Chapitre 45 : Bleu Sauveur

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Le soleil est déjà haut dans le ciel. C'est la fin de sa ronde journalière. Adrian avait réussi à revenir assez tôt de son escapade de la veille avec sa sœur et Nikita, et avait pu s'offrir une nuit de repos relativement courte. Malgré tout, il ne ressentait la moindre fatigue. Il y avait beaucoup trop de choses à faire pour paresser, à commencer par trouver un moyen de faire sortir Uméïra de ce palais meurtrier.

Adrian longe les alentours du palais, puis grimpe sur une roche difforme dissimulée derrière le potager du jardin royal. Debout sur celle-ci, les mains sur les hanches, il observe chaque détail du palais. Il tient dans la main gauche un bout de papier et un stylo à encre, et dans la main droite, un biscuit maison de blé et de lait, qui constitue à la fois son déjeuner et son petit déjeuner. Le temps ne lui suffit plus pour qu'il se complaise à en perdre dans de copieux repas.

En levant la tête plus haut, il voit le grand balcon de la chambre de la reine au premier étage du château. Celui-ci est surveillé de long en large par une demi-dizaine de gardes qui gravitent non loin. Adrian coince le bout du biscuit aux céréales dans sa bouche et griffonne le plan de cette partie du palais sur le bout du papier. Il note le moindre détail qu'il remarque de là où il est, compte le nombre de gardes qui pourrait présenter un éventuel obstacle ainsi que leur nom. Son repérage achevé, il fourre le bout de papier dans un petit cahier rempli de nombreuses autres notes, qu'il se dépêche de cacher dans le guêtron de ses chaussures de service, puis retourne au palais.

Dans le plus inviolable secret, il prépare le sauvetage de la reine depuis que celle-ci est définitivement dans le coma. La sortir d'ici ou avoir toute sa vie sa mort sur la conscience, Adrian n'a pas hésité une seule seconde à faire son choix. Il lui est de plus insupportable d'avoir à faire semblant d'être toujours un fidèle soldat au service d'Athéna. Pensif et calme, il circule plusieurs minutes tout le long du palier de la chambre de la reine. Le regard désolé, il observe sans rien pouvoir dire les deux nouvelles servantes défiler dans la chambre avec des récipients de toutes sorte. Quand elle était encore consciente, Uméïra n'avait même pas droit à un plat résistant. Et c'est maintenant qu'elle est entre la vie et la mort que la reine-mère décide de lui apporter de quoi manger, ou plutôt de quoi sentir, puisque faible de son état, elle ne peut quasiment rien manger.

Dépité du spectacle hypocrite qui se déroule sous ses yeux, Adrian secoue la tête et descend les marches escarpées du palais royal. Il n'y a personne. Les pièces sont vides, et silencieuses. Quand elle était encore consciente, c'est Uméïra qui y mettait de la vie. Elle arpentait toujours les couloirs, cherchant la meilleure vue de coucher de soleil. Et quand elle l'avait trouvé, elle alpaguait tous les gardes et toutes les servantes qui passaient par là pour le leur montrer. Adrian se pince la lèvre, souriant en repensant à la pureté de l'éclat de son regard, à l'innocence de son cœur. Il s'en voulait. Il s'en voulait de l'avoir trompé, de lui avoir caché qu'en réalité, il n'était qu'un espion d'Athéna à en mission à Heldor.

Ce n'était pas Marek. Il s'en voulait de l'avoir fait tomber amoureuse du monstre qu'est son mari, et de masquer ses sentiments. Il voulait, là, au milieu du palais, crier au monde entier qu'il aimait Uméïra. Il voulait lui dire toute la vérité, qu'il n'avait jamais été du côté d'Heldor, mais était un espion d'Athéna toutes ses années, avant bien sûr de tomber amoureux d'une Heldorienne, qui n'était d'autre que la princesse qu'il était chargé d'espionner et de surveiller. Il mourrait d'envie de le lui dire à chaque fois que ses étincelantes prunelles tentait de l'incriminer par leur sincérité. Mais hélas, il ne le pouvait pas. Et maintenant, c'était peut-être trop tard.

Plongé dans ses pensées, Adrian ne s'était même pas rendu compte qu'il était ressorti du palais. Pour l'instant, il n'avait pas grand-chose à faire. Il était le garde personnel d'une reine qui pour le moment, était inconsciente. Peiné, il se retire jusqu'au fond du jardin, vers les acacias touffus qui bordent le côté gauche du domaine royal, et s'y adosse, assis à même le sol, et ferme les yeux.

M'accorderez-Vous Cette Danse ?Où les histoires vivent. Découvrez maintenant