Une cuillère en bois me frappa le haut du crâne, m'arrachant à mes pensées.
— Eh ! Ma tête n'est pas un champignon sur lequel il faut appuyer, protestai-je en me tournant vers Isaac, occupé à faire cuire... je ne sais quoi.
Il ne dévia pas une seconde le regard, plantant ses yeux bleus dans les miens, impassible, indéfectible. J'adorais leur couleur pareille à un ciel d'orage, surmontés de sourcils noirs, droits et durs, contrastant avec son teint pâle de bureaucrate. Dommage qu'il fronce trop souvent les sourcils, lui créant des rides avant l'heure.
— Un champignon ? répéta-t-il .
Là ! Il fronça les sourcils comme tout le temps et une ride du lion apparaissait, le vieillissant.
Il inspira, prêt à ajouter quelque chose, se ravisa et secoua la tête. Sa cuillère en bois toujours en main, il retourna à sa poêle, dos à moi.
— Je te parlais de vendredi soir. Il y a un feu d'artifice organisé au French Broad River Greenway. J'aurais bien aimé qu'on y aille ensemble.
— Ah... J'ai déjà quelque chose vendredi soir.
— Vraiment ?
J'hochai la tête. Sur mon portable, Rylan me harcelait justement par rapport à la soirée de vendredi. De ce que j'en comprenais, elle aurait lieu dans le quartier huppé de Montford Area Historic District, à quelques pas de l'université. Je m'y étais déjà promené quelques fois, notamment pour le côté histoire. L'écrivain Thomas Wolfe y était enterré, tout comme O. Henry. Deux grands noms que les étudiants en lettre devaient sans doute connaître, mais qui, pour ma part, m'ennuyaient à lire. Je ne les dénigrais pas pour autant. En tant qu'auteur, je respectai ces hommes qui avaient su marquer l'histoire dans le domaine précaire qu'était l'écriture. D'ailleurs, à chaque fois, j'y avais été avec Isaac. Les longues promenades tranquilles étaient nos sorties. Là où je déambulais dans des galeries d'art ou les musées en compagnie de Glen, je marchais autour du Lac Beaver, arpentais l'arboretum ou allais boire un verre au bord de la rivière French Broad avec Isaac. Cette soirée allait tout sauf être tranquille et silencieuse. Les étudiants, surtout ceux venaient des beaux quartiers, ne connaissaient pas la mesure.
Un feu d'artifice au bord de la rivière m'aurait plus tenté si je n'étais pas autant curieux de découvrir qui était l'amoureuse de Glen.
— Une soirée où vont Glen et Rylan, expliquai-je distraitement.
Rylan m'envoya des photos de la soi-disant maison où se dérouleraient les festivités. Ça n'avait rien d'une maison.
— Enorme !
Le bruit de la chaise tiré devant moi ne suffit pas à me tirer des clichés. C'était dingue rien qu'en photo, alors en vrai, ça allait être dément.
— Depuis quand tu vas à des fêtes étudiantes quelques jours après la rentrée ? Est-ce que ce n'est pas tout ce que tu détestes ? Du monde, de la musique à fond, de l'alcool, de la drogue.
— Arrête, je vais pas me bourrer la gueule ou me droguer si ça t'inquiète, dis-je en relevant le nez de mon portable.
Bien sûr, mes mots ne suffirent pas à le rassurer. Isaac me servit une assiette de légumes grillés, du poulet mariné, et des féculents en plus. Un repas équilibré, bien loin de ce que je pouvais faire lorsque je ne mangeais pas à la cafète ou à l'extérieur.
— Tu crois que je ne sais pas comment ça se passe ?
Sans doute. Il avait été étudiant avant moi, même si je ne l'imaginais pas à ce genre d'évènement. Déjà que pour Glen, je galérais, alors Isaac, à part assis à un bureau, chez moi ou à marcher à mes côtés, impossible de le voir ailleurs.
VOUS LISEZ
Nos Amours aux Parfums de Glace
Romance« 𝘌𝘵 𝘥𝘰𝘯𝘤 ? 𝘘𝘶𝘦 𝘴𝘶𝘪𝘴-𝘫𝘦 𝘦𝘯𝘵𝘳𝘦 𝘭𝘢 𝘷𝘢𝘯𝘪𝘭𝘭𝘦, 𝘭𝘦 𝘤𝘩𝘰𝘤𝘰𝘭𝘢𝘵 𝘦𝘵 𝘭𝘢 𝘱𝘪𝘴𝘵𝘢𝘤𝘩𝘦 ? » Lee écrit, va à l'université, se moque d'Isaac qui parle à ses plantes d'intérieur, et aide Glen à laver ses cheveux tachés d...