[T-A] Chapitre 10

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Je sentais qu'on me poussait dans tous les sens. Plongé dans un sommeil bien trop profond pour n'avoir dormi que quelques heures, je sentais une odeur enveloppante et florale qui me tira du monde des songes. J'ouvris les yeux doucement, et la lumière tamisée du Salon de Thé Komore m'accueillit.
La vue encore floue, je pus apercevoir deux petites têtes au dessus de moi. L'une avait les cheveux blonds et je reconnus directement Aether qui avait dormi à mes côtés. Pourtant, l'autre convive ne me disait rien. Pour autant, sa voix douce, si familière me permit de recouvrer mes esprits.
je vis les yeux cristallins d'Ayaka. Aether se précipita au dehors de la salle, prêt à avertir quelqu'un semblait-il. Alors que je voulais m'étirer et ménager mes membres ankylosés, Ayaka se rua dans mes bras. Une douleur aigüe dans mes bras me crispa et me permit de me réveiller. Je croyais rêver, pourtant la personne qui m'enlaçait était bel et bien celle qui pleurait sur le champ de bataille, pas plus tard que quelques jours auparavant. Je coulais un regard à la porte et me rendis compte qu'Aether avait fermé celle-ci. Ayaka se retira, et je vis des larmes se former dans ses yeux aux couleurs nivales. Je posais ma main sur sa tête tandis qu'elle essayait tant bien que mal de se reprendre.

« J'ai... Tant de choses à te dire... »

Ayaka peinait à trouver ses mots, les mains couvrant son visage. La voir comme ça me fendait mon cœur, bien trop faible pour endurer une telle chose.

« Allons. Tout va bien. Je suis rentré. Lui répondis-je avec un sourire.
-Tu n'aurais surtout pas dû partir. Dit-elle en sanglotant mais en laissant s'échapper quelques rires.
-Je suis désolé. Je n'aurais pas dû t'inquiéter autant. »

Sur ce coup-là, ces paroles venaient du fond de mon cœur. Je ramenais sa tête près de mon torse et serrais le peu de son corps que je pouvais contre moi. Elle stoppa de suite de pleurer et se rendit compte de mon geste. Nous nous étions séparés pas plus que deux jours sans doute, mais pourtant, les circonstances faisaient que j'avais l'impression de la revoir après un cauchemar de six mois. Les blessures à peine cicatrisées causées par le champ de bataille ou par la prison, la peur de mourir en courant sur la Plage de Nazuchi ou de voir mes rêves se briser dans les mains de la Shogun Raiden. Tant de choses avaient fait que je n'aurais jamais pensé pouvoir serrer dans mes bras cette guerrière au cœur pur.

« Thomas... »

Citant mon nom, elle semblait désemparée de l'emprise que j'exerçais sur elle. Je la serrais si fort, comme-ci je ne voulais plus qu'elle me quitte.

« Je suis désolé... »

Ma voix frémit et, la tristesse accumulée par ses idées si sombres qui s'étaient révélées dans le monde de Morphée se déversa dans des spasmes. Ayaka posa sa main froide sur mon torse et me rassura.

« Je suis là. C'est fini. Nous allons mettre un terme à tout ça. »

Alors que j'allais enfin apaiser mes maux, je me raidis. Mes spasmes cessèrent et ma voix retrouva son timbre habituel. Je pris Ayaka par les épaules. Le regard confus, j'attendais des explications. Comment ça « nous allons mettre un terme » ? Ne devaient-ils pas organiser le Festival de l'Eté ?! Elle me sourit alors.

« Thomas, suite à ton arrestation, mon frère et moi avons décidé dans un accord commun d'unir le Clan Kamisato  à la Résistance. Kokomi est déjà au Domaine Kamisato, nous attaquerons très prochainement. Malgré tout, étant donné que tu étais le seul facteur qui ne nous permettait pas d'agir, Aether s'est proposé pour te sortir de là. Il a affirmé que c'était normal de sauver ses amis. »

Elle continua donc son récit dans mes bras. Elle m'expliqua que quand Ayato avait appris pour ma capture mais aussi pour mon geste désespéré pour protéger Ayaka, il avait informé toute la Commission que tant que la famille Kamisato n'était pas au complet, il ne se permettrait jamais de continuer à diriger le Clan. Il déclara donc la guerre au Clan Kujou et au Shogunat. Après un vote, le Clan Kamisato entier se décida de s'unir pour abandonner le Festival de l'Eté et de venir me secourir afin de, par la suite, mettre un terme au Shogunat actuel. Kazuha et Gorou avaient été les premiers à remettre une démission temporaire à Kokomi pour venir me chercher, d'où la venue de la prêtresse au Domaine afin de signer l''alliance entre les deux institutions. Ayaka m'avait aussi expliqué qu'après avoir été embarquée sur le bateau, elle avait fuit plusieurs fois du Camp de la Résistance, prête à faire le chemin jusqu'à la capitale afin de venir me libérer. Mais Kokomi était la première à la repêcher.
Alors que je pensais qu'elle allait agir dans l'ombre en attendant les ordres de son frère, elle était prête à venir me sauver, ce qui me fit du baume au cœur.
Également, elle m'expliqua que Kujou Sara était celle qui avait proposé de remettre mon Œil Divin à la Statue du Dieu Omniprésent à la place de l'exil. Alors que je pensais qu'elle avait signé pour ça afin de me garantir une mort longue et difficile, Ayaka m'expliqua que Kujou Sara avait bataillé pour me faire sortir de la Caserne de son clan. Elle avait également fait en sorte de me donner une cellule où je serai seul et était allée jusqu'à convoquer son père afin de me relâcher. Elle avait plaidé qu'elle m'avait amené ici afin de surveiller de près les agissements de la Commission Yashiro et non pas du fait que j'étais sur le champ de bataille avec la Résistance. Malheureusement, son motif n'avait pas été retenu jusqu'au jour de mon réveil et de mon exécution publique. Elle avait certes échoué dans ma tentative de me libérer, mais elle avait fait beaucoup d'efforts pour quelqu'un qui avait essayé de la tuer quelques heures avant. Je compris alors ses paroles :

« Néanmoins, toi, c'est une autre affaire et je ne compte pas t'aider. Je l'ai suffisamment fait. »

Pourquoi a-t-elle fait tant de choses pour moi ? Je me sentais comme revigorer après tant d'épreuves. Je regardais Ayaka droit dans les yeux et la serrais une dernière fois dans mes bras.

« Merci, pour tout. »

Ayaka se recula et me déposa un baiser timide sur la joue.

« Non, c'est à toi que je dois le plus. Merci. »

Elle se releva. Je la regardais de dos, et me rendis compte de la chance que j'avais. Cette princesse guerrière au cœur si vaillant, mais cette amie si douce et bienveillante m'était si précieuse que je ne m'étais pas rendu compte de ce que je vivais. La vie paisible que je vivais n'était réelle que grâce à elle. Je souris bêtement à la vue de ses magnifiques cheveux bleutés. Elle se tourna légèrement, à peine un demi-tour, et je vis ses joues rosir.

« Thomas. Je peux te faire une confidence ? »

Mon cœur fit un bond. Je me ressaisis et ressentais la même atmosphère et les mêmes sensations que sur le balcon du Tenshukaku, quand nous avions regardé la Lune. J'acquiesçais timidement et attendis qu'elle me dévoile son secret. Elle se tourna vers moi et s'accroupit, afin de discuter tout bas de ce qu'elle avait à me conter.

« Un soir, j'ai fait un rêve. »

Je la regardais. Je voyais son visage devenir de plus en plus cramoisi. Ses yeux pétillaient rien qu'à l'annonce de ce rêve. Ses pupilles se rétractaient à une vitesse folle et ses lèvres tremblaient. Son visage intimidé me donnait envie de la serrer encore plus fort contre moi.

« Je... Je ne m'en souviens pas très bien. Mais, la lumière bleutée donnait une intimité vraiment réaliste. Se lança-t-elle. Dans mon rêve... »

J'eus un pressentiment. Comme-ci mon instinct me hurlait de ressortir ce souvenir que j'avais voulu enfouir le plus loin possible de mon conscient et que je devais l'appliquer à ses paroles, à son rêve.

« Simplement... »

Elle posa sa main sur ma joue et approcha son visage. Alors que les flammes contenues dans mon organisme étaient déjà en effervescence, elles explosèrent dans un feu d'artifice. Crispée, elle colla ses lèvres charnues aux miennes. Son baiser me rappela un doux souvenir. Je l'avais bien compris. Ce souvenir bien réel n'avait semblé qu'être un rêve pour Ayaka. Alors qu'elle se retira, son regard en demandait encore. Pourtant, nous savions tous les deux que si nous continuions alors que nous n'avions pas encore la moindre idée de la relation future que nous voulions tisser, nous perdrons la fraternité et l'amitié forte qui nous unissait. Nos yeux fixant nos lèvres à tous deux, malgré nos rougissements, nous finîmes par détourner le regard, à notre plus grand regret. Pourtant, alors que mon visage me brûlait, je pensais qu'Ayaka s'assiérait simplement. Mais il n'en fut rien. Elle se leva précipitamment, et se dirigeait vers la porte. Me rappelant un souvenir désaggréable de quand elle avait fuit dans la forêt de Chinju. Alors qu'elle partait dans le couloir, elle se tourna une dernière fois vers moi et répliqua, de sa voix douce et embarassée.

« Ce n'était pas un rêve n'est-ce pas ? La sensation que j'en ai gardé était bien trop réelle... » Elle ajouta d'une voix plus lointaine. « Et l'effet est suffisamment familier pour que je n'y ai pas goûté. »

Elle se tourna alors complètement vers moi, fixant le sol.

« J'y goûterais sûrement une prochaine fois. D'ici-là, tu me diras si mon rêve était réel, d'accord ? »

Elle n'attendit pas que je lui réponde avant qu'elle ne claque la porte. Je la voyais encore adossée sur la porte en bois. La précipitation de ses paroles, la sensation de son baiser, et la joie de la revoir me provoqua un rire honnête et profond.
Oui, je l'aimais.
Oui, elle m'aimait.
Mais c'était sans doute trop tôt pour que nous regardions la vérité en face, alors, tâtonnant, nous découvrions petit à petit la vérité du cœur.
Ce qui avait semblé fictif à Ayaka, et ce qui m'avait semblé trop plaisant pour être gardé en mémoire, nous fîmes défaut.
Nous allions sûrement nous confronter un jour comme elle l'avait dit, mais c'était trop tôt.
Nous avions préféré rester comme deux amis s'aimant en cachette, en attendant que l'un de nous se décide à faire face à nos sentiments refoulés.

𝐺𝑒𝑛𝑠ℎ𝑖𝑛 𝐼𝑚𝑝𝑎𝑐𝑡 - Plongée dans Teyvat !Où les histoires vivent. Découvrez maintenant