Vous savez pourquoi les joueurs de poker professionnels utilisent des lunettes ?C'est simple, les yeux sont le miroir de l'âme. Ça peut paraître comme une connerie, mais c'est la chose la plus vraie qui existe dans ce monde rempli de mensonges.
Lorsque l'humain ressent de très fortes émotions, qu'elles soient positives ou même négatives, les pupilles ont tendance à se dilater. Les pupilles sont un signe connu pour juger de l'état émotionnel de la personne qui se trouve en face de nous, c'est un effet physiologique incontrôlable.Ma chère mère, paix à son âme, avait l'habitude de dire que j'avais les yeux d'un malade, un peu comme ceux du tueur dans Le Silence des agneaux, Hannibal Lecter. C'était sa façon à elle de dire que, du haut de mes 10 ans, je la terrorisais.
Malgré sa peur, elle ne m'a jamais abandonné.Nous vivions dans un petit studio dans le Queens, mon père était un ivrogne qui n'arrêtait de se saouler que le temps de décapsuler la prochaine bière. Il était maître-chien, le meilleur qu'on pouvait trouver dans ce coin désolé de New York, mais ses problèmes d'alcool étaient tels qu'il a fini par perdre son boulot. Débarquer au travail après avoir passé la nuit à boire, ça passe, mais tenter d’étrangler votre patron parce que sa voix augmente votre gueule de bois, ça, c'est grave.
Quand il a perdu son boulot, maman était la seule à subvenir à nos besoins. Mais au fil du temps, son travail d'aide ménagère n'était plus suffisant, alors mon ivrogne de père a trouvé la solution.
Chaque soir, des hommes aussi ivres que lui défilaient dans notre petit appartement situé dans un immeuble miteux dans le Queens. Chaque soir, j'étais enfermé dans ma chambre pendant que maman se prostituait pour permettre à mon père d'acheter sa bière et sa dose de cocaïne.Mais, elle ne donnait pas tout l'argent à mon paternel. Elle en gardait assez pour me conduire chez le psy. Car elle trouvait que ce n'était pas normal que je passe mes journées dans ma chambre, jamais je n'allais jouer avec les autres gamins au foot, aux robots ou à n'importe quel jeu stupide qu'affectionnent les gamins.
Moi, ce qui me branchait, c'était zigouiller les animaux, le chat de la voisine par exemple, un magnifique siamois qui n'arrêtait pas de venir se lécher sur le bord de ma fenêtre. Je l'ai foutu dans la machine à laver. Je suis resté dans un coin de la cuisine, observant avec attention l'eau remplir l'appareil et regardant l'animal tourner, tourner, tourner, tourner encore et encore sans jamais s'arrêter. Maman m'a trouvé là, je me rappelle qu'elle sortait à la hâte de sa chambre après avoir contenté un client, sa robe était déchirée et son visage tuméfié. Elle m'a demandé depuis quand je faisais la lessive, si c'est mon père qui m'avait ordonné de le faire. Parce que oui, mon paternel, il ne demandait pas, il ordonnait et quand j’exécutais ses ordres avec quelques secondes de retard, je recevais une bouteille de bière sur le crâne.Maman a ensuite ajouté que je n'avais pas à le faire, que je pouvais aller jouer, qu'elle allait s'occuper de tout et que ce soir, nous aurions du ragoût pour le dîner. Je lui ai dit que ça tombait bien, il y avait le chat de la voisine dans la machine qu'elle pouvait utiliser pour faire un ragoût. Maman éclata de rire, d'un rire nerveux. Puis, elle m'a gentiment réprimandé. Elle m'a interdit de dire ce genre de choses, que les gentils garçons ne disaient pas ce genre d’abomination. Elle m'avait agacé, pourquoi ne me prenait-elle pas au sérieux ? Je lui ai dit de regarder.
– Mais regarde maman, il tourne, c'est amusant !
Face à ma determination farouche et ma mine impassible, elle a fini par regarder. La machine était désormais rouge, maman s'est mise à hurler puis elle a vomi. Elle m'a encore regardé, je ne sais pas ce qu'elle a vu dans mes pupilles, mais je sais néanmoins qu'elle a eu peur, tellement peur qu'elle s'est enfuie de la cuisine après avoir arrêté la machine, comme si ma présence la mettait mal à l'aise, à l'instar d'un démon maléfique qui venait d'être libéré. Je la terrorisais.
VOUS LISEZ
L'ombre 2
RomanceRiccardo Gaviera est venu au monde pour être le bras armé de son frère. Il n'a jamais eu à faire de choix puisque toute sa vie a déjà été décidée pour lui. Mais de nature indomptable et irréfléchie, celui qu'on surnomme la pieuvre de l'ombre est le...