir.

Je dévisageai les vampires. Ils semblaient... Libres. Heureux. Je compris que c'était ça qui me manquait. La liberté. Le choix. J'en avais assez de rester ici, à me morfondre. J'en avais assez d'ignorer les messages de Davis. J'en avais assez de ne rien faire. Il était temps d'agir. Et je savais exactement quoi faire.

Half werewolf (terminé)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant