Chapitre 63 : Mis à prix

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Regardant de temps à autre par-dessus son épaule, Adrian court sans relâche. Il faut fuir sans perdre de temps. Arrivé à l'entrecroisement des acacias alignés au milieu de la forêt, il saute sur son cheval qui l'avait sagement attendu attaché à l'un des acacias, et fonce rejoindre la grotte.

Adrian était couvert de sang. Même la cagoule en tissu qu'il portait sentait fortement le sang. Il dû la retirer bien vite et la rangea dans la besace qu'il avait accrochée sur son cheval. Ce qu'il venait de faire était incroyable. Il avait réussi à vaincre seul une dizaine de soldats, sans y laisser sa vie et peu blessé. Seul une large coupure l'handicapait partiellement au pied gauche. Pour cause, il avait manqué de peu de se faire couper le pied par la lame tranchante de l'épée d'un soldat qui l'avait surpris par l'arrière.

Mais leur embuscade avait réussi. Ellen était désormais entre leurs mains. Nikita et Uméïra la détenait. Elles avaient pris de l'avance, pendant qu'Adrian était resté à l'arrière pour immobiliser tous les gardes qui auraient pu les poursuivre.

Nikita est une excellente guerrière. Elle fait partie d'une famille ou à part sa mère, c'était la seule femme, de plus benjamine, d'une famille de huit enfants. Tous ses frères étaient des soldats aguerris d'Heldor. Ils avaient formé leur petite sœur, qui même si elle dû abandonner les armes pour être servante de la princesse, était resté la jeune femme fragile d'apparence mais redoutable meurtrière. De même pour Uméïra, qui avait outrepassé tous les codes de conduite royaux la concernant, en se faisant former au combat. Et elles venaient de faire remarquablement leur preuves en se battant avec succès aux côtés d'Adrian. Ce dernier ne pouvait d'ailleurs s'empêcher d'être fier d'Uméïra.

*

   — Ligote-moi vite cette sorcière, ordonne Uméïra à Nikita.

Adrian approche du camp et entend distinctement des voix venant de la grotte.

   — Tout de suite Uméïra, tout de suite.

Nikita se précipite chercher une corde, s'essuyant entre temps d'un chiffon. Elles sont encore toutes sales. Uméïra n'a même pas encore retiré sa cagoule. Elle avait l'air agitée et ne tenait pas en place.

   — Et ma sœur ? demande Adrian.

   — Elle est partie chercher de quoi faire parler Ellen, ce n'est pas très loin, juste au large du fleuve. Elle sera là d'ici une dizaine de minutes, ne t'inquiète pas, je...s'affole Uméïra.

   — Eh, eh, eh, calme-toi, je sais qu'elle va revenir, l'apaise Adrian en marchant prudemment vers elle.

Il la prend tout doucement dans ses bras.

   — Tu étais si calme quand on devait aller attaquer, qu'est-ce qui se passe pour que tu paniques tout à coup ?

   — C'est..., Ellen. J'ai tellement envie de la tuer Adrian..., souffle-t-elle dans son cou. Si seulement tu savais...

   — Elle doit d'abord parler, tu te souviens ? lui dit-il en prenant son menton du creux de la main. Change-toi, prend vite un bain dans le fleuve, et on fera de même. Il faut qu'on disparaisse du bord du fleuve quelques jours, pour nous faire oublier. Je te promets, c'est bientôt fini tout ça, lui murmure-t-il.

Petit à petit, il sentait le pouls de la frêle jeune femme baisser. Elle s'apaisait. Comme un cauchemar, tout ce qu'Ellen lui avait fait subir lui revenait en tête : humiliation, torture, privations. C'était lourd à porter. Et si jusque-là elle s'était retenu, la voir en chair et en os là devant elle, ayant perdu connaissance mais si richement habillée, c'était dur. Il lui fallait prendre du recul.

   — Imbécile...Mais qu'est-ce que...urgh......tu vis encore toi ?

Uméïra se retourne et croise le regard d'Ellen, à peine réveillée. Dans les yeux de cette femme, se lisait toute la haine qu'elle éprouvait pour son ex-belle-fille, et réciproquement.

   — Eh oui, et c'est le début de ton cauchemar, répond Uméïra en lui frappant la mâchoire à coup de talon violent.

Du sang gicla en quantité, et Ellen perdit à nouveau connaissance.

   — Tu aurais pu la tuer Uméïra ! s'exclame Adrian qui la ramena automatiquement vers lui avant qu'elle ne lance un autre coup violent.

   — Je regrette de ne pas l'avoir tué, répond-t-elle froidement en se détachant de lui. Je vais prendre mon bain.

   — Je pense que ce serait le mieux en effet, lui intima Adrian. Contrôle-toi, sinon tu feras une bêtise.

   — C'est peut-être moi qui sait ce qui pourra me soulager tu ne penses pas ? lui crie Uméïra.

   — Peut-être, mais je dois te protéger et je t'ai promis mon aide. On n'arrivera à rien si tu réagis sur un coup de tête, lui dit Adrian en haussant cette fois la voix pour imposer son autorité. Maintenant je te demande de te calmer !

Elle tourne les talons et part, en colère. Elle désirait partir de là au plus vite, avant d'avoir à réellement tuer Ellen alors qu'Adrian le lui avait interdit. Il avait raison, elle le savait. Dans peu de temps, Heldra serait de retour avec les outils de torture que lui avait demandé Uméïra.

Le jeu allait pouvoir réellement commencer.

*

À Athéna, Marek refuse de garder le lit comme le lui a prescrit l'ilknur du palais. Le royaume est en alerte. Le code rouge de l'urgence est lancé. Boitant à cause de la blessure béante que lui avait intentionnellement infligé Adrian, Marek quitta sa chambre royale et dévalait les escaliers avec une rage incandescente dans le regard.

   — Votre Majesté, vous êtes blessé, vous devez attendre un peu !

   — Hors de ma vue garde inutile ! Et vous pensez que la reine-mère réapparaitra par magie si personne ne se bouge le cul ? Dégagez et fouillez toute la forêt au lieu d'aboyer des sottises !

Rembarré, le garde se glissa sagement hors du passage du roi Marek qui continua sa route jusque dans la salle du trône, où il avait d'urgence convoqué une réunion entre tous les sages, administrateurs, ainsi que représentants du peuple.

   — L'heure est grave. La famille royale a été victime d'une embuscade, et la reine-mère a été kidnappée. Voyez-vous-même les dégâts, ajouta-t-il en montrant les nombreux bandages qui lui habillait entièrement la cuisse droite.

   — De plus, l'affaire de la disparition de la reine Uméïra est toujours floue. Et personne ne sait qui est à l'origine de toutes ses attaques mon seigneur, ajoute Antanaï, l'un des administrateurs.

   — Elles sont liées. Même s'il ne s'agit pas d'un même groupe, une seule personne est derrière tout ça, déclara péremptoirement Marek.

   — Et qui est cette personne qui mérite la peine de mort ? Dites-nous son nom, afin de vite retrouver la reine-mère et de punir ce bandit, lui demande l'adjoint au chef de la garde royale.

   — Ce n'est autre que ton cher chef, Rhys Diar, appelé aussi Adrian. Il rode quelque part dans cette forêt depuis sa fuite du royaume il y a quelques jours.

Tout le monde dans la salle était pétrifié. Ils connaissaient tous Adrian, le plus fort des soldats d'Athéna, le chef de la garde royale et garde du corps de la reine. Et personne n'était plus loyal que lui.

   — En êtes-vous sûr mon seigneur...c'est vraiment Adrian ? redemande l'adjoint, stupéfait.

   — Retrouvez ma mère, retrouvez-le, et tuer-le. Lui ainsi que ses sœurs. Je les veux morts, c'est clair ?

Même s'il n'avait aucune preuve qu'Adrian était derrière toutes ces attaques, il le voulait mort. Plus tard, il en aurait la preuve. Il était sûr d'une chose : Adrian voulait se venger d'Athéna pour avoir tué la femme qu'il désirait tant, la reine. Mais Marek ne laisserait pas ce traitre s'en tirer comme ça, ni même lui laissee le temps de penser à une éventuelle vengeance si tel n'était pas déjà le cas.

   — Bien mon seigneur, répondent les gardes. S'il se trouve dans cette forêt, c'est un homme mort.

Marek sourit, satisfait.

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M'accorderez-Vous Cette Danse ?Où les histoires vivent. Découvrez maintenant