5. Thalia n'a pas rêvé

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PDV de Thalia dans sa chambre, ville de Gové.

Ce matin, le soleil m'avait réveillée comme à son habitude. Le hic, c'était que j'avais très peu dormi cette nuit. J'avais l'impression d'avoir du coton à la place de la tête, et une capacité de focus limité à trois secondes. Je gémis en roulant sur le ventre, ouvrant les yeux vers la fenêtre d'où gazouillaient les oiseaux. Et pourtant, je ne me voyais pas me rendormir, pas alors que je réalisais que hier n'avait pas été un rêve.

— J'ai vraiment flotter au-dessus de la ville grâce à la magie...

Je poussais un petit cri excité en me roulant dans mon lit. La fatigue me semblait loin tandis que je fermais les yeux pour revoir la vue que m'avait offert ce mystérieux mage. Quelle belle et magnifique nuit de Beltaine, je ne l'oublierais jamais. Comme je ne pouvais pas oublier que le regard mi-inquiet mi-furieux de mon père cette nuit-là. Rentrer en plein milieu de la nuit ne me ressemblait pas, et je comprenais que Papa se soit inquiété. Et pourtant, je m'étais contenté de fuir dans ma chambre, m'y enfermant jusqu'au lendemain. Si Papa avait su que je m'étais fait accosté par un étranger pour me faire raccompagner par un autre... Je n'osais l'imaginer, et je crois qu'il était préférable qu'il n'en sache rien.

J'avais passé une bonne partie de la nuit à rejouer la soirée dans mon esprit, encore et encore. Et encore ce matin, ces merveilleux souvenirs continuaient de m'obséder, telle une mélodie qui refusait de sortir de la tête.

— Mais bon, allons rêvasser en s'occupant des plantes, me sermonnai-je en me redressant pour accomplir ma routine matinale.

D'aussi loin que je me souvenais, j'avais toujours aidé à la boutique de fleurs. J'y passais le plus clair de mon temps, manquant volontairement l'école. De toute façon, les professeurs disaient que j'étais une cause désespérée. Je n'écoutais pas leurs cours, mon esprit ne cessant de se perdre dans mes rêveries et mon imagination. De plus, ce que l'école enseignait ne m'avait jamais intéressé, et je n'arrivais pas à lire un de leur manuel sans m'endormir.

Au contraire de mon frère qui avait su se faire remarquer très vite par son intelligence et sa compassion. Ça faisait bientôt trois ans qu'il était parti étudier la médecine. Il vivait à la Capitale qui se trouvait à plusieurs jours de train, complètement au sud du pays. Quant à ma jumelle, elle avait su trouver une place d'apprenti dans une pâtisserie de notre ville. J'étais heureuse pour eux et leur projet d'avenir qui leur allait comme un gant. Et moi... Je ne savais pas quoi faire de mon avenir.

J'avais abandonné l'école huit ans plus tôt, à la mort de maman. Depuis, je passais la plupart de mes journées à aider à la boutique. Je n'étais pas à mon aise avec les gens, ayant toujours préféré les romans et les fleurs. Enfant, on m'avait vite fait comprendre que je posais trop de questions, que je manquais de tac et de concentration. Peu à peu, j'avais fini par cesser d'aller vers les gens pour m'occuper des fleurs. C'était maman et papa qui m'avaient tout enseigné sur la flore. Au fil des ans, j'avais perfectionné mon savoir sur les plantes entre quelques romans. C'était tout ce que je savais faire, la seule chose dans laquelle j'excellais.

Et puis, il fallait bien quelqu'un pour reprendre notre commerce, non ? J'étais la mieux placée pour remplir ce rôle.

Nous y vendions des fleurs qu'on poussait dans la cour, mais également sur certains toits et balcons. Mon père était un bricoleur qui avait été capable de se créer des serres, devenant la seule boutique à offrir des fleurs à l'année. Par contre, cela demandait beaucoup de travail technique et difficile, surtout pour les vendeuses. Seul mon frère, mon père et moi étions formés pour gérer le fonctionnement des serres. Malheureusement, plus le temps passait, plus je me rendais compte que cette connaissance était une prison qui se refermait sur moi.

L'Éveil de l'Arcane T.1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant