Clans

Chapitre 31

Un feu de camps est organisé ce soir, le premier depuis la destruction du camps. Je pense que mon père veut resouder le clan. J'observe les villageois s'affairer à le préparer, toujours assise au pied de l'arbre. Je n'ai pas bougé de la journée. 

- Talia ? J'entends m'appeler.

Je vois alors Ela et Edouard face à moi, la main d'Ela tendue vers moi. Je ne les avais même pas vu arriver, perdue dans mes pensées.

- Viens avec nous, dit-elle.

- Non.

- Tu as passé ta journée ici, assise à ne rien faire.

- Tu m'espionnes ?

- Je veille sur toi. Allez, bouge on va écouter l'histoire de ton grand-père. Je trouve qu'on ne la connait pas assez, sourit-elle.

Mon visage reste de marbre. Elle passe un pull bleu sur ma tête et m'aide à l'enfiler. Elle prend mon bras et m'oblige à me lever.

- Allez, fais plaisir à ton grand-père, il s'inquiète pour toi, comme ton père et moi.

Je la suis jusqu'au feu de camp. Nous nous asseyons tous les trois et j'étends mes jambes pour les réchauffer un peu. Nous écoutons mon grand-père parler. Nous buvons un verre, célébrons ces retrouvailles. Pour ma part, j'écoute à peine ce qu'il se dit, je fixe surtout cette herbe grillée, cette terre sèche sur laquelle je suis assise. Une fois l'histoire terminée, Ela et Edouard s'isolent un peu. Je reste assise-là, immobile. J'attends de longues minutes. J'entends l'agitation autour de moi, les gens se lever pour discuter, danser. Papy s'approche de moi. Il me tend sa main.

- Viens chérie, on va discuter. 

Je me lève. Nous nous isolons du groupe et nous asseyons dans l'herbe, dans la forêt.

- Qu'est-ce qu'il se passe ? Me demande-t-il

- Comment ça ?

- Talia, tu es éteinte depuis quelques jours.

- C'est l'incendie, ça m'a... un peu secouée

Il me fixe.

- Non je ne crois pas. Tu es triste à cause de l'absence de ce garçon.

- Quel garçon ?

- Simon.

Je le dévisage, je ne comprends pas comment il peut le connaître.

- Talia, je l'ai vu.

- Ce n'est rien. De toute façon on ne se voit plus.

- C'est stupide. Tu es triste de son absence et lui te surveille en permanence.

- Parfois je sens sa présence mais je crois que j'hallucine.

- Tu n'hallucines pas. Il est bien là.

Je fixe la forêt, le cherchant

- Ça n'a pas d'importance, je dis tristement

- Pourquoi êtes-vous fâché ?

- Ce sont des histoires compliquées.

- Parce qu'il est le prince du royaume ? Me demande-t-il

Je le fixe.

- Papy...

- Chérie, je vous ai surpris plusieurs fois et je l'ai tout de suite reconnu

- Tu n'as rien dit ? Je demande surprise

- Quel est le problème qu'il soit de la royauté ou d'un autre royaume Talia ?

- Je ne sais pas. Ils se sont montrés souvent cruel.

- Il est né là-bas a-t-il choisi d'y vivre ? Non. Cautionne-t-il toutes les décisions de son père ? Je ne sais pas, je ne le connais pas

- Il m'a menti, il m'a trahi.

- L'aurais-tu autant aimé si tu avais su ?

Je ne réponds pas.

- Je n'ai rien dis car il a donné le sourire à ma petite-fille et ça, ça n'a pas de prix.

- Tu n'as pas eu peur ?

- Il prend le risque de venir seul dans un clan où il est haï. C'est plutôt courageux.

J'hausse les épaules

- De toute façon c'est sans importance. Je suis mariée. Ça n'avait aucun sens.

- Si, parce que tu l'aimes

- Non, enfin... on avait une relation particulière.

- Talia, ce que tu ressentais c'était de l'amour, ce que tu ressens maintenant c'est de l'amour. C'est aussi beau que douloureux.

Je relève les yeux vers lui

- On n'a pas d'avenir.

- Je t'ai connu plus combative.

- Je serai bientôt mariée à Malik. Se serait mal vu de voir un autre homme

- Non Talia.

- Papy j'ai signé le contrat de mariage, je soupire, agacée de reparler encore de ce mariage.

- Tu as lu le contrat Talia ?

- Oui, je l'ai lu.

- Non, tu l'as survolé. Demande à Simon de le lire, il saura lire entre les lignes.

- Que veux-tu dire ?

- Tu as le moyen de vivre la vie que tu souhaites.

Je le fixe, ne comprenant pas ce qu'il veut sous-entendre.

- Tu es libre, tu es pétillante Talia, ton père ne voulait pas gâcher ça. Il t'a laissé l'opportunité de choisir.

- Comment ça ? Il y a une faille dans le contrat ?

Il hausse les épaules

- Mais s'il y avait une faille, le père de Malik l'aurait vu, je reprends

- Il l'a vu. Pourquoi crois-tu que Malik tienne autant à être proche de toi ? Parce qu'il sait qu'à tout moment tu peux choisir de tout rompre.

- Mais je dois faire honneur à papa, à notre clan.

- Ton père t'aime plus que tout et sa plus grande fierté sera de te voir heureuse chérie.

Je baisse les yeux et fixe le sol

- Ça ne vaut pas le coût de renoncer pour une histoire qui ne fonctionnera pas

- Tu dis ça parce que tu lui en veux, parce que pour l'instant vous êtes fâché

- On vit dans deux mondes totalement opposés.

- Vos mondes si différents vous ont-ils empêché de vous rencontrer, de vous aimer ?

- Il m'a caché sa véritable identité. Je ne le connais même pas finalement.

- Si tu le connais, il a menti en surface mais à l'intérieur il est le même. La connexion entre vous ne s'est pas créée par hasard

J'hausse les épaules.

- Tu es sûrement la personne avec l'esprit le plus ouvert dans ce clan alors suis ton instinct. Cesse de trop réfléchir.

Je le sers dans mes bras.

- Merci papy.

- Merci à toi Talia, d'être une si belle personne.

Je souris. Nous nous relevons retournons avec les autres. Je ne reste pas longtemps, rentre rapidement chez moi.