Riccardo

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20 minutes plus tard, je me gare devant le restaurant. Gayle, assise à côté de moi, s’impatiente. J’ai noué l’une de mes cravates pour lui bander les yeux.

– Nous sommes arrivés ?

– Oui, alors tu as deviné de quel restaurant il s’agit ?

– J’en sais rien. Un 5 étoiles, j'espère que c’est un restaurant français. Sans vouloir me vanter, on fait les meilleurs desserts.

Je descends en premier et l’aide à sortir. Elle a eu le temps de retirer sa combinaison pour mettre la robe bleue qui se noue à l’arrière du cou. Ses cheveux sont retenus en un chignon haut.

– Je peux regarder ?

– Une minute. Je me mets derrière elle et retire le bandeau.

Elle ouvre les yeux, regarde autour d’elle, son visage se décompose, puis elle me regarde. C’en est trop, je suis plié en deux. Je ris tellement que la douleur que je ressens au ventre à cause des coups reçus en prison revient en force.

– Tu m’as emmenée dans un KFC ? Tu avais dit qu’on irait manger dans un grand restaurant. Elle s’ecrie en pointant sur mon visage un doigt accusateur.

– Non, j’ai dit que je t’emmenais manger dans l’un des restaurants les plus connus au monde. Voilà qui est fait.

– Oh, mon Dieu, tu n’es qu’un clochard, ce n’est pas possible !

Mon rire redouble. J’en ai les larmes aux yeux. J’ai préparé ce coup toute la journée, j’aurais dû filmer sa réaction.

– C’est un coup bas. Je me suis préparée pendant une heure entière. Mon rire est tellement contagieux qu’elle craque et se met à rire. Les passants nous regardent comme si nous avions perdu la tête. Je prends une grande inspiration avant de prendre un mouchoir et de me tamponner les yeux.

– Allez, viens, je n’ai jamais mangé dans un KFC. Elle me prend la main et on remonte l’allée qui mène au restaurant.

– Moi si, je vais t’aider à choisir. On peut s’asseoir dehors, il fait un peu froid mais la nuit est belle. Je regarde autour de moi, le froid ne me dérange pas. Mais un tireur pourrait facilement nous atteindre. Gayle semble lire dans mes pensées, elle hausse une épaule.

– Tant pis, l’essentiel c’est de manger.
On trouve néanmoins une place près de la baie vitrée. Ça ne me rassure pas du tout, ce genre de verre ne résiste pas aux balles.

– On devrait se mettre là-bas.
Gayle regarde la direction indiquée par mon doigt. Il y a une famille juste à côté, leurs enfants n’arrêtent pas de hurler. Je grimace avant de secouer la tête.

– Finalement, je préfère me prendre une balle que supporter ça.

– Bienvenue dans la restauration rapide, Prince Riccardo Gaviera.

  ***


– Queen Rhaenyra Targaryen. First of her name. Queen of the Andals, the Rhoynar, and the First Men. Lady of the Seven Kingdoms and Protector of the Realm.

Il est deux heures du matin. Nous avons commencé l’épisode deux de la série. Gayle est couchée juste à côté de moi, la tête sur ma cuisse, vêtue de mon tee-shirt. Et elle répète tout ce qui passe à l’écran. Au début, chaque fois qu’elle voyait la reine, elle faisait une révérence, mais je présume qu’elle est fatiguée.
Je suis plus concentré sur elle que sur la série. Plus j’apprends à la connaître, plus je suis fasciné. Parfois elle est tellement insouciante, comme si tout ce qui se passe autour de nous ne l'atteint pas. Comme si, tant que je suis à ses côtés, le reste n’a pas d’importance.

L'ombre 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant