50. Thalia et les fleurs

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Nous étions revenus tard la veille. Le reste de cette journée, je l'avais passé à dériver dans les méandres de mon esprit. Et ce matin, j'étais encore perdue par rapport à l'apparition soudaine de la Sorcière. Quand je repensais à elle, j'étais envahie par un ouragan d'émotions. Trop pour moi, trop pour savoir comment les gérer. Mais je ne voulais pas gâcher ma journée à cause de tout ça. Je ne voulais plus penser à tout ce qui touchait à la magie. Et je savais exactement avec qui me changer les idées : Thosia !

Avec elle, je pouvais rire, m'amuser et être insouciante : comme avant.

Du coup, ce matin-là, j'avais proposé à Lucaï de m'occuper personnellement de la commande de mon amie.

C'était de même que je me retrouvais à flâner dans la ville de Dobrum. Je sentais la brise d'été faire agiter gracilement les pans de ma robe. Mon regard papillonnait ici et là sur les diverses maisonnées du village de Dobrum. Je ne pouvais retenir mon émerveillement devant les lierres qui grimpaient sur les murs, ou encore sur les vieilles clôtures dont le bois s'était éclairci au fil des ans. Le gazouillis des oiseaux se mêlaient au chant des cigales. Je pouvais même voir certains des chanteurs de la nature cachés entre le feuillage des arbres. Les rires d'enfants jouant ensemble me parvint, attirant mon regard sur eux. Ils couraient après un ballon qui passait près de moi. Je me décalais silencieusement pour les voir courir dans la direction opposée d'où j'allais.

Je les enviais, et je n'en étais pas fière. Mais en même temps, j'étais ravie de voir la belle énergie de ces gamins. Ils étaient si beaux à voir.

Poursuivant ma route, je reconnus sans mal la maison de Thosia grâce à son toit recouvert d'un beau mélange de mousse et de fleurs sauvages. Leurs noms me venaient spontanément à l'esprit alors que je laissais mes pieds aller bon où ils leur semblaient : ciboulette, thym, saxifrage et armoise , le tout embelli par un lit de lichen et de sphaigne. Mais en arrivant là-bas, je ne vis personne à l'extérieur. J'étais surprise de ne pas voir mon amie dehors par un temps aussi magnifique. J'aurais parié qu'elle se prélassait dans sa cour, elle qui appréciait particulièrement la chaleur du soleil sur sa peau.

Perplexe, je m'étais approchée de la maison en hélant avec hésitation :

— Thosia ? Où es-tu ?

Un silence me répondit au moment où mes pieds s'arrêtaient devant la porte arrière, comme à mon habitude. Je cognais à la porte, en supposant que la vieille dame faisait la cuisine. J'entendis des pas à travers la porte, ce qui fit accélérer mon cœur de joie. Je me demandais quel nouveau projet lui était venu à l'esprit cette fois-ci. Peut-être essayait-elle une nouvelle recette de biscuit, comme elle m'en avait parlé lors de notre dernière rencontre. Ou alors, elle avait eu une nouvelle idée sur un sujet complètement différent. Cette femme avait beau avoir des arrières petits-enfants, elle respirait la forme et rien ne semblait l'empêcher d'entreprendre toutes sortes de nouveau projet.

La porte s'ouvrit enfin, mais sur le visage de Helari, l'une de ses petites filles. Sa chevelure brune aux reflets cuivrés cascadait sur ses épaules. Elle portait une robe bleue qui mettait ses yeux en valeur. Surprise, je m'exclamais spontanément :

— Oh, bonjour Helari ! Est-ce que Thosia est là ?

Je trouvais Helari étranges. Elle semblait distraite et mélancolique, très loin de sa joie de vie habituelle. Son visage dégageait une impression étrange et confuse de malaise derrière la surprise de me voir. Je me sentis mal d'un coup en voyant sa réaction. Peut-être que je dérangeais une rencontre entre Thosia et sa petite-fille. Je savais qu'elles étaient très proches, vu le nombre d'anecdotes que m'avait conté mon amie au sujet de cette jeune fille d'à peine 16 ans.

L'Éveil de l'Arcane T.1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant