Chapitre 49 : Micmacs

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Ellen et Marek, les deux souverains d'Athéna, sont à Utopia pour une durée d'environ trois à quatre jours. Si la reine ne sort pas du palais avant cette période, ce sera encore plus difficile, voire impossible de le faire, et elle mourra à coup sûr. Cependant, la sécurité autour du palais a été renforcée, alors comment réussir à transporter incognito une personne presque sans vie ?

   — Adrian, plus la date approche, plus j'ai l'impression qu'on échouera à coup sûr, se morfond Heldra, abattue.

   — La reine est presque morte, et tu es le seul homme qui devra la porter jusqu'ici, alors que chaque seconde un garde passe devant sa porte, ajoute Nikita.

   — Dans deux jours, ce sera mon tour de ronde. Et j'ai pris le temps d'étudier les plans du palais. Regardez, dit-il en déroulant une grande feuille de papier noircie d'encre sous le regard éberlué des filles. Ici, c'est la chambre de la reine.

   — Oui, et c'est impossible de passer par la gauche, parce que ça débouche sur le grand salon, commente Heldra.

   — Et la droite aussi est fermée par une horde de garde. Notre seule chance est donc de passer par le balcon.

   — Quoi ? Mais on se fera repérer à des kilomètres ! Même Ellen nous verra depuis Utopia.

   — Oui, sauf à l'heure morte, dit Adrian.

   — Qu'est-ce que tu entends par heure morte ?

   — J'ai observé pendant presqu'une semaine les habitudes des gardes le soir. Et d'une heure quinze minute à une heure trente-cinq minutes du matin, aucune garde n'a le balcon de la reine dans son champ de vision.

   — Comment tu peux en être sûr ? l'interroge Nikita.

   — Pour vérifier qu'un garde ne manque pas à l'appel, on se retrouvent tous à ces minutes de façon discrètes pour vérifier que nous sommes tous là, et après chacun retourne à son poste.

   — C'est dangereux de le faire normalement non ? demande Heldra.

   — Oui, c'est pour cela que deux d'entre nous restent toujours à leur poste : Celui qui est au pied du balcon de la reine et à celui du roi.

   — Mais c'est absurde Adrian ! Celui qui est au niveau du balcon te repèrera forcément, s'écrit Heldra.

   — Oui je sais. Mais lui seul pourra être maitrisé, et le temps que les autres arrivent, je serai parti.

   — Tu te feras couper un bras avant même de toucher le sol Adrian, n'oublie pas que tu porteras la reine.

Adrian porte la main à son menton, un bras sur la hanche, pensif.

   — C'est vrai, j'ai failli oublier que je pèserai deux fois plus lourd.

Il s'assoit sur le petit siège en pierre qui sert de tabouret, et se remet à examiner la petite carte qu'il a faite lui-même.

   — Il doit forcément avoir un autre moyen de sortir que le balcon. Tout palais a une faille, fait remarquer Heldra.

   — Et le sous-sol ? demande Nikita.

   — Les sous-sol du palais forment de véritables labyrinthes, et si on se perd, ce qui est presque certain, le temps que je puisse trouver mon chemin, des gardes nous attendront déjà à la sortie et on se fera tuer. Ça aurait été une bonne solution si on avait plus de temps.

   — D'accord, supposons que le garde du balcon nous laisse ''gentiment'' passer, admet ironiquement Heldra. Comment on sortira de l'enceinte du palais ?

   — C'est là que j'aurais besoin de vous Heldra. Tu sais que chaque deux jours, un coursier fait le trajet d'Athéna à Heldor pour distribuer les lettres extraterritoriales et inversement ?

   — Oui, je le sais.

   — Le coursier risque d'avoir un petit problème et tu seras obligée de le remplacer ma chère petite sœur, avoue-t-il une lueur malicieuse dans les yeux. Et Nikita sera à l'arrière pour veiller sur la reine.

   — Tu es complètement fou Adrian, où tu vas chercher des idées pareilles !

   — J'y ai longuement réfléchi, et c'est le seul moyen qu'on ait.

   — Il n'y a pas de contrôle à la frontière ?

   — Si, mais il est très léger pour les coursiers, la frontière est plutôt poreuse. Une fois celle-ci passée, on cherchera un endroit isolé dans la forêt et on descendra tous pour continuer à pied vers la grotte.

   — La route risque d'être longue.

   — Oui, c'est pour ça qu'on sera à bord de Mate et de Rhisp, l'étalon de la reine et le mien. Je les attacherai là-bas dès demain, quand je sortirai promener Mate.

Adrian soupire et regarde profondément les deux filles, qui ont l'air d'avoir le tournis après toutes ces mic mac.

   — Alors, qu'est-ce que vous en pensez, dit-il nerveusement en attente de réponses positives.

   — J'en dis que c'est une folie Adrian, qui nous conduiras tous à la mort assurée, lâche Heldra, perturbée par le plan de son frère.

   — N'exagère pas Heldra, essaie de calmer Nikita. Mais je dois avouer que moi aussi je suis complètement pessimiste. Je doute que ça puisse marcher.

Devant les impressions négatives des filles, Adrian baisse la tête, comme contaminé avec vélocité par le virus du pessimisme.

   — Moi j'y crois les filles, affirme-t-il faiblement. Je crois que c'est notre seule chance de sauver la reine, mais je n'y arriverais pas sans vous. Alors si vous n'êtes pas d'accord, on laisse tomber.

Secouées par les propos désespérés d'Adrian, Heldra et Nikita se tournent vers lui, découvrant ainsi l'expression fermée de son visage, qui traduit la peine immense qu'il ressent, la frayeur maligne qui lui parcourt les veines à l'idée d'échouer et de ne pas pouvoir réussir à sauver Uméïra. Lisant dans les pensées de son frère, Heldra vint jusqu'à son niveau et pose sa frêle main sur son genou.

   — À part ce plan, as-tu une autre idée ? s'enquiert Heldra, peinée.

   — Je vais bien finir par trouver, déclare-t-il sèchement. Il le faut. Pour la sauver. Sauver Uméïra.

Il s'enferme dans un mutisme qui laisse imaginer aux deux filles le travail surhumain qu'il demande à ses méninges pour trouver d'urgence une autre solution. Parce que des solutions secours rapides, il en avait pleins en réserve. Mais là, c'est tout le plan qu'il fallait changer. Et ça, c'était la mer à boire.

   — Arrête de te torturer comme ça Adrian. On le fera, lâche Heldra.

Surprise, Nikita lève les yeux vers sa consœur qui n'avait même pas prit la peine de lui demander son avis.

   — Heldra est-ce que tu t'entends parler ? lui crie Nikita.

   — Vous aviez raison, rajoute Adrian. C'est une folie tout ça.

   — Oui, mais une folie qui pourrait bien marcher, dit-elle avec un sourire confiant. Une folie qui pourrait sauver la femme qui t'a rendu aussi fou grand frère !

Satisfait de l'effet requinquant qu'a eu son petit chantage émotionnel sur sa revêche petite sœur, Adrian tourne son regard vers elle, tous les deux s'échangeant un sourire complice reflétant le goût prononcé pour la si délicieuse adrénaline qu'ils partagent depuis leur enfance, déterminés à ce moment-là à se battre contre tous s'il le faut.

Détermination qui n'est surtout pas partagée par une Nikita mortifiée de peur, mais rendue invisible par la folie des grandeurs de ses deux complices...

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M'accorderez-Vous Cette Danse ?Où les histoires vivent. Découvrez maintenant