Les filles se font dorer sous les rayons embrassants du soleil. Robert est tombé comme une masse, il dort profondément à côté, je crois que de conduire pendant plus de quatre heures l'a épuisé. Les garçons se font une partie de beach volley, Sam et Roy contre Pete et James. Je ne suis pas la partie parce que je m'amuse à patauger dans l'eau tiède, mais de là où je suis j'entends très bien que c'est l'équipe de mon frère qui est en train de gagner, avec un allié comme Roy ce n'est pas étonnant.
Je m'allonge sur le ventre dans l'eau en laissant les mouvements de la mer m'humidifier jusqu'au creux de mon dos. J'observe ainsi les grands sportifs se donner à fond. James n'a rien perdu de son corps d'athlète que je lui connaissais, j'ai même l'impression qu'il est plus musclé que dans mes souvenirs et je n'arrive pas à empêcher mes yeux de lécher son corps doré. Stupide James ! Je me redresse et je m'éloigne un peu plus dans l'eau. Je ne sais pas à quoi je veux jouer, mais j'ai profondément envie de m'abandonner à mes désirs. Je sais que c'est mal et j'ai la peur constante de replonger dans ce qui m'a fait le plus souffrir dans ma vie. Je laisse mon corps étendu flotter dans l'eau. Je ferme mes yeux parce que malgré mes lunettes je ne veux pas me bruler la rétine et j'ai les yeux déjà suffisamment sensibles à la lumière. Je me sens comme un bouchon de liège à la dérive, la comparaison n'est pas des plus poétiques mais c'est comme si soudainement plus rien ne me pesait. Mes oreilles sous l'eau captent seulement le silence du moment, je suis bien, je pourrais presque m'endormir.
C'était sans compter sur l'énorme masse qui appuie sur mon corps et me noie pendant quelques secondes avant que je ne me remette debout sur le sable, je tousse un peu d'avoir bu l'eau salée, je me passe ma main sur mes yeux et je replace mes lunettes de soleil.
— Mais t'es taré ! pesté-je.
— Il faut bien que je vienne prendre soin de mon petit ami, sourit Roy.
Je lui saute dessus mais malgré toute ma bonne volonté il est plus fort que moi et la plume ne l'emporte jamais contre le plomb alors il me coule à nouveau. Nous restons encore quelques minutes à nous chamailler dans l'eau en riant comme des enfants.
*
Je finis de me laver et coupe l'eau. Qu'est-ce que ça fait du bien ! J'ai ramené au moins cinq cent grammes de sable de la crique. J'essore mes cheveux et m'enroule dans ma serviette. Je me penche par-dessus le lavabo et j'essuie la buée qui a voilé le miroir. Et merde ! Je vois mon reflet et je suis forcé de constater que j'ai pris un coup de soleil sur le nez. J'ai la trace de mes lunettes et le nez et les épaules totalement rouges. Ce n'est pas comme si Leah m'avait proposé sa crème que j'ai gentiment décliné. Fait chier !
Je me mets du déodorant et je sors de la salle de bain. Roy se précipite à son tour dans la pièce pour se laver alors que je rentre dans notre chambre. Je reste dos à la porte et enfile un boxer puis un jean noir. Des coups frappent à ma porte et je me retourne pour voir James dans l'encadrement. Je m'arrête un instant et souffle avant de croiser les bras sur mon torse.
— Qu'est-ce que tu veux encore ?
Il referme la porte derrière lui et il s'approche de moi. Je commence à lever la main pour lui signaler qu'il ne doit pas faire un pas de plus, mais il s'arrête de lui-même à deux pieds de moi.
— Je veux te parler et je ne sortirai pas d'ici tant que je ne l'aurai pas fait.
Mon regard se durcit et je fronce les sourcils.
— Ne me fais pas cette tête s'il te plait.
— Quelle tête ?
— Celle-ci.
— C'est mon faciès normal.
— C'est faux ! Ton visage est doux et ton regard chaleureux.
— Ce visage-là ne t'es plus destiné !
— Tu admets donc que tu changes de visage pour moi. Et si je te laissais me dire tout ce que tu as sur le cœur ? Tu veux bien m'écouter ensuite ?
Je réfléchis quelques instants. Lui vomir des immondices en pleine face me semble une bonne idée mais je refuse. Je n'ai pas envie de lui montrer que depuis toutes ces années ma rancœur n'est pas partie et que j'éprouve encore un quelconque sentiment envers lui, même si c'est de la colère.
— Est-ce que Sam est au courant pour le club de striptease ?
— Tu t'inquiètes de savoir si mon frère sait que je tortille du cul pour de l'argent ?
Son regard est tendre, mais son insistance m'indique qu'il exige une réponse plus claire que celle-ci. J'abdique en soufflant encore.
— Sam sait seulement que je travaille dans une boîte de nuit, lorsqu'il m'a demandé laquelle je lui ai dit qu'elle se situait dans le quartier sud, mais qu'il n'avait pas à s'en faire parce que la paie est bonne.
— Et c'est vrai ?
— Je touche treize livres de l'heure sans compter les pourboires, donc ça dépend des soirs.
— Ça fait longtemps que tu travailles là-bas ?
— Environ six mois, autre chose ?
— Est-ce que tu couches pour de l'argent ?
Le silence s'installe, je ne m'attendais pas à cette question. Je suis partagé entre la joie qu'il s'intéresse à moi et qu'il semble s'inquiéter, et le dégoût qu'il pense si peu de moi. Après tout ce qu'on a vécu c'est comme ça qu'il me voit à présent ?
— A ton avis ? dis-je dans le défi.
— Je ne sais pas, à toi de me dire, fait-il en se rapprochant.
— Combien tu me donnerais pour mon cul ? C'est ça que tu veux savoir ? Quel est mon prix pour que je veuille te laisser me toucher ?
Je me rapproche de lui, mais je ne peux pas le surplomber parce qu'il est toujours plus grand que moi seulement je ne lâche pas son regard, mon visage est très proche du sien.
— Hein James, combien tu me proposes pour que je sois à toi à nouveau ?
Il attrape mon visage en coupe et mon assurance descend crescendo, mon cœur pulse dans mes tempes et mes jambes deviennent molles. L'air dans mes poumons se fait plus rare comme s'il m'était impossible d'inspirer. Mes mains viennent s'agripper autour de ses poignets mais je suis incapable de les éloigner. Mes yeux s'accrochent aux siens, on se cherche, on se questionne, on lutte tous les deux contre la magnétisation qui vient nous rapprocher comme des aimants. Je sens le souffle de son haleine sur mes lèvres, il est si chaud qu'il me brûle presque. Stupide James ! Qu'est-ce que tu attends ?
La porte de la salle de bain s'ouvre et je trouve la force de le repousser doucement avant que Roy ne rentre à nouveau dans notre chambre. La tension est palpable et mon meilleur ami a les yeux qui tirent à balles réelles en direction de James.
— Tout va bien ? demande-t-il.
En même temps, il nous trouve l'un en face de l'autre raide comme des piquets, le rouge aux joues, l'air coupable et je suis toujours torse nu. Pour ma gouverne, je suis content d'avoir pris un coup de soleil à cet instant, au moins je peux couvrir un tant soit peu la honte d'avoir failli flancher.
— Oui, pourquoi ça n'irait pas ?
Je joue la carte du faux innocent, même si je sais que Roy me connait par cœur, et qu'il déteste James, il semble croire à mon mensonge.
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Stupide James ! [MM]
RomanceA Londres, depuis quelques temps, James a pris l'habitude de faire faux bond à sa bande d'amis, préférant se faire absorber dans le tourbillon du "métro, boulot, dodo". Il finit par accepter de les rejoindre lors d'une soirée, seulement James ne s'...