L'Ombre d'Alyia - Tome 1

Chapitre 11

Pour cette stupide réception, on m'avait choisi une longue robe noire qui laissait mon dos dénudé. Mes cheveux bruns avaient été lavés, peignés et remontés sur le sommet de mon crâne en un chignon parfait. Mes lèvres avaient été laquées de rouge et mes yeux soulignés de khôl. Même mes ongles avaient eu le droit à une manucure et avaient été vernis de rouge eux aussi. Cela me fit étrange de me voir ainsi. Certes, je n'avais jamais porté de robes aussi belles, mais avant tout ceci, j'avais toujours apprécié de me maquiller, de prendre soin de toutes les parties de mon corps. Avant que je découvre mes pouvoirs et que le monde s'embrase, j'avais le luxe de pouvoir y consacrer du temps. Depuis, les choses avaient changé. Mon apparence n'avait plus autant d'importance, et si un jour l'idée de sortir sans aucun maquillage m'avait paru étrange, maintenant c'était mon quotidien. J'avais certes repris le contrôle sur mon apparence, et je m'étais acceptée telle que j'étais. Mais en vérité, c'est simplement que je n'avais pas plus eu le temps d'y penser.

Voir à nouveau mon visage fardé et maquillé me fit mal. Cela me rendit nostalgique. Je me revis un soir de fête, à me maquiller dans ma chambre avant que toute ma famille ne débarque. Je faillis fondre en larme en revoyant le visage souriant de ma mère lorsque je venais dans sa chambre lui montrer le fruit de mes efforts, je l'entendais presque me chuchoter que j'étais belle. C'était des souvenirs peut-être futiles, mais leur légèreté me manquait. Ma famille me manquait. Et pour la première fois depuis que j'avais découvert mes pouvoirs, ma première vie me manquait. Pour la première fois, j'avais envie de redevenir cette jeune femme, cette étudiante sans pouvoir. À cause de ce don, j'avais tout perdu.

Je ne pourrais jamais oublier ma première vie. Pas alors que mes yeux gris vert étaient ceux de ma mère, que ma chevelure brun foncé était celle de mon père, que mon menton pointu ressemblait à celui de ma grand-mère et que mes sourcils foncés étaient les mêmes que ceux de mon petit frère Luca. Tout dans mon visage me rappelait ma vie d'avant, tout me rappelait à eux.

Je fixais mon reflet longuement. Je ne me souvenais pas d'avoir eu avant cette lueur de dureté dans les yeux. Ni cette allure sûre de moi, presque hautaine. Ça, je l'avais appris bien après. Je l'avais appris des meilleurs.

Avec un gout amer dans la bouche, je me détournai.

N'y pense plus, me répétai-je.

Une femme vint me chercher, et accompagné de deux gardes Vessoryia, on me fit parcourir d'innombrables couloirs jusqu'à un escalier gigantesque qui menait à un grand hall où une foule d'humains et de Vessoryia tout bien habillé discutaient avec animation.

Parfois, j'oubliais que tous ces gens avaient eu une vie avant. Qu'avant d'avoir fait de ce choix de la lâcheté en s'alliant à Vareck, ils avaient été des humains, avec ou sans pouvoirs, peu importait, qu'ils avaient vécu dans un pays appelé France, Allemagne, États-Unis, que certains avaient fait leur étude dans la même université que moi peut être. Qu'ils avaient eu peut-être les mêmes rêves que moi.

J'étais née dans un pays appelé France, qu'on avait oublié en 3 années à peine. J'avais grandi dans une campagne lumineuse entourée de montagne, j'avais commencé mes études à Strasbourg, et ce matin... ce matin j'avais participé à une bataille en plein Paris. Étrange de se dire que le Palais de Justice si précieux à Vareck se trouvait dans cette ville autrefois si touristique et connue dans le monde entier pour d'autres raisons qu'actuellement. À présent, Paris était le symbole du pouvoir de Vareck, mais la ville de lumière ne ressemblait plus à celle d'autrefois, les bâtisseurs Vessoryia avaient rasé tout ce qui faisait d'elle la capitale de la France en deux ans à peine. Quant au bâtiment dans lequel je me trouvais actuellement, je ne savais pas où il se trouvait, mais je le découvrirai très bientôt.