Chapitre 19 : Sourde oreille

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Ce Marek n'est pas celui que j'ai connu il y a un an. Tout le monde dans ce palais n'est plus comme avant. J'ai l'impression que tout le monde, même les serviteurs, sont contre moi. Mais à eux, je n'en veux pas trop. Ils ont dû recevoir les ordres d'Ellen.
Je m'attendais à rencontrer des difficultés dans mon mariage, mais c'est tellement plus que ce que j'avais imaginé. Une infinité de questions me bourrent le crâne, si bien que je ferme à peine les yeux les nuits. Mes angoisses se transforment presque en fantômes et dansent devant moi, refusant de se faire oublier ne serait-ce que le temps d'une sieste.

C'est donc après une énième nuit blanche comme du lait que je me lève, toute engourdie, pour aller à la salle de procès. Six mois se sont déjà ecouté depuis ma dernière visite à Helder. À Athéna, Marek m'ignore de plus en plus, et Ellen me lance des piques redoublant de méchancetés. Pas non plus l'ombre d'une grossesse, vu que Marek refuse de me toucher.

Comme si je le dégoute... Et rien que d'y penser, mon cœur se serre, et j'ai les larmes qui montent jusqu'à me noyer les paupières. Je vois flou, et les escaliers qui doivent me mener à la salle de procès se mélangent sous mon regard brouillé. Et ce qui devait arriver arriva : Je loupe une marche, et manque de me briser le tibia. J'ai terriblement mal, et je n'arrive plus à me lever. Quelle poisse !

   — Il y a quelqu'un ? Gardes ? Ellen ? Quelqu'un ? Je vous en supplie, j'ai mal !

Je crie de désespoir, prie ardemment le ciel de me sortir de ce pétrin. Je ne sens plus mon pied, mais personne à l'horizon. Ils doivent être tous dans la cour pour la formation de la cour royale. C'est tous les vendredis. Le ciel s'acharne sur moi.

   — Quelqu'un a besoin d'aide ? Hé ho ?

Adrian !

   — Au secours, je suis tombée dans les escaliers !

   — Reine Uméïra ? J'arrive tout de suite !

J'entends des pas gagner rapidement la grande terrasse du palais, où je me trouve, et le voit finalement courir vers moi, soulagée.

   — Dieu merci vous êtes là ! dis-je en jubilant du mieux que je pouvais.

   — Je vais vous ramener dans votre chambre, me dit-il calmement.

Il me porte jusqu'à mes quartiers privés et me dépose délicatement sur mon lit. Je dois apparemment être pour lui un poids plume pour qu'il ait à chaque fois le réflexe de me soulever.

   — Vous avez fait une chute très grave, votre jambe est déjà très rouge et très enflée, me fait-il remarquer.

Je baissé les yeux pour me concentrer sur chacun de ses gestes, et le voit peloter prudemment l'os de mes mollets, prêtant attention à la moindre de mes mimiques.

   — Ça vous fait très mal ?

Il le dit en touchant encore une fois mon tibia, et je suis à deux doigts de lui foutre une claque.

   — O-oui...doucement Adrian, j'y ai terriblement mal ! Hurlé-je avec une voix entrecoupée par la douleur.

   — Désolé votre majesté, je vais y mettre un baume et vous laisser vous reposer.

Il prend de l'huile pure d'Alcan et me fait un massage divin balayant d'une main timide mes pieds et remontant jusqu'au genoux. Ses doigts fins s'appliquent avec dextérité sur mes frêles jambes, qui ont envie de crier au monde entier à quel point ça leur fait du bien. Ça me berce presque, tellement je suis envahie par un sentiment de bien-être absolu.

   — Où sont Heldra et Nikita ? je lui demande quand il termine de m'appliquer le soin.

   — La reine-mère les as envoyés cueillir des plantes médicinales ce matin.

M'accorderez-Vous Cette Danse ?Où les histoires vivent. Découvrez maintenant