18. La Sorcière rencontre un candidat

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PDV de la Sorcière, dans une ville de la région centrale du royaume de Dendérah.

Il faisait nuit, et encore plus sombre dans cette ruelle sinueuse. Je me trouvais à deux endroits simultanément. Yacuruna se trouvait accroupi sur un toît sombre d'où personne ne le voyait. Yacuruna était un esprit guérisseur et séducteur de l'eau, dont l'apparence était celle d'un crocodile humanoïde séduisant. Ce soir-là, il avait modifié son apparence pour la rendre plus humaine, mais il n'en était rien : c'était un Faesidh.

Il me permettait de percevoir ce qu'il percevait, attendant mon signal. À contrebas se trouvait une ruelle miteuse. Je manipulais l'une de mes marionnettes qui attendait l'arrivée de notre candidat. Ce patin se cachait contre un angle sombre d'un bâtiment, protégé par une imposante cape.

La discrétion était primordiale, mais j'avais bien hâte de conclure. Je savais qu'il allait venir à notre point de rendez-vous.

« Il va venir, il n'a pas le choix », pensai-je en levant les yeux vers le ciel de la ruelle.

« Maîtresse, le voilà », m'avertit Yacuruna.

Je me glissais psychiquement près de l'esprit du Faesidh, pour le constater par moi-même. Je me mis à sourire en voyant au loin une forme bouger au loin. Elle se déplaçait avec nervosité, lançant des regards par-dessus son épaule. On ne pouvait pas voir son visage à cause de la cape, mais j'étais certaine que c'était lui. Suivant les indications que je lui avais donné, il fit trois le tour du pâté de maison avant de s'enfoncer dans la ruelle où je me trouvais.

M'enfonçant plus profondément dans la psyché de la marionnette demeurer dans la ruelle, je vis l'homme encapuchonné venir vers moi.

Son visage faisait peur à voir. Ses yeux d'un brun clair étaient enfoncés dans leurs orbites, mangées par des cernes. Ses cheveux gras d'un brun sombre ne cachaient pas l'hideuse cicatrice qui barrait le front. Et je n'osais pas regarder plus bas : je ne voulais pas voir les loques qui lui servaient d'habit.

Je me redressais, indiquant silencieusement à l'homme de s'approcher. Ce dernier s'approcha avec précipitation, tenant quelque chose entre ses mains. Je souris en reconnaissant le document que je lui avais remis quelques temps plus tôt.

— B-Bonsoir, bégaya l'humain en me regardant avec prudence.

— Vous avez ce que je vous ai demandé ?

— Oui-Oui ! répondit-il en me remettant le document entre ses mains.

Je le saisis entre ses mains tremblements, parcourant la feuille pour vérifier que tout était en ordre. Le dossier était plutôt bien rempli, malgré que ce fut des incompétents qui s'en étaient chargés. Au moins, j'avais toutes les informations dont j'avais minimalement besoin, ainsi que les détails de l'incident.

C'était plutôt bon pour les circonstances.

— Eh bien, mon cher, je crois que notre marché tient toujours. Vous consentez à respecter toutes les clauses du marché ?

Il hocha vigoureusement de la tête. Je lisais la peur, la douleur et le désespoir dans son regard. Je devais lui donner raison : il paraissait si misérable. Je pouvais sentir qu'il n'avait plus pris de douche depuis un moment. Il empestait sa dernière chope de bière. Il semblerait qu'il avait eu besoin de boire pour trouver le courage de me retrouver.

Je le comprenais : faire affaire à un parfait inconnu était à double tranchant. Pauvre de lui, ne savait-il pas que tout choix avait son revers ? Surtout qu'il risquait de changer d'avis en route, regrettant ce choix. Comme bien d'autres avant lui.

Cependant, je n'avais pas le temps pour tergiverser : je devais conclure. Je ne voulais pas lui serrer la main, mais je devais le faire. Réprimant mon dégoût, je lui tendis la main en lui ordonnant :

— Dites-le à voix haute. Dites que vous consentez.

— Je-Je consens, bredouilla l'homme après avoir saisi ma main.

Sa main tremblait beaucoup, mais mon attention était tournée vers mon énergie magique. Je sentis le flux caresser mon bras pour me quitter et s'immiscer jusqu'à son esprit. J'y laissais une empreinte de ma magie avant d'interpeller Yacuruna. Je reculais d'un pas alors que mon compagnon Faesidh se saisit de l'homme. Je me détournais de la scène, mais j'entendis tout. J'entendais les cris étouffés de l'homme et ses gesticulations. Je ne me souciais pas trop : un humain n'avait aucune chance contre une créature merveilleuse.

Quelques instants plus tard, le silence revint dans la ruelle. J'attendis en regardant le ciel. Yacuruna se manifesta peu après, un grand sac sur son épaule. Je le remerciais d'un geste de la tête, auquel le Faesidh me promit :

— Je serais auprès de vous avec le candidat d'ici quelques heures. Reposez-vous bien.

— Réveillez-moi à votre arrivée, répondis-je avant de me déconnecter du patin.

Mes paupières papillonnaient jusqu'à ma vue s'éclaircisse. Je me redressais lentement, retenant un bâillement. J'avais dépensé beaucoup d'énergie pour maintenir le lien sur une aussi grande distance. Or, c'était nécessaire à cause du serment, celui qui maintient mon bannissement malgré moi.

Je sortis du bassin, laissant l'eau perler sur moi.

J'avais enfin conclu cette entente. Maintenant, je n'aurais plus à m'inquiéter du ou des espions qui me poursuivaient. Je devais impérativement le récupérer pour mes expérimentations sur l'esprit. Le candidat avait réussi : il était maintenant mon cobaye.

S'il n'y avait plus de preuves, que pouvait-on me reprocher ?

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Nous retrouvons la Sorcière, elle et ses secrets. 
Que pourrait bien être ses intentions ? Il faut bien l'avouer, on se demande ce qu'elle a derrière la tête. Rien n'est clair avec la Bannie : elle est secrète, elle travaille seule et elle n'est pas très rassurante.  
Y'a-t-il un lien entre cet homme et sa quête de puissance ?

Vos théories ?

La semaine prochaine : nous retrouverons Thalia !

L'Éveil de l'Arcane T.1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant