Chapitre 58

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Je regardai avec émerveillement la végétation luxuriante qui prospérait autour de moi.

            -Je ne pensais pas qu'il était possible qu'un tel jardin puisse exister si profondément sous terre ...

            Lorsque les membres de la résistance qui m'escortaient à mon arrivée m'avaient informé que le leader des Eryadins, Alrik, souhaitait discuter avec moi en privée, j'avais senti mon souffle se bloquer dans ma poitrine à l'idée de me retrouver seule avec lui, de faire un faux pas, de me trahir. On m'avait alors conduit dans une cavité, j'avais tout de suite senti la chaleur sur mon visage. Lorsqu'on m'avait permis d'ouvrir les yeux, j'avais découvert un jardin, profondément enfoui sous terre. Des globes de lumière d'une chaleur réconfortante flottaient un peu partout, de l'eau coulait le long des parois et venait irriguer la terre.

            Alrik m'y attendait. Vêtu d'une sorte de tunique blanche et grise assez simple, sans armes, il m'avait accueilli d'un signe de tête, le visage calme et serein.

            Nous avions fait quelques pas sans dire quoi que ce soit, jusqu'à ce que je ne puisse garder plus longtemps pour moi ma stupéfaction devant ce lieu.

            Alrik eut un faible sourire.

            -Sans le génie de certains de nos membres spécialisés dans la croissance et le soin aux plantes, rien de tout cela n'existerait. Les Vessoryias peuvent être autant un danger et une bénédiction pour ce monde, finit-il par dire.

            J'imaginais sans mal où il situait Vareck et les Faucheurs sur ce continuum.

            -Et vous ? êtes-vous un danger ou une bénédiction ? osai-je demander.

            J'avais appris une chose essentielle auprès de Vareck et des Faucheurs, avec des êtres puissants, il fallait être direct, ne pas montrer ces peurs, il fallait laisser penser que l'on pouvait être tout autant dangereux. Surtout maintenant que mes pouvoirs étaient bridés. Mais ma question ne parut pas déranger Alrik, qui prit même la peine de réfléchir quelques secondes.

            -Je suppose que je pourrais être les deux. Tout comme vous, d'ailleurs.

            Il baissa ses yeux noisette vers moi. Comme les Faucheurs, ils étaient différents, il émanait d'eux une connaissance et une intelligence anciennes et farouches, mais le regard d'Alrik possédait une chaleur et une douceur que je n'avais jamais vues chez les Faucheurs. Même les autres Eryadins ne m'avaient pas donné cette impression de sérénité profonde.

            -Sans aucun doute, répondis-je. Je pense aussi que tout est une question de point de vue, Vareck est vu comme une bénédiction par certains Vessoryias. Et les Faucheurs le vénèrent presque comme un dieu.

            -Vous ne l'appelez pas par son titre, releva Alrik, plus curieux que suspicieux.

            -Vareck n'est pas mon seigneur, et ne le sera jamais.

            -Ce n'est peut-être qu'un titre hors sol pour vous, mais sachez qu'il a été véritablement seigneur et roi plusieurs fois durant sa longue et maudite existence.

            Cela me surprit d'abord qu'Alrik puisse aussi bien le connaitre, mais il est vrai que les Eryadins vivaient potentiellement depuis bien longtemps eux aussi.

            -Vraiment ?

            Je détestais ma curiosité brûlante en cet instant.

            -En effet. Mais je suppose qu'il ne vous a jamais parlé de son passé ni celui d'aucun Faucheur.

            Mon silence était éloquent.

L'Ombre d'Alyia - Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant