La Troisième Rive [ROMANTAISY]

25. La première âme (2)

25. LA PREMIERE ÂME (2)

Depuis que Clara a mal au ventre, tout est devenu plus difficile à faire. Elle a dû renoncer à ses heures de bénévolat auprès des aparios du centre de l'Est. Quoi qu'il en soit, cela l'avait tant attristé de voir certains de ces enfants finir tout de même à la rue, qu'elle préférait ne plus y retourner.

Les yeux du petit Alean tendant la main pour un peu de règnes la hantent encore, elle est bien à l'abris, dans son déni.

Il n'y a d'ailleurs plus là qu'elle est bien, là, et dans les bras de James.

Il est revenu, la nuit-même. Il a aidé sa nièce, comme prévu, mais n'a pas tenu longtemps loin de Clara. Quand la Protectrice a voulu comprendre ce qui était arrivé à l'héritière, il s'est contenté de marmonner : « Un mauvais rêve ».

Clara a trouvé ça adorable, qu'il se précipite au chevet d'Hélianne Kahn pour une chose aussi légère qu'un cauchemar.

Et James, lui-même, a un peu ri d'être aussi paternel.

Clara n'a jamais été mère, et ne le sera jamais. Elle ne peut pas tout saisir de leur lien. Parfois, James lui raconte qu'il doit « éduquer » Hélianne, même si ça lui coûte. Il n'aime pas la voir souffrir, il ne l'a avoué qu'à Clara.

Mais elle a mal au ventre, et rien ne la soulage complètement.

Au début, c'était un petit mal qui n'avait rien d'inquiétant. Une douleur revenant dans l'estomac, après les repas. Et puis c'est devenu plus récurrent. Alors elle en a parlé à James. Il avait déjà senti ses douleurs ponctuelles, et même, il lui a révélé qu'il les avait déjà calmées. Mais les maux deviennent impossibles.

Alors Clara d'Olivier va consulter, ce qu'on ne fait que très rarement, sur le Régent. Les maladies sont réservées aux plus pauvres, pas aux habitants des quartiers Est, Ouest et Nord.

Le premier soigneur qu'elle a voit, lui explique qu'elle doit stopper sa consommation de baies, que c'est pour ça que son ventre hurle si fort, et qu'il lui suffit de ne plus boire.

Oui. Sauf que Clara ne boit plus depuis six jours. Elle sait que ça peut prendre du temps. Elle décide d'attendre quelques jours de plus, il a sans doute raison, après tout, c'est un soigneur.

Deux semaines passent, sans que l'Araignée ne soit arrêtée, sans que rien n'ait changé sur le Régent, et sans que ses douleurs ne s'en aillent.

Un soir que James Hoffman lui consacre entièrement, sans se désintégrer d'un coup comme il sait le faire, il pose une main sur son ventre et cible :

— C'est là que tu as mal, Clara d'Olivier...

Il continue de l'appeler ainsi. Avec son nom de famille, comme si elle n'était pas qu'une personne, mais presque une entité ; elle aime bien qu'il l'appelle ainsi. Ça la rend entière.

James appuie sa main sur l'estomac. Une vague de chaleur, une sorte de tendresse concrète, incarnée sous la paume du Passeur, se propage dans les organes de Clara. Elle respire profondément.

Elle va mieux, là, tout contre lui. Il est parvenu à la soulager.

Et, pendant quelques temps, ils pensent, tous les deux, que cela suffira.

Mais il une nouvelle crise de douleur arrive, plus forte que les autres. Et cette fois, les mains de James n'y font plus rien.

C'est ensemble qu'ils se rendent dans un Centre. James l'accompagne à la bordure des quartiers Nord. C'est ici que se trouvent les meilleurs soigneurs de la région. Il a assuré à Clara avoir suffisamment de règne pour prendre en charge son traitement. Quel qu'il soit.