BE MINE I

Chapitre 6

Je refuse de m'être donné tant de mal à me faire belle pour finir recroquevillée sous un plaid devant Vampire Diaries, pendant que ma coloc s'éclate dans les bras d'un énième inconnu.
Non. Pas ce soir. Si je dois rentabiliser les heures passées devant le miroir, autant affronter Jim -même si je ne le porte pas dans mon cœur- plutôt que de rencontrer l'inconnu de l'application que Sarah m'a convaincue d'installer. L'échange m'a laissée amère, et la bouteille de vin n'a rien arrangé.

Je souffle longuement. Tout est calme. Trop calme. Les lumières tamisées créent une ambiance feutrée dans le salon, mais mon cerveau ressasse encore ce foutu tchat. Pourquoi suis-je partie si brutalement ?

Parce qu'il était plus facile de fuir que de prendre le risque d'être déçue.

Je relis nos messages. Ils paraissaient innocents, trop beau pour être vrai, mais petit à petit, le doute s'est installé. Peur qu'il ne cherche qu'à s'amuser, de n'être qu'un corps à souiller. Je n'ai jamais été douée pour lire entre les lignes, préférant resté dans mon coin. Alors oui, j'ai coupé court.  Peut-être n'auras-je pas dû, peut-être pas. Au fond, je n'en sais rien.

Mon invité toque à la porte, et il suffit de le voir rayonner d'excitation pour ressentir ce terrible nœud de trac dans l'estomac.

- Tu as bu, constate-t-il avant d'entrer sans y avoir été invité.

- Surtout fais comme chez toi, je rétorque pour masquer ma nervosité.

Le beau blond me détaille longuement sans se défaire de mes cheveux relevés et de ma tenue qui change des robes en latex, et du maquillage superficiel.

- Tu es belle, finit-il par lâcher en fuyant mon regard comme si l'admettre le mettait mal à l'aise.

Serait-ce de la timidité ou une tactique subtile de m'appâter ? Mon instinct hurle de rester sur mes gardes. Alors je croise les bras, aussi troublée par son charme - que j'attribue à l'alcool - , que par le respect inattendu qu'il me témoigne. Au club je n'étais qu'un morceau de viande. Ses regards lubriques, ses commentaires désinvoltes me réduisaient à un objet, mais là c'est différent. Ses yeux ne sont plus aussi voraces. Ils sont doux, presqu'admiratifs.

Pourquoi ce revirement ? Une partie de moi veut y croire, mais mieux vaut taire ce sentiment. Est-ce simplement la situation qui me rend vulnérable, ou y a-t-il quelque chose entre nous ? Une chose est sûre, sa présence éveille en moi des émotions que je n'avais pas prévues. D'ailleurs, pourquoi l'aurais-je invité si je ne ressentais rien pour lui ?

- Je ne suis toujours pas intéressée ! Je réponds sèchement.

Il éclater de rire.

- Qu'il y a -t-il d'amusant ? Je rougis de colère, sentant mes défenses s'effriter.

Il veut dire quelqu'un chose mais se ravise en voyant ma mine renfrognée, peu encline à la discussion.

- J'ai des défauts c'est vrai, mais je ne suis pas le salaud que tu crois. D'ailleurs j'aurai payé pour avoir ce rencard si Nathan ne m'en avait pas empêché.

Mon cœur rate un battement.

Nathan.

Enfin, je connais le prénom de l'homme au visage tourmenté. Ce même que je tente d'oublier depuis deux semaines. Une étrange chaleur, que je m'empresse de réprimer, envahit ma poitrine. Aucun homme n'a hanté mes pensées de la sorte, or je sais cette attirance purement bestiale. Seulement, ce Nathan est l'ami de Jim qui me dévore à présent des yeux, trahissant la multitude d'émotions qui l'habitent. Cela aurait pu me faire craquer, si mon attention ne se serait pas porté sur l'accessoire à son doigt.