— Lorsque tu disais que tu t'étais noyée dans ta passion, tu parlais des courses ?J'hoche la tête, pensive. Mon regard se perd dans l'étendue d'eau qui ondule au rythme du vent déformant la surface du lac sur lequel se reflète la barrière d'arbres majestueux. La brise, en soulevant les grandes feuilles de chênes, crée une douce mélodie apaisante.
Je revoie mes premières courses. Je laisse les souvenirs remonter pour m'envelopper dans une douce étreinte douloureuse.
— Lorsque j'étais petite, mon père me faisait monter côté passager durant ses courses. C'est lui qui m'a transmis sa passion. J'étais ce qu'on appelle une fille à papa. Et lorsqu'il est mort, j'ai été anéantie et encore aujourd'hui, je ne suis pas sûre d'avoir fait entièrement mon deuil. Je n'ai pas encore accepté l'idée de ne jamais plus le revoir.
— Tu n'as jamais vu de psy ?
Le visage angélique de la femme à la douce odeur de roses apparait sous mes paupières closes. Et malgré sa voix rassurante, ses gestes doux, et ses yeux affectueux derrières de petites lunettes rondes, je redoutais toujours le moment où je devais m'assoir sur l'immense canapé rouge qui m'engloutissait chaque fois que je m'y asseyais. Je détestais devoir lui raconter encore et encore le soir de l'accident, mettre des mots sur mes sentiments, exprimer mes craintes à haute voix. Et pourtant, chaque fois que je me terrais dans le silence, son nez se retroussait dans une mine déçue qui avait raison de moi. Mais ce que je haïssais par-dessus tout, c'était de l'entendre me rassurer et m'expliquer que le temps arrangeait les blessures, que c'était un long périple mais que mon arrivée était proche.
— Bien sûr que si. Mais à part m'aider à gérer des crises d'angoisses, elle n'a été d'aucune utilité pour me faire avancer. Elle n'a jamais réussi à me donner ce que les courses m'apportaient.
— Tu étais jeune quand il est mort.
— J'avais treize ans. Alessio m'a pris sous son aile et a poursuivi la formation de mon père jusqu'à ce que je devienne une As du volant. Il a fait de moi celle que je suis aujourd'hui. Je passais l'entièreté de mon temps entre le garage et l'entrepôt. Même quand il n'y avait pas de course, j'y étais pour m'entrainer.
C'est à cette période que mes relations familiales ont volé en éclat. Ma mère refusait que je suive les traces de mon père, ce qui était à l'origine de nombreuses disputes, sans oublier ma relation avec ma sœur qui n'a cessé de pourrir.
Je me suis terrée dans la solitude, m'éloignant de Marlon par la même occasion. Mes amitiés d'écoles n'ont pas survécu à cette période compliquée. Seul Alessio pouvait me parler sans que ma haine déferle comme un tsunami ce qui rendait folle ma mère. Elle était jalouse du lien qui m'unissait à Alessio alors qu'elle, elle n'obtenait que des querelles, des cris et des pleurs. Je ne suis pas vraiment fière de mon comportement. J'ai tourné le dos à la femme qui m'a donné la vie, qui aurait pu perdre la sienne pour sauver la mienne, celle qui portait à bout de bras notre pauvre famille que je détruisais. Et pourtant, malgré tout, elle ne m'a jamais abandonnée.
Durant cette longue période, je n'étais que l'ombre de moi-même. Je me sentais vide. Ce sentiment d'abandon ne voulait pas me quitter et je cherchais par tous les moyens à me rapprocher de son fantôme. Et pour cela, les courses étaient le meilleur moyen. Alors oui, je me suis noyée dans ces dernières car elles étaient les seules à me rendre vivante.
— Je ne vivais que pour elles.
Je tourne la tête vers Ace qui m'observe. Ses yeux me sondent à la recherche de tout ce que je ne dis pas.
— Et encore aujourd'hui, tu ne vis que pour elles.
— Les courses, c'est hasta la muerte.
Ces paroles ont bercé mon enfance. Ce mantra appartenait à mon père et son meilleur ami mais c'était bien plus que ça, c'était une promesse entre eux.
![](https://img.wattpad.com/cover/349263277-288-k650171.jpg)
VOUS LISEZ
Hasta la muerte (terminé)
RomantiekEyana, connu sous le nom d'Imperious tient sa passion pour les courses illégales de son père. Mais sa mère, inquiète de la perdre elle-aussi, lui dégote un job en tant que chauffeur pour un millionnaire. Quand bien même, elle déteste cette idée, ell...