Dominguez

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Pendant ce temps
de l'autre côté de
l'île


Je sors un peigne de la boîte à gants pour rejeter mes cheveux en arrière. Mon nouveau visage est avenant, c’est indéniable.
Seule cette tâche rouge gâches tout.

Je sors de ma voiture, une Volkswagen bleue aux vitres blindées que je viens à peine d’acheter. Je porte un costume trois pièces sombre et un long manteau gris. Ce soir, je n’ai pas le droit à l’erreur ; je dois faire bonne impression.

Tout en moi respire le luxe et le pouvoir. Quiconque me verra pensera être en face d’un homme plein aux as. La réalité est tout autre : je suis ruiné, et ceux depuis que Antonio Belluci est mort. C’est lui qui finançait mon mode de vie ; à la place, je n’avais qu’à lui fournir des enfants pour son orphelinat.
Encore une chose que je dois à Riccardo Gaviera. 
Je resserre ma montre. Je me sens bien, plus léger, comme en connexion avec le monde. Et je dois ça non seulement à ma dernière victime, mais aussi, et surtout, à la séance de purification. Après avoir sacrifié la prostituée comme me l’a demandé la voix du Seigneur, je me suis flagellé pour lui faire don de ma douleur. 100 coups avec un fouet.

J’ai le dos lacéré, mes anciennes blessures se sont ouvertes, d’autres se sont formées. Chaque frottement de ma chemise me tire un frisson et me rappelle que j’ai fait mon devoir. 
Pourtant, malgré mon calme, j’ai failli craquer il y a deux jours. Au club, quand j’ai vu Gayle, elle était seule, saoule ; j’ai été pris d’une pulsion, j’ai failli la prendre avec moi. Heureusement que nous avons été interrompus, il est trop tôt. Pour le bon déroulement de ma vengeance, il est impératif qu’elle soit à moi. Mais si tôt. 

Je m’arrête devant les deux vigiles. De l’autre côté, il y a une foule faisant la queue pour entrer. Un jeune homme, tenant contre lui sa copine, me lance un regard mauvais.

– J’ai rendez-vous avec votre chef !

– C’est quoi ton blaze ? Je fronce les sourcils. Ils échangent un regard avant de se mettre à rire. Je suis encore plus dans l’incompréhension.

– Ton nom, répète le plus petit avec impatience. 

– Billy Saint. 

– Une minute. En attendant, fouille-le. Il s’éloigne pour passer l’appeler après avoir lancé l’ordre à son collègue. 
Je me laisse docilement faire. Je n’ai rien à cacher. Je serre néanmoins les dents quand ses mains et son détecteur de métaux touchent mes lacérations. 

– C’est bon, vous pouvez y aller.

Ils s’écartent pour me laisser entrer. À l’intérieur, la lumière est tamisée, en plus du bruit de la musique. Une fille m’accueille. Elle est aussi grande que moi, vêtue d’une robe indécente d’un rouge flashy, mettant en valeur sa peau d’ébène. 

– Bonsoir, je suis Elena. Je vais vous escorter auprès du boss. Je hoche la tête avec un sourire étudié avant de lui emboîter le pas. 
Dans l’ascenseur, elle tente de faire la conversation, mais je l’ignore. Je ne supporte pas les personnes qui parlent pour ne rien dire. 

Emilio Rossini, le chef de la Sacra Corona Unita, l’ancien chef de ce malheureux Franco, m’accueille dans son bureau, une pièce spacieuse décorée pour capter l’attention. Il y a trop de couleur à mon goût.

Avec lui, il y a une femme. Très jolie, élégamment vêtue d’un pantalon de toile blanc et d’un haut aux manches fines. Ses cheveux sont retenus au sommet du crâne. Elle a une cicatrice qui lui court le long du visage ; elle doit être récente vu la rougeur. Il y a aussi un homme qui se tient derrière Armando. Je m’avance dans leur direction et serre la main du don. Il me présente ensuite ses compagnons. La fille s’appelle Stella, la fille du chef de la Sacra Corona Unita, et l’homme, c’est Julio, son cousin. 

L'ombre 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant