Chapitre 21

28 3 2
                                    

   Je jette un rapide regard sur ce qu'il se passe autour de moi: la réaction des personnes assemblées ici, ce qu'il se passe à l'extérieur du bâtiment à l'affût du moindre mouvement suspect, prête à intervenir en cas de problème. Je finis par croiser le regard de l'homme blessé, il me regarde avec incrédulité et toujours avec cette pointe de peur qui brûle dans ses yeux. J'ai presque du mal à le supporter tellement il est intense et plein de terreur. Je suis toujours sceptique en ce qui concerne ce qui est en train de se dérouler en ce moment même, sous mes yeux. Mais je ne sais que faire. Briance semble gérer la situation, son frère, lui, beaucoup moins. Il est dans un triste état: pâle, le regard hagard, affalé sur le banc, les cheveux en bataille, des vêtements sales et couvert de sang. Je ne sais même plus où poser mes yeux. Je ne sais même plus où j'ai la tête. Au lieu d'attendre l'explication que doit nous offrir le frère de Briance, je décide de prendre la parole la première pour comprendre mieux la situation.

   -Excusez-moi, mais quelqu'un aurait l'obligeance de m'expliquer ce qui se passe? Il me semble que je ne sois au courant de rien du tout? Qui est à votre recherche et pour quelle raison?

   Ma question semble raisonner dans la pièce comme elle raisonne au plus profond de moi. Plus personne ne parle haut, par peur? Peur de ces personnes qui arrivent? Je n'en sais rien. Il s'élève dans la pièce des murmures incessants et presque irritants. Tous les regards sont braqués sur moi, je me sens mal à l'aise, comme mise à nue. Je baisse les yeux. Ma question semble surprendre plus d'une personne dans la pièce.

   Suis-je donc la seule à ne pas savoir ce qui est en train d'arriver? Suis-je la seule à ne pas comprendre si le danger est réel ou bien insignifiant si on arrive à y remédier le plus rapidement possible? Et qu'on-t-il fait pour se trouver dans cet état.

   Je relève les yeux et me tourne de nouveau vers Briance et son frère. Je n'arrive toujours pas à me mettre en tête qu'il puisse être son frère, et qu'elle ne m'en a jamais parlée. Il est assis sur le banc, je le vois essayer douloureusement de se relever, je fais un pas vers lui pour l'aider mais sa sœur a été plus rapide que moi.

   -Eh bien... Comment vous dire... commence-t-il. Je suis venu vous avertir que les gardes royaux passent de ville en ville pour nous débusquer, et cette fois-ci c'est sur Balamor qu'ils projettent de nous retrouver et c'est ici que nous sommes. Nous sommes des fugitifs, jeune fille. Nous sommes tous accusés de trahison envers la couronne pour avoir refusé de terminer une tâche qui nous avait été confiée. Nous avions eu pour ordre il y a maintenant quelques années d'encercler un village, et d'y tuer tous les habitants, femmes, hommes vieillards. Et d'arracher les enfants des bras de leurs parents, que nous aurions dû tuer, et de les ramener à la capitale. Tout cela pour une raison stupide! m'explique-t-il.

   -Une raison stupide? Répétai-je interloquée.

   -Pour une simple légende. Il nous a demandé de tuer tous les habitants d'un village en se fiant à une légende stupide... Comme si nous allions trouver l'enfant de cette foutue histoire, comme si le «destructeur» était réel! La connais-tu? Me demande-t-il en fixant le sol des yeux.

   -Euh... Oui, j'en ai entendu parler.

   -C'est une longue histoire, je ne vais pas m'attarder sur tous les détails qui me paraissent insignifiants, nous manquons de temps! Mais tu dois quand même être mis au courant de tout cela, nous ne pouvons pas nous permettre de te mettre toi et tous ceux ici présent en danger si tu veux alerter les gardes. Je peux commencer par la requête que le roi nous a confié, maintenant que tu sais quel en était les conséquences dramatiques! Je reprends! Un des fils du roi nous a envoyé dans un village pour accomplir une tâche abominable pour des fins égoïstes et stupides. Nous avons donc tous pris la décision de nous insurger contre celui-ci. Nous n'allions tout de même fin aux jours de braves personnes pour leur voler leur progéniture. Quand l'ordre a été donné, une minorité des gardes seulement ont refusé d'accomplir la mission. Nous nous sommes donc enfuit. Nous faisions partie de la garde la plus apprécié du royaume, apprécié par ses habitants et du feu roi, considéré comme la garde la plus proche et la plus fidèle du roi. Refuser un ordre du prince, c'est refusé de l'accepter comme le prochain souverain. Quand le prince l'a appris, il est rentré dans une colère noir, il a demandé à ce que la mission ce fasse la nuit suivante et qu'elle tourne en carnage, que tout habitants qui oserait lever une arme contre ses gardes se verrait punir sévèrement. Tous devaient mourir, sauf les enfants, mais pour les renégats, les gardes avaient pour obligation de les laisser en vie et de les tuer les derniers pour qu'ils puissent voir leur village mis à feu et à sang. Quand la mission fut accomplie, ils avaient pour devoir de nous faire exécuter en nous accusant de haute trahison envers la couronne d'Ador. Donc nous voilà quelques années plus tard, tu as compris de toi même que nous avons réussi à nous enfuir, bien que quelques-uns aient perdu la vie à l'aide d'un garde qui lui aussi a laissé la sienne en nous venant en aide. Le prince ne s'est jamais vraiment remis de cette histoire, je peux dire haut et fort que je ne veux effectivement pas de lui comme suzerain, si cela arriverait un jour... Revenons-en aux faits. Nous nous sommes donc enfuit et nous sommes partis en direction du village sur le point de se faire attaquer. Nous sommes arrivés une ou deux heures avant que le massacre commence, nous avons pu sauver quelques habitants qui ont rassemblé leurs affaires avant de partir. Le reste n'a pas voulu nous écouter et nous n'avions pas assez de temps pour les persuader que nous leur disions la vérité... Ils l'ont payé de leur vie. Mais lorsque le roi a été informé de nous disparition et celle des quelques habitants du village, il s'est de nouveau mis en colère et a demandé à ce que l'on nous retrouve et à ce que l'on nous tue. L'amertume est encore présente et la preuve est là. On nous cherche encore. Je reviens du village de Caedes, plusieurs de nos amis y ont laissé la vie j'ai essayé de leur venir en aide, mais je n'ai pas réussi et je me suis retrouvé blessé. Ce n'étaient pas les premiers, maintenant ils sont en route pour nous débusquer, nous devons partir, et vite!

FaustianOù les histoires vivent. Découvrez maintenant