Chapitre 14

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   J'ai du mal à parler, je suis à court de souffle et j'ai l'impression d'étouffer. J'ai aussi ces sanglots que j'essaye de retenir et cette boule de stresse au ventre qui me donne des nausées. Je tente de me calmer en prenant une grande bouffée d'air et, contrairement à mes intentions, cela me donne l'impression de brûlures dans les poumons. Le médecin se lève et part rapidement rassembler ses affaires, mais je sais qu'il attend encore une réponse. Je n'arrive pas à parler, aucun mot ne veut sortir de ma bouche. Il s'arrête d'assembler tout son équipement médical et se tourne vers moi.

   -Jeune fille, dites-moi où est votre ami! crie-t-il.

   Je le prends comme une gifle, ça me réveille aussitôt. Moi qui n'arrivais pas à parler juste avant, je retrouve d'un seul coup l'usage de la parole.

   -Je... À l'auberge!

   -Oui, j'ai entendu, mais dans quelle chambre?!

   Chaque fois qu'on élève la voix sur moi quand je suis stressée, cela a le don de me faire entrer dans un état de panique totale. C'est comme si je n'arrivais plus à penser normalement, comme si je ne comprenais plus ce que l'on me demandait. Je le regarde et tente de me rappeler de la question qu'il venait de me poser. Quand elle refait surface, je me mets à réfléchir bêtement, et ma réponse reflète l'état d'esprit dans lequel je me trouve. Je ne sais même pas dans quelle chambre on était. Je suis complètement perdue.

    -C'est une chambre... Une toute au fond...

   Il me regarde fixement un instant avec exaspération, puis continue d'assembler toutes ses affaires. Moi je ne sais pas quoi faire, je regarde par terre, je me sens un peu bête.

   -D'accord, toi là-bas, je reviens, reste allongé et repose toi le temps que je revienne, dit-il à Gauston qui nous fixe un à un. Et toi, tu m'emmènes jusqu'à ton ami, laisse-moi une minute le temps de finir de prendre mon matériel!

   -Oui...

   Une fois qu'il eut fini de rassembler tout son petit matériel, nous descendons en bas. Arrivé au rez-de-chaussée il se précipite vers la petite table à l'entrée afin de prendre ce qu'il lui manque avant de fourrer tout dans son petit baluchon. Moi, je suis toujours en larme, je n'arrête pas de trembler, je n'arrive pas à me calmer. J'ai l'impression de n'être qu'une pauvre idiote qui est incapable de faire quoi que ce soit en attendant le médecin qui prend énormément de temps pour prendre son matériel à mon goût. Je le regarde faire, je ne bouge pas, j'attends.

   Mais qu'est-ce que j'attends? Je devrai l'aider ou lui demander d'aller plus vite! Mais moi, empotée comme je suis, je reste là à regarder et à pleurer... Peut-être que mon ami est en train de mourir... À cause de moi? Non, sans doute pas... Attends, stop, une minute... Les coups de couteau... C'était bien au ventre? Il avait mal au ventre avant de partir non? C'est à cause de moi! Non! C'est vraiment à cause de moi! Mon ami est sans doute en train de mourir par ma faute! Mon dieu! Dépêchez-vous monsieur, s'il vous plaît!

   Je dois lâcher un petit gémissement plaintif sans m'en rendre compte, le médecin me jette un bref coup d'œil avant de finir de ranger correctement ses affaires dans son ballot maintenant plein. Je commence vraiment à paniquer, je le regarde toujours faire, je ne bouge pas et reste droite même si mes jambes veulent céder. Je sais que je ne dois pas perdre pieds maintenant sinon je n'aurai sans doute pas la force de me lever. Maintenant que je me suis mise en tête que mon ami souffre par ma faute je sens ma force m'échapper peu à peu. Mais je tiens debout et j'attends. Les secondes avant qu'il ne finisse ce qu'il fait semblent durer une éternité.

   Vite! Faustian ne va pas bien!

   J'essuie les quelques larmes qui perlent le long de mes joues quand enfin je le vois relever la tête, son baluchon sur l'épaule. Il se tourne vivement vers moi, me fait un signe de tête, je comprends que nous allons partir! Je sens l'espoir venir en moi et me donner la force de continuer.

FaustianOù les histoires vivent. Découvrez maintenant