🌹Chapitre 30🌹

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Seul dans son bureau, Arthur tapotait sur les touches de son ordinateur. La journée n'a pas vraiment été bonne pour lui. À l'heure du déjeuner, il devait rejoindre Sasha et Conor avec sa fausse petite-amie. Le couple semblait s'être réconcilié, ce qui ne faisait pas partie de ses plans. Et pour couronner le tout, il avait tué l'actrice. Arthur soupira. Tout ça, c'était la faute de Ruby. Pourquoi fallait-il qu'elle descende à cet instant précis? Elle avait ruiné tous ses plans. Trois coups à la porte le coupèrent dans ses réflexions.

— Entrez.

Aussitôt, Viviane apparu dans l'encadrement de la porte, une tasse de café dans les mains. La vieille dame s'approcha doucement de son protégé et déposa la boisson sur sa table. Il lui lança un simple merci sans émotions, sans détourner le regard de ses affaires. Viviane soupira doucement. Elle avait toujours soutenue les décisions d'Arthur. Pendant longtemps, elle avait été une seconde mère pour lui. Il n'avait jamais manqué d'amour de sa part. Mais là, il dépassait un peu les limites.

— Arthur, mon garçon. Commença-t-elle.

Le concerné ne daigna pas lever les yeux de son ordinateur. Mais ce n'était pas cela qui allait empêcher Viviane de lui parler.

— Je trouve que ces derniers temps, ton comportement est plus que déplorable.

À ces paroles, les doigts du jeune homme s'immobilisèrent au-dessus des touches. Plus que déplorable? Jamais de sa vie il n'avait entendu Viviane dire une telle chose. Il avait toujours été son préféré. Elle l'aimait même plus que ses propres enfants. Viviane n'a jamais levé, ni la voix, ni la main sur lui. Alors, pourquoi disait-elle cela? Il leva les yeux vers ceux de sa gouvernante et leva un sourcil. Quand à cette dernière, elle le couvait toujours de son éternel regard maternel.

— Qu'est-ce que tu veux dire? Demanda-t-il.

— Je veux dire que tu n'agis pas correctement avec cette fille.

— Quelle fille?

— Ruby, bien sûr.

Arthur eut envie de rire. Ruby était certainement la personne que Viviane détestait le plus. Et là, elle se mettait à dire qu'il n'avait pas été correct avec elle.

— Ce n'était pas toi qui n'arrêtait pas de l'insulter à la moindre occasion? Demanda-t-il, amusé.

— Je ne vais pas le nier. Mais après tout ce qu'elle a fait pour toi, je ne peux pas accepter que tu la torture ainsi.

— Je ne la torture pas, elle reste ici de son plein gré.

— Je t'en prie, ne fais pas celui qui ne voit rien. Cette pauvre fille a été arrachée de force à sa famille, elle a atterri dans un lieu qu'elle ne connaissait pas, tu lui a hurlé dessus quand elle est entrée dans ta chambre et maintenant, elle assiste à la mort d'une femme.

Arthur devait l'avouer, Ruby en avait vu de toutes les couleurs depuis qu'elle était chez lui. Il ne l'a jamais vu esquisser un sourire heureux. Il se demandait même comment a-t-elle fait pour ne pas devenir folle. Mais ce n'était pas son problème. Il avait d'autres affaires à régler. Ruby était le cadet de ses soucis.

— Tu devrais rendre son séjour plus agréables.

Le jeune homme leva un sourcil. Elle voulait qu'il rende le séjour de Ruby agréable? Celle qui avait perdu l'esprit, c'était elle. C'était impossible de rendre le séjour d'une prisonnière agréable.

— Viviane, est-ce que tu t'entends parler? Est-ce que tu es devenue folle?

— Ne plaisante pas avec moi, jeune homme. Toi aussi, tu serais dans le même état qu'elle si on t'avait fait subir toutes les horreurs qu'elle a subi. En parlant de ça, je n'ai rien dit devant les employés, mais tuer une femme dans la maison n'est pas très positif pour ton image.

— Et c'est toi qui me dit ça.

Viviane serra les poings. Il ne pouvait pas la comparer à lui. Ce qu'elle avait fait, c'était pour lui. Elle l'avait fait par amour et elle ne le regrettait pas. Arthur ne semblait pas comprendre la différence qu'il y avait entre eux.

— Ce n'est pas pareil. Dit-elle.

— Je trouve que si, c'est exactement pareil. Tu as tué ma tante pour me protéger, et j'ai tué cette femme pour nous protéger. Si la police avait été mise au courant de ce que j'ai fait, elle t'aurait mise en prison. Et je ne veux pas de ça, Viviane.

La vieille dame n'eut plus rien à dire. Finalement, ils étaient pareils. Aussi fou l'un que l'autre. Il y a des années, après la mort de madame Shepherd, sa jeune sœur était venue au manoir pour récupérer l'enfant. Viviane voulait pas que le petit Arthur quitte la maison. Elle savait que si il partait, il allait souffrir plus qu'il ne souffrait déjà. Sa tante était une toxicomane qui ne savait pas s'occuper d'enfants. Elle était mariée à un homme très peu fréquentable. Ce fut sans remords que Viviane mit fin aux jours de cette femme, dans cette même maison.

L'oncle d'Arthur n'a plus voulu de lui après cela. Il n'allait tout de même pas s'encombrer d'un enfant alors qu'il s'était enfin libéré de cette alcoolique. L'oncle disparu dans la nature et ne donna plus jamais signé de vie. Et ça arrangerait bien Viviane. Elle ne voulait que personne ne touche à Arthur. Chassant ses souvenirs, Viviane reprit sa précédente discussion avec son protégé.

— Sais-tu ce que j'ai fait après avoir tué ta tante?

— Non.

— J'ai tout fait pour te rendre heureux. J'ai fait tout ce qui était en mon pouvoir pour que tu sois l'homme que tu es aujourd'hui: un homme fort et intelligent. J'ai fait en sorte que tu oublies l'existence et la mort de ta tante.

— Et je t'en remercie, Viviane. Je n'avais vraiment pas besoin d'une tante alcoolique. 

— Je t'en prie, mon grand. Mais ne change pas de discussion.

Malgré le fait qu'il soit un homme insensible, égoïste et manipulateur, il se permettait de baisser la garde devant Viviane et agir comme un adolescent qui chercherait échapper à une discussion existentielle.

— Comme je t'ai rendue heureux, rends cette fille heureuse.

— Comment veux-tu que je fasse ça? Je ne suis pas le genre de personne à aller à des anniversaires.

— Je ne te demande pas d'organiser le carnaval de Rio. Une gentille attention suffira.

Ce fut sur ces paroles que Viviane déposa un baiser sur le front d'Arthur et quitta la pièce. Ce dernier cogita sur ses paroles. C'était effectivement injuste qu'elle subisse tant de choses. Peut-être qu'il pourrait faire quelque chose pour elle? Quelque chose de pas trop grand comme Viviane lui avait laissé comprendre. Mais Arthur ne connaissait rien aux femmes. Qu'est-ce qu'elles aimaient?

«Qu'est-ce que Ruby aime?» se demanda-t-il.

Il se mit alors à réfléchir à un nombre incalculable de choses qu'une femme comme elle pourrait aimer. Elle aimait faire du jogging, lire, cuisiner. Ses réflexions furent coupées par une pensée un peu étrange: il ne s'était jamais demandé ce que Sasha aimait. Il ne connaissait rien de ses goûts. Alors que Ruby...

— N'importe quoi...

Arthur laissa de côté cette histoire de rendre Ruby heureuse et retourna à son travail. Mais le fait qu'il connaisse plus son otage que l'amour de sa vie était tout de même quelque chose d'étrange pour lui.

Pour la BêteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant