Chapitre 42

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La viande avait un goût terrible.


Et ce n'était pas seulement parce que les Illuminés avaient l'habitude de mets d'une qualité inimaginable cuisinés par des cuistots avec un réel don.

Peut-être était-ce la provenance de la bête, son alimentation, ou bien la triste manière dont elle avait perdu la vie à coup de fusil imprévisible, mais la chair était dure, acide, et piquait en bouche.

En voyant l'expression de dégoût affichée sur leurs visages, le marchand qui s'était présenté sous le nom de Jerry s'excusa auprès de François, Anatole et Alice.

" Désolé pour ça. On croise pas beaucoup d'animaux ici, et ils ont que dalle à manger, alors j'imagine qu'ils doivent se nourrir de tout un tas de déchets. Je suppose que d'où vous venez, la bouffe est bien meilleure. "


Assis en tailleur, le guide des élus s'étouffa bruyamment sur ces derniers mots, attirant tous les regards sur lui.

Son ami de longue date lui donna une tape dans le dos pour le calmer, tout en essayant de contenir sa propre peur, ses doutes et son anxiété qui commençaient à le submerger.

À travers les flammes, on percevait Alice devenue livide, lançant des signaux d'alarme à sa compagne de route déjà prête à agir.

Tandis qu'entre eux, un heureux se régalait.


" Oh, tu sais Jerry, quand on a faim, on a faim. Par contre, c'est la première fois que je mange du coyote. Je crois d'ailleurs que rien ne s'en rapproche autour de chez nous, qu'en pensez-vous ? demanda Ricardo au reste du groupe sans noter l'absurdité de la situation.

- Qu'est-ce que tu racontes, bien sûr qu'il y a des coyotes. Tu ne les vois pas, c'est tout, insista Salomé en lui faisant les gros yeux.

- Eh bien... je suis presque sûr que non, affirma-t-il à nouveau en réfléchissant intensément.

- Alors comme ça, elle existe vraiment... " affirma Jerry à toute attentes, rêveur.


Anatole avait les sourcils froncés, et François qui le connaissait très bien lu dans ses traits qu'il était en train de chercher activement une solution pour camoufler la vérité de leur présence ici. Cependant, sans savoir vraiment pourquoi, il posa sa main sur son épaule afin de retenir cette impulsion. Il avait l'impression que cette erreur était à commettre, et qu'elle pouvait les mener sur de bonnes pistes s'ils savaient en gérer la pression des conséquences.


Devant le mutisme collectif et leurs mines renfrognées, le moustachu reprit en marchant sur des œufs :

" Ne vous en faîtes pas, je suis au courant. Je... je serais discret, j'dirais rien promis. Vous savez bien qu'on vient me voir pour avoir des infos sur les gens de passage, mais j'dirais pas un mot.

- Comment ça, tu es au courant ? demanda prudemment le meneur suspicieux en plissant les paupières pour scanner son opposant.

- Pour l'Académie. Je sais. D'autres Nettoyeurs sont passés il y a quelques semaines. C'était quoi leurs noms déjà ?... bon sang. Je n'sais plus. En-tout-cas, ils étaient comme vous, affiliés à une unité. Ils n'étaient pas solitaires. Enfin, peu importe. Ils traversaient le désert depuis un bail, et comme la plupart de vos collègues, se sont arrêté pour se réapprovisionner. On a bien bu ce soir-là, et l'un d'eux a commencé à parler d'une de vos factions établie un peu plus au nord, où ils essaient d'éduquer la crème de la crème pour en faire une sorte d'élite. Des intellectuels qui vivent le jour dans des structures tempérées. Je vous avoue qu'au début, j'y croyais pas. Mais en voyant vos tenues à vous trois, et vos façons de parler bien éduquées là, j'ai tout de suite compris. "

L'éveil des IlluminésOù les histoires vivent. Découvrez maintenant