Chapitre 37

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Les flashs des appareils photos crépitent devant le palais de justice. Je n'ai pas choisi de revenir sur le lieu qui a tout changé par hasard. L'histoire doit s'achever là où elle a commencé.

La rumeur a enflé au fil des mois sur l'ouverture d'un nouveau procès et les médias se sont précipité. Il n'est même pas neuf heures du matin que le parvis est déjà noir de monde. Des journalistes, des photographes, des personnes à la curiosité malsaine... Ils sont tous là même ceux qui ne devraient pas l'être.

Cachée sous un sweat à capuche large et noir, je reste à l'écart de la foule. Jusqu'à présent mon plan se déroule comme prévu. Je cherche mon clan des yeux et je finis par repérer difficilement Erin et Gatien, la première se cachant derrière son petit-ami. A côté d'eux, Camille et Léa se soutiennent mutuellement et gardent une expression impassible lorsque les questions s'abattent sur elles. Mes amis peuvent compter sur ma famille, prête à intervenir si besoin.

Soudain, le groupe de journalistes se déplace dans un mouvement uniforme. J'aperçois papa et maman arriver sur le côté. Je ressens une grosse tristesse lorsque je remarque qu'ils sont encore plus maigres que la dernière fois que je les ai vus. Leurs traits sont marqués par l'épuisement physique et mental de ces dernières années mais un filament d'espoir brille dans leurs yeux.

« Laissez-les tranquille ! » hurlent mes oncles en menaçant toutes personnes s'approchant trop près d'eux.

Aucun d'eux ne les écoute ce qui ne fait qu'accroître la colère de ma famille. Après mes parents, les familles légales et biologiques font leur apparition suivies par leur avocat respectif. Madame s'est apprêtée pour l'occasion et je n'ai pas besoin de me torturer l'esprit pour savoir qu'elle anticipe sa victoire. Son tailleur jupe beige laisse entrevoir ses longues et fines jambes jusqu'à ses escarpins noirs vernis. Les caméras se précipitent pour immortaliser la silhouette de cette femme aux allures de mannequin. A sa suite, son époux a revêtu son plus beau costume noir et sa cravate assortie se pose délicatement sur les pressoirs de sa chemise blanche. Puis mes parents biologiques s'avancent comme des stars de cinéma sur le tapis rouge. Ils sont très similaires à Madame et Monsieur dans leurs vêtements d'apparat. Mon frère se tient en retrait et son visage révèle sa rancœur envers son père. Lui aussi est en costume cravate et toutes les femmes présentes ne cessent de crier après lui.

Cette scène décalée et mal venue me fait siffler de haine.

« Je vais bientôt effacer vos sourires de vos visages. » dis-je en tournant la tête vers mes parents qui se battent contre eux-mêmes.

A côté de ma famille du contrat, papa et maman ressemblent à deux fantômes. Il faut l'intervention de mon avocate pour les extirper de la foule en colère. Les insultes pleuvent sur mes parents qui ne comprennent pas pourquoi ils sont revenus en ces lieux. Pour eux, comme pour moi, c'est rouvrir une blessure... Revenir signifie enfoncer un couteau un peu plus loin dans nos cœurs et chaque accusations lancées sans preuve verse du sel sur une plaie à vif.

Il est temps pour moi d'entrer discrètement dans le tribunal. Les vigiles, mis au courant par mon avocate, me laissent passer et me donnent un badge pour que je puisse assister au procès sans être vue. Peu de temps après moi, les grandes portes s'ouvrent et les trois parties entrent les unes derrières les autres. La police, mobilisée pour l'occasion, se met en place pour empêcher les caméras de pénétrer à l'intérieur du bâtiment.

La salle du procès est encore marquée par l'odeur de la souffrance engendrée il y a des années maintenant. Pourtant, le bois semble avoir été taillé et poli hier. J'observe les parties se mettre en place : mes parents à gauche face au président ; Monsieur, Madame et Tan à droite, et mes parents biologiques au centre. Les trois avocats et les jurés prennent leur position à leur tour.

« Non non. Messieurs, dames les jurés du premier procès vous n'êtes pas à la bonne place. »

Ils se regardent les uns les autres dans l'incompréhension la plus totale.

« Vos places sont ici. » dit mon avocate en claquant des doigts vers le banc des accusés.

L'autorité dont elle vient de faire preuve fige instantanément la salle. Mes lèvres se tordent en un petit sourire en coin face aux yeux de hibou de toute la salle, y compris ceux de mon clan. Un air malicieux se glisse sur mon visage : « je l'ai bien choisie ».

Mon avocate, Maître Siopi, est une femme chétive, de taille moyenne affichant peu d'assurance sous son tailleur bien repassé. Ses longs cheveux blonds tombent en cascade sur ses épaules et lui donnent une allure de mannequin. Ses yeux verts glaçants et son sourire angélique mettent en émoi la gente masculine présente. Elle n'a pas encore prononcé une seule parole que la moitié des jurés sont à ses pieds.

Ma satisfaction augmente en flèche en voyant Maître Dolios devenir de plus en plus nerveux. L'avocat semble comprendre qu'il n'est plus le seul à pouvoir jouer avec les armes du charme. Il ne remarque pas que derrière lui, Madame est tout aussi décontenancée mais le dissimule mieux. Monsieur quant à lui doit essuyer discrètement la bave sortant de sa bouche tout comme son fils. Mon choix audacieux de choisir une femme comme avocate pour contre balancer les atouts de Maître Dolios s'est avéré payant. En outre, j'ai toute confiance en elle et en ses capacités professionnelles.

Maître Sarageon a été un bon tuteur de loi mais sans aucun charisme. Je ne lui pardonne pas sa défaite et les conséquences que son incapacité à réagir ont engendré sur ma vie sur ces cinq années. Je ne peux pas oublier et pour rien au monde je ne l'aurais repris pour me défendre.

Les dernières personnes à entrer dans la salle par les grandes portes sont les inconnus du camps ayant craché sur mes parents et contre qui j'ai porté plainte.

Le contratOù les histoires vivent. Découvrez maintenant