Chapitre 32

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Je serrai mes doigts autour de la tassé de café brulante que m'avait servi mon père. Mes parents nous avaient proposé de quoi nous restaurer. Vivi mangeait sans s'arrêter, Spencer et Jarod picoraient quelques aliments, quant à moi, je ne pouvais rien avaler.

            Nous étions tous assis autour de la table de la cuisine. Même ma sœur était là. Assise au bout de la table en face moi, elle me dévorait du regard. Calme et discrète, comme elle l'avait toujours été.

            Je sentais le regard de chacun des membres de ma famille poser sur moi. Leur amour et leur inquiétude transparaissaient dans chacun de leur geste.

            Ce fut ma mère qui brisa le silence pesant qui s'était installé. Sa voix douce, mais teintée d'une charmante note grave réchauffa aussitôt l'atmosphère :

            -Je me souviens du soir où tu es arrivée, paniquée, et que tu nous as dit que tu savais faire des choses qu'aucun de nous ne pouvait faire (Elle regarda mon père avec un sourire). Je dois bien avouer qu'au début nous n'y avons pas cru. Puis tu nous as montré...

            Ses yeux émeraudes me fixèrent.

            -J'avais toujours su que tu étais exceptionnelle, continua-telle. Cette découverte n'a fait que confirmer ce que j'avais toujours su te concernant.

            Le soir où, désespérée, j'avais décidé de tout révéler à mes parents, avait été un des plus beaux et douloureux de ma vie. Le monde ne connaissait pas alors l'existence des Vessoryias. Mes parents ne savaient pas qu'ils existaient sur Terre des êtres capables de se lier si profondément à la nature qui les entourait qu'ils en devenaient capables de choses exceptionnels pour le commun des mortels. Ce soir-là, le soir où je leur ai révélé mes dons, Cela faisait alors trois ans que je les avais découvert et que je m'entrainais aux côtés de Vareck et des Faucheurs. Trois années passées à leur mentir, à rater des cours pour m'entrainer. Sans en comprendre la raison, ils avaient vu de loin mes notes s'effondrer, mon avenir s'effriter, mon humeur changer. En somme, ils avaient assisté, impuissants, à mon éloignement. Je les avais délaissés, je m'étais désintéressée de ceux que j'avais le plus aimé. Oui, j'avais tous donné à Vareck, je lui avais trop donné.

            -Je suis désolée, soufflai-je. Désolée de vous avoir caché qui j'étais pendant toutes ces années, désolée de vous avoir rayé de ma vie.

            -Tu t'es déjà excusé il y a 3 ans de cela, Alyia, me dit doucement mon père. Tu n'as nul besoin de le refaire.

            -Et pourtant, j'ai récidivé, fis-je en grimaçant. Je ne vous ai pas donné de nouvelles pendants ces trois dernières années.

            Mes parents et mon frère échangèrent des regards chargés de chagrin.

            Mon père prit la main de ma mère dans la sienne.

            -Cela a été dur, Alyia, m'expliqua-t-il. Nous n'allons pas te mentir. Mais nous comprenons, même si nous aurions voulu que tu restes pour que nous t'aidons à gérer la situation.

            -Ce soir-là, Alyia, continua ma mère, tu nous as dit qu'un homme en particulier ainsi que d'autres hommes et femmes t'avaient appris à maitriser tes dons. Que tu leur faisais confiance, mais qu'ils t'ont trahi, que tu as compris que leur but étaient belliqueux, qu'ils avaient pour véritable ambition d'asservir le monde.

Je hochai la tête. Ma mère prit une profonde inspiration et continua sur sa lancée :

-Lorsque Vareck et les Faucheurs ont révélé au monde l'existence des Vessoryias quelques jours après ton départ, et qu'ils ont peu à peu pris le pouvoir, j'ai compris que c'était eux dont tu nous avais parlé (Ses yeux s'embuèrent). Je voyais cet homme partout, à la télévision, dans les journaux, je voyais ses Faucheurs sanguinaires, et je me disais tout le temps « ma pauvre Alyia, c'est d'eux qu'elle se cache, c'est eux qui la traque. Eux qui l'ont entrainé, eux qui l'ont dupé. »

L'Ombre d'Alyia - Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant