Chapitre 17 - Partie 2

358 44 34
                                    

En haut, je refermai la porte du sous-sol derrière moi. Nous n'étions pas restés si longtemps que ça en bas, pourtant, c'était tout comme. Isaac était revenu de sa mission bâche, en pleine discussion avec sa mère au sujet d'une plante en pot à moitié mourante, et Joël installé sur le canapé à lire un magasine de sport. Un coup d'œil à l'horloge posée sur la cheminée et je décidai d'aller me réchauffer dans un bain. Les escaliers chuintèrent sous mes pas. Les portes grincèrent plus ou moins fort et les poignées rondes cliquetaient quand on les manipulait. En cas de catastrophe naturelle, prendre un bain n'était certainement pas la chose à faire. Mais la tempête relevait plus du sinistre que de l'alerte générale. Joël m'avait fièrement expliqué que le chalet s'alimentait en eau via un puits, lui-même puisant une source saine coincée entre deux parois rocheuses étanches.

La vapeur envahit la pièce et je me glissai dans le bain. Ma peau me piqua au changement brutal de température, rougissant à vue d'œil. La salle de bains était immense ; une douche à l'italienne courait le long du mur, en face de la porte tandis que je me baignais dans la baignoire d'angle de l'autre côté. Deux grandes fenêtres inondaient la pièce de lumière, même par temps de pluie. Les meubles modernes et les couleurs cocooning rendaient l'endroit confortable. Je stoppai l'arrivée d'eau et m'immergeai dans cet écrin parfumé et enivrant. Demain, nous pourrions rentrer sur Asheville. J'allais encore manquer la fac mais tant pis. Il fallait que je vois avec Isaac pour faire un crochet chez ma mère, m'assurer que tout allait bien.

Avachis dans la baignoire, seul avec mes pensées et la pluie battante contre les vitres, des grincements s'ajoutèrent au ballet. Un à un, les craquements du bois s'amplifièrent pour s'arrêter. Le « clac » de la poignée résonna, suivit de la plainte des gonds. Je ne bougeai pas lorsqu'Isaac referma derrière lui aussi discrètement que possible alors que nos regards se trouvèrent. Il délaissa ses chaussons, retira ses chaussettes et amortit la chute de ses vêtements, dont il se délesta, debout sur le tapis au milieu de la pièce. Curieux, gêné et pourtant attiré, je glissai une œillade ou deux à ce corps nu offert à ma vue. Le vent s'excita contre les vitres, projetant les volets contre les murs de la bâtisse sans parvenir à les décrocher. Je ne pus dire si les bruits sourds qui suivirent furent aussi le vent, peut-être la pluie, ou mon cœur prêt à exploser de l'intérieur. Isaac entra dans l'eau du bain, insensible à la morsure de l'eau fumante. Peut-être que sa carapace de givre était si épaisse que même de la lave ne pouvait la faire fondre.

La baignoire était assez large pour nous deux. Il s'installa en face de moi, étendit ses jambes sans me gêner. La mousse à la surface censurait nos visions. Loin d'être grossier, le tableau dépeint n'était que subtilité et sensualité. Au moins du côté d'Isaac. Ce week-end loin du bureau ne l'avait pas plus reposé. Des cernes bleuissaient toujours son visage et sa ride du lion se creusait entre ses sourcils. Ses cheveux, si noirs, étaient ponctués de filaments blancs. Plus nombreux que dans mes souvenirs.

Je me redressai un peu, mes épaules dégoulinantes d'eau parfumée, le visage incliné vers le bas.

— Je... Je pense que cette histoire de polyamour n'était pas une bonne idée.

Je déglutis et enchaînai pour ne pas être coupé.

— J'ai été égoïste. Je ne voulais pas choisir alors je ne vous ai pas donné le choix. Je pensais que ça pouvait marcher. Vraiment. Tu n'y étais pas opposé, alors je me suis dit que c'était possible, que je pouvais vous avoir en même temps.

Je marquai une pause, repliant mes jambes contre mon torse. La vapeur flottant autour de nous témoignait de la température de l'eau. Pourtant, le froid me ravageait. Une chair de poule apparut le long de mes bras et je me recroquevillai pour contenir mes tremblements.

Nos Amours aux Parfums de GlaceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant