Tony Rivera

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– Regarde, Tony encore un macchabée. Je regarde la direction que m’indique mon nouveau compagnon de cellule avec une indifférence que je ne prends même pas la peine de dissimuler. Ça fait 5 mois que je suis enfermé dans cet endroit et ce genre de spectacle est tellement courant que c'en est devenu banal, presque barbant.

Dans la prison de haute sécurité de Rome, en moyenne, trois personnes meurent par jour. Ceux qui sont enfermés ici sont les criminels les plus dangereux du pays, condamnés pour la plupart pour des crimes inimaginables. Ils ne sortent de cet endroit que les pieds devant. Mais ça, mon compagnon de cellule qui vient à peine d’arriver aura tout le temps de le découvrir, si je ne le tue pas avant. Je me détourne du spectacle des gardiens qui traversent les couloirs avec un corps recouvert d’un drap gris sur un chariot. Je me demande pourquoi ils le recouvrent. Ceux qui sont enfermés dans cet enfer ont vu pire. C’est sûr que des nécrophiles ne vont pas s’évanouir à la vue d’un cadavre. D’ailleurs, le type dans la cellule en face de la mienne réussit à tirer le drap. Le regard fou, il commence à se masturber en regardant le mort.

Il frappe plusieurs fois sa tête contre les barreaux de sa cellule, sa main s’acharnant de plus en plus vite sur sa bite. Son visage est en sang, mais c’est comme s’il ne sentait pas la douleur. Je pousse un soupir, ils devraient penser à nous donner des pop corns avant ce genre de spectacle. Une chose est sûre, le psy qui s’occupe des détenus ne doit pas s’ennuyer.

J’observe mon nouveau compagnon de cellule. J’ai tué l’ancien suite à une crise de psychose. Ce n’était pas une grosse perte, ce fils de pute avait essayé de me foutre sa bite au cul alors que je dormais.

Jack regarde le taré d’en face qui hurle de plus en plus fort alors même que le mort qui l’excite tant s’est éloigné. Il fait jaillir un filet de sperme dans un feulement féroce. Le pauvre Jack, qui est sûrement plus humain que moi, a un haut-le-cœur. Il se précipite vers les chiottes et se met à vomir.

– Pourquoi es-tu là ? Je questionne quand il termine enfin de se vider l’estomac. Il se rince la bouche. Je plisse des yeux quand il tente de poser son cul sur mon lit. Le gamin blêmit et retourne à sa place.

– Je n’en suis pas fier, mais pour vente de substances illicites.
– Tu n’es pas fier d’avoir vendu des substances illicites ou de t’être fait chopper ?
– D’en avoir vendu évidemment.

D’où il sort ce type ? Non, ça n’a rien d’évident. Moi, je serais mort de honte de me faire chopper pour ça.

– Et toi, pourquoi es-tu là ? Je fais mine de réfléchir. Je pourrais lui donner plein de raisons, mais je lui donne la plus simple.
– Mon paternel est un con.

Dire que Giouse Gaviera est un con, c'est un putain d’euphémisme, mais j’espère pour lui qu’il a tenu sa promesse comme je m’efforce de tenir la mienne. Sinon, père ou pas, la mer sicilienne sera rouge de son sang.

– Tu as tué ton paternel ? Demande le gamin aux cheveux blonds qui tirent au jaune. Il est grand et maigre, avec des yeux presque translucides et une peau couverte de boutons. Ce n’est pas dans ce bahut que son acné va s’arranger. Voilà à quoi ressemblent les enfants qui se privent de manger 5 fruits et légumes par jour. Je retiens de justesse un rire.
– Les questions m’agacent et je tue ceux qui m'agacent. Il devient blanc comme neige et se recroqueville dans son lit qui est en face du mien. Sa réaction me tire un sourire en coin.
– Je rigole mon pote.

En fait, non, je ne rigole qu'à moitié, mais il n’a pas besoin de le savoir. Je suis là depuis 5 mois et Jack est mon quatrième compagnon de cellule. Je suis, paraît-il, difficile à vivre, même pour des criminels de haut niveau. Le gamin soupire, ce qui fait gonfler sa maigre poitrine.

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