Arriver dans un nouvel endroit était toujours déroutant. Arriver en plein milieu de l'année, reprendre un poste tenu par un retraité complètement vieux jeux et réussir à s'imposer était bien pire. En arrivant ici, Bill découvrit que les méthodes employées ne ressemblaient pas du tout aux siennes et que les plus hauts placés semblaient avoir tout pris pour acquis alors que dans ce métier, rien le l'était, jamais. S'il y avait bien un monde dans lequel l'évolution était constante, c'était celui-là. C'était même un monde incertain, imprévisible et la moitié du temps incontrôlable.
Depuis qu'il était arrivé, donc la veille, c'était la première fois qu'il se retrouvait un peu seul, enfermé dans son bureau. On lui avait expliqué diverses choses sur diverses personnes, on lui avait fourré une pile de dossiers dans les bras, pensant que, comme la personne précédente, il allait se contenter d'agir depuis son fauteuil en faux cuir. Seulement, Bill était jeune, motivé, et surtout fasciné. Gérer ses dossiers depuis son bureau ? Jamais de la vie ! Il comptait bien les détailler un par un, questionner le personnel et rencontrer chaque personne de qui il était censé s'occuper.
La veille au soir, la nuit même, il avait pris le temps de lire chaque dossier. Il avait retenu plusieurs noms, plusieurs pathologies. Il avait hâte de les rencontrer, mais il avait aussi la boule au ventre. Le changement serait loin d'être facile, surtout pour eux. Bill avait un peu peur de ne pas réussir à s'intégrer, mais il l'espérait vraiment.
Quelqu'un toqua soudain à la porte de son bureau, l'arrachant définitivement à ses réflexions alors qu'il levait les yeux vers la personne qu'il avait autorisé à entrer.
« Vous avez demandé quelqu'un, monsieur ? » ; son regard d'ambre scanna la femme d'une quarantaine d'années qui lui faisait face, se tenant négligemment et ayant l'air ennuyée d'être là.
« Oui. Je sais que vous êtes tous débordés, mais je voudrais que quelqu'un me présente chaque patient. » ; visiblement prise de cours, elle afficha une mine surprise et incertaine.
« Un par un ? »
« Bien sûr, un par un. Je ne peux pas tenter de les soigner sans les connaître, et je ne veux pas provoquer la panique en me présentant seul. »
« Ils paniqueront de toute façon. » ; Bill se leva de son siège, lança les fameux dossiers sur le bureau en bois et contourna celui-ci pour faire face à l'infirmière.
« J'en suis conscient, merci. » ; elle baissa les yeux face aux siens, et le blond suivit son regard jusqu'à ce qu'il tombe sur la petite plaque au bord du bureau.
Bill Kaulitz
Médecin psychiatre