À peine allongé, Marie-Morgane arracha la chemise de Cassius, découvrant les plaies purulentes laissées par les crocs de Morbius. Cassius grimaça de douleur, Marie-Morgane de dégoût. Elle plaqua une main sur sa bouche et son nez, observant la plaie avec attention. Une étrange substance violacée suintait de la blessure. L'odeur était si forte que je la sentais depuis l'entrée de la pièce. Le teint un peu verdâtre, Marie-Morgane se retroussa les manches avant de se tourner vers moi.
– Contacte le médecin de bord, commanda-t-elle en se précipitant dans sa salle de bain pour remplir une bassine d'eau clair. Dis-lui que c'est une urgence, poursuivit-elle en se dépêchant de revenir au chevet de Cassius qui se mit à haleter.
Je me précipitai vers le communicateur et portai aussitôt le combiné à mon oreille. J'eus à peine appuyé sur le bouton nommé « Infirmerie » que Cassius hurla. En me retournant, je vis Marie-Morgane appliquer un linge imbibé d'eau sur la plaie. Le demi-dieu serrait si fort les draps dans ses poings que ses phalanges blanchirent. Je me mordis les lèvres. Il était tellement pâle...
Puis on décrocha.
– Infirmerie, j'écoute, entendis-je à l'autre bout du fil.
C'était la première fois que je me servais de ces communicateurs et je devais bien admettre qu'il rendait la voix du docteur Osborne très étrange à mon oreille. Cassius hurla de nouveau, me ramenant à la réalité. D'une voix chevrotante, je transmis le message. Je n'eus pas même de réponse, juste un long sifflement m'informant qu'il avait raccroché. Et alors que je me retournai un peu déboussolée vers Marie-Morgane, des bruits de pas précipités se firent entendre et le docteur Osborne débarqua dans la pièce comme une tornade. Sa mallette sous le bras, il se précipita au chevet de Cassius et prit la relève de Marie-Morgane.
– Plaie ouverte à l'épaule, présence de pue et de chair nécrosée causée par un poison virulent avec forte fièvre et trouble respiratoire, lui indiqua mon amie alors qu'il examinait la blessure du demi-dieu.
– Une morsure ? questionna-t-il en fouillant dans sa mallette. Que s'est-il passé ?
Tous deux se tournèrent vers moi comme un seul homme. Je reniflai, serrant dans mes poings les pans lacérés de ma robe.
– O-On se disputaient sur le pont quand Morbius est apparu. Il m'a précipité dans l'eau et Cassius a tenté de me sauver mais... i-il l'a mordu et...
Les mots se tarirent dans ma gorge. C'était comme si mes cordes vocales se tordaient jusqu'à me rendre douloureusement muette. Je serrai les lèvres. Osborne m'observa longuement avant de reporter un regard sur son patient.
– Ce pauvre idiot, marmonna-t-il dans sa barbe. Quand apprendra-t-il enfin...
Je tremblais, encore sous le choc. Marie-Morgane s'approcha passant une main rassurante sur mon épaule. Je sursautai.
– Viens, il faut te soigner.
– Quoi ?
Mon regard coula alors que mes mains et mes bras et tout mon corps. Ma robe, non contente d'être trempée, était aussi en lambeaux, déchirée par les écailles tranchantes de Morbius. Et sur ma chair, de petites lignes commençaient à rougir, pleurant quelques larmes de sang.
Ce ne fut qu'à cet instant que je réalisai quel triste spectacle je devais offrir. Mes vêtements étaient en piteux état, irrécupérable même. Ma peau couverte de griffures dont je commençais à peine à sentir la brûlure, mes cheveux étaient encore humides, gouttant tristement sur les épaules. J'avais les yeux rougis autant par les larmes que par le sel et cerclés de cernes que j'imaginais facilement aussi foncés que ceux de Cassius.
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De Vague et d'Ecume
FantasyAvec sa famille, Meredith embarque à bord de la Sirène, un ancien galion rénové en navire de croisière pour une traversée de l'océan de Typhon jusqu'aux Terres d'Amore. Mais ce qui devait être de simples vacances en famille vire bientôt au cauchemar...