Ça ne fait même pas une heure que je suis réveillé mais quand j'ai vu que j'étais seul dans le lit, puis dans l'appartement j'ai commencé à paniquer. Je n'ai pas le numéro de River pour le contacter. Il avait pris ses chaussures et seuls nos restes de nouilles chinoises restés sur le plan de travail de la cuisine m'ont indiqué que je n'avais pas rêvé les évènements de la veille. J'ai passé une nuit magique à ses côtés, nous avons fait l'amour, regardé un film. J'aimerais que toutes mes soirées se passent ainsi, à l'enlacer dans mes bras, à l'admirer s'endormir pour que mon cœur apaisé s'abandonne à un sommeil réparateur.
— Promets-moi de ne plus jamais partir, dis-je presque en chuchotant.
Il se retourne pour me faire face et lève sa tête pour me laisser me noyer dans son océan de tendresse. Il pose sa main délicate sur ma joue barbue et un sourire se dessine aux coins de ses lèvres.
— Promets-moi alors de ne plus jamais me laisser.
— Plus jamais, dis-je.
— Plus jamais, répond-t-il.
Je me penche sur lui pour l'embrasser mais je n'ai pas le temps d'approfondir le baiser que nous sommes interrompus par la sonnerie aiguë de son téléphone.
Il s'écarte de moi, prend son téléphone dans sa poche. Je peux voir qu'il hésite avant de décrocher. Il prend l'appel en répondant d'un air jovial. Il pose la boite qu'il a dans les mains sur le plan de travail de la cuisine et son sourire s'éteint lentement. Il s'assoit sur une des chaises hautes et je l'observe du coin de l'œil. Je nous sers du café dans des tasses, je rajoute beaucoup de lait et du sucre pour lui. Il raccroche rapidement et sa voix brise le silence.
— Je n'ai pas eu le job.
Il s'accoude sur la table et cache son visage dans ses mains, il souffle en remontant ses mains dans ses cheveux tout ébouriffés. Je m'approche de lui pour venir l'enlacer sur le côté.
— Je peux essayer de parler à mon directeur, est-ce qu'ils ont dit pourquoi ils ne te prenaient pas ?
— Elle m'a dit que j'avais un très bon profil, que j'étais motivé et qu'il ne fallait pas que je baisse les bras. Ils ont pris quelqu'un qui avait eu une expérience similaire au poste.
— Tu trouveras autre chose, dis-je pour le rassurer.
— Je ne peux tout de même pas mettre sur mon résumé que j'ai de l'expérience en tant que serveur dans un club de striptease.
Il me regarde comme si j'étais celui qui lui avait refusé le poste, ses yeux sont sévères. Je lève la main pour la passer dans ses cheveux hirsutes.
— Ça dépend, si tu veux travailler dans les clubs ça peut toujours servir, souris-je pour le détendre.
— James ! Ce n'est vraiment pas drôle. J'ai postulé à environ une quarantaine de postes, c'est le seul avec un salaire correct qui ait bien voulu me faire passer un entretien. J'avais envie d'un boulot stable pour que.
Ses yeux sont pris d'une tristesse que j'ai le temps de voir avant qu'il détourne le regard en baissant à nouveau sa tête dans ses mains.
— Pour que ? demandé-je.
Il ne se redresse pas et reste à visage couvert, sa voix est si faible que je me remercie de ne pas être sourd pour l'avoir entendue.
— Pour pouvoir être quelqu'un de présentable quand je reviendrais à toi.
Mon cœur se serre. S'il comprenait à quel point j'estime qu'il est quelqu'un de présentable. Je me penche pour m'accouder sur la table à ses côtés, je chuchote à son oreille.
— River, tu n'as rien besoin de me prouver.
Il redresse sa tête subitement la tête, la douleur et la peine ont pris possession de ses doux traits, les larmes aux yeux.
— Au contraire, j'ai tout à te prouver. Je ne suis qu'un minable qui n'a même pas fini ses études. Je sors à peine d'une relation toxique et pourtant je viens de coucher avec mon premier amour. Mes parents m'ont mis dehors parce que je faisais n'importe quoi, ça doit faire au moins un an que je ne les ai pas revus. Sam et Robert m'auraient mis dehors parce qu'ils vont se marier et que je ne dois pas venir embrumer leur bulle de bonheur. Je faisais un travail dégradant et pourtant il payait bien. Je n'ai bientôt plus de logement, je n'ai toujours pas de travail à moins d'aller plonger des frites dans de l'huile, payé une misère, personne ne veut de moi parce que je n'ai pas de diplôme, pas d'expérience importante.
Il se relève de sa chaise sans ménagement, une des larmes qu'il retient coule sur sa joue, je fais un pas vers lui, mais il lève les bras pour ne pas que je m'approche. Ses yeux peints de douleur se fixent sur moi et je suis comme immobilisé par tant de mal.
— Tu es revenu trop tôt James ! Je devais être bien pour toi.
— Tu es bien pour moi River.
— Un ancien drogué, un ancien serveur en mini short. Regarde ce que tu es devenu James. Tu as un travail honorable, tu vis ici dans cette espèce de loft. Regarde ce que je suis. Sean avait raison, je ne mérite rien, je ne suis qu'un raté. J'aurais mieux fait de me choper le sida que ce connard a essayé de me refiler au moins j'aurais eu une bonne raison pour avoir une vie de merde.
Il se dirige d'un pas assuré vers la porte d'entrée et mon cerveau se souvient soudainement que je ne dois pas le laisser faire. A grandes enjambées je le rattrape, plaque ma paume sur la porte au niveau de son visage avant qu'il ne réussisse à ouvrir la porte, alors qu'il essayait de s'échapper. Je me rapproche de lui en le retenant d'un bras autour de sa taille. Je colle mon torse contre son dos.
— River... Tu m'as promis de ne plus jamais partir.
— Tu serais mieux sans moi.
— C'est faux. On a déjà essayé et je préfère quand tu es là.
Sa main qui est toujours sur la poignée tombe alors mollement le long de son corps. Il se retourne lentement pour me faire face, mais il plonge son visage dans mon cou. Ses bras me serrent fortement et je sens les secousses de ses pleurs. Je caresse son dos en déposant de doux baisers sur le haut de son crâne. Ses mains descendent sur mes hanches et il relève la tête. Les contrastes entre ses yeux rougis et ses iris bleus est envoutant. La couleur est encore plus vibrante, elle m'absorbe entièrement. Son nez et ses lèvres sont encore plus roses. Je ne devrais pas, mais je le trouve totalement adorable. Je ne peux retenir mon envie de le réconforter et de le retenir contre moi. Je le plaque doucement contre la porte et je l'embrasse. Sa langue vient directement retrouver la mienne. Je les pousse dans sa bouche en prenant le dessus, je les laisse danser ensemble jusqu'à ce que je mette fin à l'échange pour reprendre mon souffle, je colle mon front contre le sien.
— Tu ne me lasseras plus ? chuchote-t-il.
Je souris en l'observant, j'ai envie de le taquiner. J'embrasse le bout de son nez avant de lui pincer la hanche.
— Il est là l'adolescent que j'ai laissé il y a quatre ans.
Il fronce les sourcils en me tapant le torse faisant mine de bouder. Il pince la bouche de façon adorable avant de ne plus pouvoir retenir son sourire.
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Stupide James ! [MM]
RomanceA Londres, depuis quelques temps, James a pris l'habitude de faire faux bond à sa bande d'amis, préférant se faire absorber dans le tourbillon du "métro, boulot, dodo". Il finit par accepter de les rejoindre lors d'une soirée, seulement James ne s'...