Aussi étrange que cela puisse paraître, je déteste les clubs de strip-teaseuses. Pourquoi est-ce étrange ? Ma famille possède plusieurs clubs sur l'île, et quel homme sain d'esprit détesterait un lieu où les filles dansent à moitié nues ?
Je préfère le calme, ça me permet de réfléchir. Mais pour ce qui me traverse l'esprit en ce moment, je n'ai aucun besoin de réfléchir. Ou du moins, je n'y arrive pas. J'ai l'impression d'être une arme de destruction massive. Je veux détruire, détruire tout ce qui m'entoure.
Je bouillonne de rage. J'ai envie de sang.
J'ai attendu Emilio Rossi pendant plus d'une heure dans son club, mais ce connard n'est pas venu. J'ai perdu mon temps dans un lieu où la musique est beaucoup trop forte et où les danseuses ont les mains baladeuses. Pour rien !
J'ai finalement appris qu'il a décidé de jouer au père modèle et d'aller assister au récital de sa fille.
Emilio est divorcé de sa femme, chose très rare pour les made men, surtout ceux qui sont italiens. Tuer n'est pas un problème, mais le divorce est un sacrilège. Les vieilles familles mafieuses ont souvent des traditions étrangement stupides. C'est sa femme qui a la garde de leurs deux enfants, et c'est justement chez elle qu'Emilio a ramené sa fille après son récital.
J'escalade le mur en pierre. Par chance, il n'est pas très haut, mais dans mon état actuel, je serais capable d'escalader une montagne pour atteindre ce fils de pute. Je me laisse tomber à l'intérieur de la maison, l'herbe du jardin pousse une plainte sous le poids de mes bottes Timberland. Le martèlement dans mon crâne est insupportable, la petite voix, telle un démon libéré de sa cage, n'arrête pas de hurler des insanités ; si je l'écoutais, je foutrais une bombe dans cette foutue baraque, emportant femme et enfant sous le souffle de l'explosion.
Je place un silencieux sur mon arme, mes mains gantées tremblent de colère et d'impatience. Je m'avance en direction de l'avant de la maison. Emilio a laissé deux gardes devant la porte. Je vérifie de nouveau que le silencieux est bien en place, je n'ai aucune envie que les flics débarquent, alertés par les voisins qui pourraient entendre le bruit. Puis je sors de ma cachette, je vise la tête du premier garde et je tire. L'autre garde sursaute quand son compagnon tombe face contre terre. Il porte la main à l'arme planquée sous sa veste, mais je ne lui laisse pas le temps de dégainer. Je vise sa tête et je tire sans hésitation. Je sors de ma cachette et monte les quelques marches qui mènent à la petite maison de l'ex-femme d'Emilio Rossini.
J'ouvre doucement la porte, par chance elle n'est pas fermée à clé. Une petite fille est endormie sur le canapé, le poste diffuse un épisode de Dora l'exploratrice. Cette dernière demande où est le lac, alors qu'elle est à l'intérieur.
Putain, elle est conne ou quoi !
Je serre mon arme plus fort en regardant la gamine. Un souvenir me revient en mémoire. C'était lors d'une mission aux États-Unis, j'étais chargé d'infiltrer la Camorra de Las Vegas pour glaner autant d'informations que possible sur eux avant que la Pieuvre, qui à l'époque était mon grand-père, accepte de faire des affaires avec eux. J'avais 17 ans et je n'étais pas encore très connu ; mon père s'était débrouillé pour nous garder, Luca et moi, dans l'ombre jusqu'à ce qu'on termine notre formation.
Avec mes capacités physiques et intellectuelles, j'ai réussi à intégrer l'organisation. La Camorra, comme la Bratva, organise des combats clandestins dans des cages. C'étaient des combats à mort, mais combattre et gagner était le seul moyen de gravir les échelons dans ces organisations. Chose que j'ai faite, parfois facilement, mais parfois avec beaucoup de difficultés. Il y avait parmi mes adversaires des combattants hors du commun, et je n'ai réussi à me débarrasser d'eux que grâce à la ruse. Quoi qu'il en soit, après sept victoires, j'ai fini par attirer l'attention de l'exécuteur de la Camorra de Las Vegas. Il s'appelait Oliver Graham, le bras droit du chef ; il était chargé des basses besognes, un peu comme moi et Luca pour le compte de la Pieuvre.
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L'ombre 2
Roman d'amourRiccardo Gaviera est venu au monde pour être le bras armé de son frère. Il n'a jamais eu à faire de choix puisque toute sa vie a déjà été décidée pour lui. Mais de nature indomptable et irréfléchie, celui qu'on surnomme la pieuvre de l'ombre est le...