🌹Chapitre 21🌹

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— Arthur?

Silence.

— Viviane m'a expliqué certaines choses.

Silence. Encore.

— Tout d'abord, je tenais à te remercier de m'avoir sauvée. Ensuite, je suis désolée pour ta mère.

Juste après, son poing se ferma plus qu'il ne l'était déjà. Purée, la boulette! Je m'accroupit près de lui et pose ma main sur son avant-bras.

— Pardon. Oublie ce que je viens de dire.

Un psychologue n'aborde jamais explicitement le sujet sensible avec son patient. Il doit attendre que le patient se sente prêt. Sous ma main, je sens qu'il tremble. Ce n'est vraiment pas bien pour sa santé ça. Je dois agir.

Je me lève et me dirige vers la cuisine où je retrouve Viviane avec d'autres employées qui ne sont pas encore parties dormir. Les conversations s'arrêtent immédiatement quand j'entre. Je demande à Viviane des somnifères et un verre d'eau avant de retourner dans le salon. Quand j'arrive, Arthur n'a pas changé de position. Je m'accroupit encore près de lui et lui tend les cachets.

— Tiens, ça va te tranquilliser un peu.

Je parle à un bloc de béton. C'est comme si je n'existais pas. Bon, de toute façon, c'est toujours comme ça que ça commence. Les premières réticences du patient. Je ne peux pas le laisser souffrir plus. Même si c'est un monstre, il reste un homme qui mérite qu'on s'occupe de lui. Et peut-être est-ce l'absence d'une présence maternelle qui le rend ainsi?

Quand une personne est en manque d'affection, elle peut très bien trouver une solution pour obtenir de l'amour. L'obsession en est une. Mais est-ce qu'il peut guérir de ça? Personnellement, je pense que oui. Je pose délicatement ma main sur son poing fermé et — miracle — ses yeux descendent sur ma main.

— Arthur.

Il lève le regard vers moi. Ça me fait mal de voir tant de souffrance dans son regard. Et il ne demande pas d'aide. Il ne va pas bien. Il a besoin de quelqu'un. Et heureusement, je suis là pour le remettre sur le droit chemin.

— Je pense que tu devrais aller dormir.

Je passe une main sous son bras pour le relever et il se met sur pieds. Je lui tend encore les cachets, mais il n'en fait rien.

— Prends-les. Allez, ouvre la bouche.

J'apporte le médicament à ses lèvres, mais elles restent closes. Ce n'est vraiment pas bien pour lui de rester éveiller avec un traumatisme pareil. Il faut qu'il dorme.

— Je... Si tu prends ces médicaments, je te promet de rester ici. Je promets de ne plus tenter de m'enfuir. Je resterai pour toujours si il le faut. Mais s'il-te-plaît, prends ces cachets.

Qu'est-ce qui me prend? Depuis quand je fais des promesses comme ça? Peut-être que je veux vraiment tout savoir sur tout dans ce manoir et percer les secrets d'Arthur? Sûrement. Oui, c'est ça.

-— Tu veux bien?

J'approche le cachet de ses lèvres et il les entrouvre. Ses lèvres sont douces au touché. Elles sont chaudes aussi. Je n'ai jamais été aussi près de lui qu'aujourd'hui. C'est étrange, et en même temps fascinant. Il avale le comprimé sans même boire de l'eau. Je lui donne le deuxième médicament et il en fait de même.

Arthur s'appuie sur moi en montant les escaliers. Il n'a pas dit un seul mot depuis que je me suis réveillée. C'est normal pour une personne traumatisée. Mais c'est très étrange de sa part de ne pas lancer une réplique qui me mettrait en colère.

Nous arrivons à l'étage et on entre dans sa chambre. Les photos sont encore toutes présentes. Le portrait également. Mais je fais abstraction de tout ça et le laisse tomber sur le lit. Je dois rester avec lui pour m'assurer qu'il dort bien et qu'il ne fasse pas de cauchemars. Des traumatismes additionnés de cauchemars, ça ne donne pas un joli résultat.

Il s'endort plus rapidement que je ne l'avais espéré. Je reste assise sur son lit en le regardant. C'est affreux comment un homme comme lui puisse avoir des traumatismes. Et moi qui pensais qu'il était le genre de personne inébranlable. C'était totalement faux. Il est tout aussi fragile qu'un oisillon. Et beau aussi. Je ne vais pas le cacher, Arthur est un très bel homme. C'est son caractère que je ne supporte pas.

Il aurait pu avoir toutes les femmes du monde à ses pieds — moi y compris — si ce n'était pas un psychopathe. L'imaginer en homme souriant, romantique et tout ça, ça me fait rire. Je ferais sûrement une crise si un jour ça arrive. Il commence à haleter dans son sommeil. Un cauchemar. Ça ne va pas se passer comme ça.

— Ça va, ce n'est rien.

Je passe une main dans ses cheveux, qui sont très doux au passage. Je lui caresse doucement la tête en lui murmurant des paroles rassurantes. Cette méthode marche à tous les coups. Ma mère me faisait la même chose.

Arthur ouvre les yeux et se redresse vite. Qu'est-ce qu'il a? Je me redresse aussi et me place devant lui pour avoir ses yeux en face des miens. La discussion doit toujours se faire face à face. Avec son grand lit, je suis obligée de monter dessus pour le rassurer. Il a l'air effrayé. Comme un chaton.

— Du calme. Ce n'était rien.

Je continue à lui caresser les cheveux et quand ma main commence à fatiguer, elle descend toute seule sur sa joue. Oh mince. Ce n'est pas bon signe. Ce n'est jamais bon signe.

Et j'avais raison parce qu'il s'approche. Je ne bouge pas. Pourquoi? Je ne sais pas. Ses lèvres ne sont plus qu'à quelques centimètres des miennes. Elles s'effleurent même déjà. Purée, qu'est-ce qui se passe? Automatiquement, j'entrouvre la bouche. Ses douces lèvres viennent se presser contre les miennes et sa langue cherche un accès.

Nos bouches parfaitement scellées, il guide la danse. Je ne peux pas m'en empêcher. Je suis son rythme et je sens une drôle de chaleur dans mon bas-ventre. Ça ne s'arrange pas quand il pose une main sur ma hanche. Il remonte légèrement mon t-shirt pour caresser ma peau. Qu'est-ce qu'on fait? Son autre main vient aider l'autre et il m'attire vers lui.

Comme une vulgaire poupée de chiffon, je me laisse faire. Je passe une jambe par-dessus ses cuisses et m'assois à califourchon sur lui. Nos bouches ne se sont toujours pas séparées et je fais glisser mes doigts sur ses joues. On dirait que je suis assise sur ses cuisses parce qu'il descend ses mains sur mes fesses et les presse pour me coller à lui. Je peux sentir un bosse en dessous de moi. Et ça me fait un effet étrange.

Il remonte ses mains sous mon t-shirt et me caresse le dos. Ses lèvres quittent les miennes pour déposer des suçons sur mon cou. Je gémis. Pourquoi? Je ne sais pas. Tout ce que je sais, c'est que ce qu'on fait n'est pas bien.

— On devrait arrêter, Arthur.

À ses mots, il arrête d'embrasser mon cou. Il ne bouge pas pendant une seconde. Puis, il me fait basculer sur le lit. Ça prend des proportions trop gênantes. Heureusement que la chambre est plongée dans le noir. Il pose sa tête sur son oreiller et arrête de me toucher.

— Reste ce soir.

Enfin, il se décide à parler.

— Oui, je reste.

— Merci Sasha.

Oh purée.

Pour la BêteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant