🌹Chapitre 28🌹

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Je ne sais pas comment ni pourquoi c'est arrivé, mais c'est quand même arrivé. Jamais je n'aurais cru que je me retrouverais dans ce genre de situation. Je me suis toujours imaginée poignarder Arthur avec un couteau de cuisine. Voir la vie quitter son regard avait été une de mes principales obsessions. Peut-être que la mort aurait été le seul moyen pour qu'il me laisse tranquille. Mais jamais, au grand jamais, je n'aurai imaginé qu'il puisse y avoir une facette de lui comme celle que j'ai découverte la nuit dernière.

Hier soir, après ma douche, il est entré dans ma chambre. Les mots pour tenter de tempérer l'incendie entre nos deux corps n'ont pas fait long feu. C'est là que nous nous sommes retrouvés l'un contre l'autre, lui en moi, et moi lâchant des gémissements. En regardant Arthur, on pourrait jurer qu'il n'est pas doux. Et oui, il ne l'est pas. C'est un monstre quand on lui parle. Mais quand c'est son corps qui parle, c'est le plus doux des agneaux.

Je me demande si il n'est pas aussi bipolaire. Pendant la nuit, il a été très patient avec moi et il ne m'a forcé à rien. J'en suis encore plus déconcertée qu'au départ. Jour après jour, je rencontre une nouvelle facette de sa personnalité. Donc, si je résume tout ce que je sais jusque là, c'est une bête. Mais il est redevable envers celui qui l'aide. C'est aussi un homme assez timide — si je peux utiliser ce mot — au lit. Mais je ne m'en plains pas. Il change.

Et moi aussi d'ailleurs. Malgré tout nos échanges à propos des livres, jamais je n'ai ressenti une telle chose pour lui. Pour moi, il était toujours le psychopathe qui m'a enlevé. Mais après cette nuit, je remet en question tout ce que je disais sur lui. Est-ce que c'est réellement une bête? Oui, d'un point de vue psychologique. Est-ce qu'il est méchant? Oui. Non? Je ne sais pas, je suis perdue.

— Bonjour. Souffle-t-il près de mon oreille.

Finalement, non, il n'est pas méchant. Il est juste en manque d'amour. Tout ce dont il a besoin, c'est d'attention et de tendresse. Il a besoin que quelqu'un l'écoute et prenne en compte ce qu'il ressent. Et je ne sais pas pourquoi, mais je sens que cette personne, c'est moi. Je suis encore plus déterminée à le guérir. Il ne mérite pas de souffrir comme ça.

— Bonjour. Je réponds. Bien dormi?

Mais il ne me répond pas. Ses bras restent autour de ma taille, au-dessus des draps rouges. Finalement, j'aime bien cette couleur. Je sens que son bras quitte sa place et qu'il se met sur le dos. Je l'imite. Il soupire.

— Ça fait des lustres que je n'ai pas dormi sans faire de cauchemars.

— Ah bon?

— Oui.

— Il faut croire que faire l'amour avec sa victime, ça aide.

Il rit. J'aime l'entendre rire. C'est beau quand c'est sincère. À mon plus grand malheur, il se redresse et sort du lit. J'aurais aimé que notre réveil dure un peu plus longtemps. Mais de toute façon, à quoi je m'attendais? Je ne suis qu'un coup d'un soir. Et personnellement, ça me va. Je ne suis pas le genre de personne à m'attacher facilement. Les relations amoureuses n'ont jamais été mon fort. Alors, si je peux coucher avec quelqu'un sans devoir mettre un nom à notre relation, autant en profiter.

Je me redresse à mon tour et m'adosse à la tête du lit. Contrairement à Arthur, je ne suis pas pressée d'aller où que ce soit. Je peux glander dans mon lit sans avoir quelque chose qui me titille la conscience. Et de le voir se rhabiller en vitesse pour aller au travail, ça me fait rire.

— Allez, plus vite. Sinon, tu vas rater le bus. Dis-je.

— C'est ça, moque-toi.

-Tu sais, tu peux toujours me laisser rentrer chez moi si mes blagues ne te font pas rire.

Bien qu'après cette nuit torride, je ne veuille plus trop rentrer.

— Et laisser filer mon antidépresseur? Sûrement pas.

Me comparer à un médicament n'est pas la chose la plus romantique à dire. Mais c'est quand même mignon de sa part. Ça prouve que je compte pour lui. Et cette constatation me fait sourire. Être importante pour quelqu'un n'a jamais été l'une de mes priorités. Mais là, c'est différent. Je sens que j'ai besoin qu'il me regarde. Qu'il me touche. Qu'il se confie à moi.

Cette simple relation patient-psy est en train de devenir une toute autre sorte de relation. Et ce n'est pas pour me déplaire. C'est même assez plaisant. Je sais que ce n'est vraiment pas professionnel de coucher avec son patient, mais je n'ai singé aucun contrat à ce que je sache. Et puis, je pense que tous les coups sont permis. Lui, il m'a enlevé. Pourquoi n'aurai-je pas le droit de faire ça? Je ne me sens coupable de rien.

— Dis-moi, qu'est-ce qu'elle faisait ici, cette fille? Je demande pour m'efforcer à arrêter de le contempler.

— C'est une actrice.

— Ça ne répond pas à ma question.

— Une actrice pornographique.

— Ah. D'accord. Mais ça ne répond toujours pas à ma question.

— Je la paie pour qu'elle joue le rôle de ma petite-amie.

Mon cœur se serre ne l'entendant dire ça. Le rôle de sa petite-amie. Qu'est-ce qu'il mijote encore? C'est à en devenir dingue. On couche ensemble et il ose m'annoncer ça de but en blanc! Il aurait pu attendre quelques heures, non? Mais il fallait aussi que je demande. Idiote. Évidemment qu'il allait répondre un truc dans ce genre! Rappelle-toi que ce psychopathe n'a d'yeux que pour ta sœur. Il faut impérativement que je l'aide à guérir.

— Pourquoi as-tu besoin d'une actrice?

— Pour des projets personnels.

— Et je peux savoir quels sont ces projets?

— Tu le sauras bientôt.

— En passant, ça fait depuis longtemps que je suis ici. Je mérite peut-être que tu me mettes au courant de tes plans.

— Tu as raison. Je le ferai, mais pas aujourd'hui.

— Alors, quand?

— Quand le moment sera venu.

Arthur quitte ma chambre avec ses affaires et me laisse. De ma place, je peux voir que le soleil n'est encore tout à fait levé. Malgré une nuit fatigante avec lui, j'arrive encore à me lever à mes horaires. C'est la seule chose de normal qu'il me reste. Sinon, tout a changé. Et non, ce n'est pas un simple changement. C'est quelque chose qui ne devait jamais arriver. J'ai bravé les limites de mes principes et de mes interdits. Moi qui suis habituellement une tête de mule qui ne change jamais d'avis. Arthur à un effet malsain sur moi.

C'est comme une drogue. Quand on y goûte une fois, on en peut plus s'en passer. Ça en devient addictif. On en veut toujours plus. Je le déteste du plus profond de mon âme. Âme dans laquelle j'ai puisé pour crier son prénom entre deux gémissements. Je me déteste de penser à lui. Je me dégoûte de l'avoir laisser m'approcher. Mais en même temps, j'aime penser à lui. Et je ne regrette pas de m'être offerte à lui. Il a beau être obsédé par ma sœur, je sais que ce ne sera pas éternel.

Je vais l'aider. Quitte à tuer pour lui remettre les idées en place.

Pour la BêteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant