Quand le coeur balance...

Chapitre 70 - Aaron

Je tire ma valise et un sac à dos que j’abandonne à l’entrée. Je pense n’avoir rien oublié. C’était qu’une question d’heures avant que la nouvelle fasse l’effet d’une bombe et que les réseaux sociaux s’enflamment. Le grand chef Alaric Stein n’est-il qu’une imposture ? N’est-t-il qu’un drogué sans talent ? La presse se fait une joie de l’enfoncer un peu plus… et ce connard d’Archibald… je crois l’avoir défendu pour rien car à présent, je suis persuadé qu’il comptait sortir cette information d’une manière ou d’une autre… déjà qu’il s’en est lâchement pris à Neva… Ma mâchoire se crispe rien que d’y penser.

Je retrousse les manches de ma chemise avant d’attraper mon téléphone pour écrire à Alaric.

Je suis prêt pour demain. On se rejoint directement à l’aéroport.

Est-ce que je suis réellement prêt ? Pas vraiment. En réalité j’ai sauté sur l’occasion lorsque qu’Alaric m’a proposé de l’accompagner pour sauver ses restaurants et éteindre le feu médiatique à l’étranger. J’abandonne le cabinet et mes dossiers à mon collaborateur et nous partons demain. On va commencer par le Canada, les États-Unis puis terminer par l’Europe. C’est une belle façon de me défiler et de ne pas faire face à mes sentiments. Dans tous les cas, je dois l’oublier.

En faisant mes derniers achats avant de terminer ma valise, je n’avais que son visage en tête comme si elle était définitivement imprimée dans mon corps et dans ma chair. Je suis passé devant une bijouterie et j’ai aperçu un collier avec un pendentif en forme de flocon de neige. J’ai tout de suite pensé à elle. Nevasca.

Cette tempête de neige qui a bousculé mes convictions, ma vie et mon cœur. Cette tempête qui a tout balayé sur son passage. Chaque flocon de neige possède une structure cristalline unique… et Neva est singulière et incomparable. Mais chaque flocon de neige est aussi délicat et éphémère… comme tous les moments qu’on a passés ensemble qui m’ont paru à la fois trop brefs mais intenses et dont j’ai eu l’occasion de savourer chaque seconde. Même si je n’aurais jamais assez d’elle.

J’ai fait livrer le bijou chez elle par un coursier. Je ne m’attends pas à un retour de sa part, c’était simplement ma manière de la remercier. La remercier de m’avoir fait ressentir des choses que je n’avais jamais ressenties auparavant. La remercier de m’avoir bousculé au sens propre comme au figuré, d’avoir fait ressortir des aspects de ma personne que je pensais enfoui dans des sombres abysses. La remercier d’avoir ranimé mon cœur.

Je soupire en me remémorant ces derniers mois et lorsque je me surprends à penser à Laël, je réalise que je ne peux pas le détester. Comment lui en vouloir d’avoir des sentiments pour Neva alors que j’ai ressenti la même chose en posant mes yeux sur elle pour la première fois… Quelle ironie du sort… être frères et aimer la même femme.

Je m’apprête à m’assoir sur le canapé lorsque le tintement aigu de la sonnette m’extirpe de mes pensées. Je jette un coup d’œil à mon portable, il est 21h26. Je n’attends personne, c’est étrange.

Je me dirige alors vers la porte d’entrée et pose ma main sur la poignée pour l’actionner. Je suis frappé par la beauté qui se trouve devant moi et cligne plusieurs fois des yeux pour m’assurer que je ne rêve pas. Mes yeux descendent sur sa silhouette. Elle porte sa petite jupe plissée… mes mains se souviennent encore s’être invitées en dessous à l’anniversaire de Liam… merde.

Tu veux vraiment m’empêcher de t’oublier, Neva…

– Je pensais que tu allais m’ouvrir la porte à moitié nu plaisante-t-elle.

– Tu aurais aimé que ce soit le cas ?

Elle lève les yeux au ciel en esquissant un léger sourire.