Gayle

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Avant que j’ai pu reprendre mes esprits, elle pose un sac en plastique sur ma tête et le noue derrière ma nuque avec des gestes brusques.

– Dis-moi ce que je veux savoir, putain.

– Va te faire foutre. Je réussis à dire à travers le sac. La tarée laisse échapper un juron, j’entends ses pas s’éloigner.

– Tu l’auras voulu, pétasse. Privée de ma vue, tous mes autres sens se mettent en éveil avec plus d’acuité.

J’entends quelque chose glisser sur le sol. Il y a un temps de silence, comme un calme angoissant avant la tempête. Puis, j’entends un bruit et l’eau touche ma peau. Le jet est tiède, puissant, il est principalement concentré sur mon visage.

J’inspire naturellement une fois, le sac s’enfonce dans ma bouche, je le repousse avec ma langue et je bouge la tête dans tous les sens comme si ça pouvait me protéger du jet monstrueux.
La tarée arrête le débit d’eau quand mes poumons commencent à brûler. Ça dure à peine une minute, mais j’ai l’impression qu’une éternité s’est écoulée. Le froid saisit mon corps mouillé et bien malgré moi, un rire hystérique m’échappe. Mais putain, j’étais une fille à la vie complètement banale, maintenant je suis devenue la victime préférée de tous les tarés de la terre. Je m’étouffe dans mon rire et je me mets à tousser.

La tarée choisit cet instant pour en rajouter une couche, le jet est beaucoup plus puissant cette fois. Je serre des poings alors que mes poumons brûlent, ils peinent à se remplir d’air.

Elle arrête l’eau au bout d’une bonne minute. Il me faut attendre que ma tête arrête de tourner et que mes oreilles arrêtent de bourdonner pour que je me rende compte qu’il y a un homme qui parle.
Sa voix me parvient de très loin. Putain, je risque de m’évanouir si ça continue comme ça.

Quelqu’un me touche le visage, puis le sac est brutalement arraché. J’inspire une grande goulée d’air, comme un assoiffé se jetant sur un oasis dans le désert.

L’homme jure. Lui non plus, je ne le connais pas. Petit, cheveux noirs, forme trapue. Il porte un pantalon de toile et une chemise, et il me regarde comme si j’étais la réincarnation de Mère Teresa.

– Putain, mais je te connais, tu es la protégée de Riccardo Gaviera.
À la mention du nom du démon, la tarée se crispe et me regarde comme si elle me voyait pour la première fois.
Je papillonne des yeux, le cœur battant à tout rompre.

– Pourquoi un membre de la Cosa Nostra ferait-il du mal à Franco ? Nous sommes alliés.

Elle est conne ou quoi ?

– Je t’ai dit et répété que je n’ai rien fait à Franco.

– Tu as bien fait de m’appeler Stella, je ne crois pas que retenir cette fille soit une bonne idée.

La tarée s’emporte :

– Je me moque qu’elle soit la pute du Gaviera de l’ombre, s’ils ont fait du mal à Franco, ils vont payer. Elle prétend qu’il lui a demandé de l’accompagner acheter une bague.

– C’est vrai putain, nous pouvons aller à la joaillerie consulter les caméras et tu verras, merde !

Julio la retient alors qu’elle fonce sur moi comme un bulldozer.

– Elle dit la vérité, Stella.

– Tu n’es qu’un lâche, tu vas la croire quoi qu’elle dise pour ne pas te frotter à la Cosa Nostra.

– Non, Franco a vraiment acheté une bague avec elle.

Ses grands yeux s’humidifient, je vois peu à peu la combativité déserter son corps.

L'ombre 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant